DE LA LEVURE A L'HOMME, le phénomène semble universel : une légère sous-alimentation conduit à un allongement de la durée de vie.
Si l'effet bénéfique de la restriction calorique a été décrit à maintes reprises et chez de multiples espèces, les mécanismes moléculaires et cellulaires qui en sont à l'origine restent mal compris. Mais, aujourd'hui, une étude américaine menée chez la mouche drosophile apporte de nouvelles données au problème : Rogina et coll. (université du Connecticut, Farmington) ont en effet découvert que, chez ce métazoaire, l'allongement de la vie induit par la restriction calorique dépend de la surexpression de la protéine Sir2.
L'effet du resveratrol.
Sir2 a déjà été impliquée dans les mécanismes de détermination de la durée de vie et dans les phénomènes induits par la restriction calorique. Il a notamment été observé que la surexpression de Sir2 est associée à un allongement de la vie chez certains métazoaires. De plus, un agoniste de cette histone désacétylase, le resveratrol (un polyphénol aux propriétés antioxydantes), est connu pour prolonger la vie des levures, des nématodes, des moules et des mouches.
Rogina et coll. ont décidé d'analyser plus en détail le rôle de Sir2 dans les processus moléculaires et cellulaires déclenchés par la restriction calorique. Dans ce but, ils ont utilisé le modèle de la mouche drosophile.
Dans un premier temps, les chercheurs ont étudié la durée de vie de lignées de mouches mutantes qui surexpriment le gène Sir2. Il est apparu que l'espérance de vie des mouches qui produisent au moins quatre fois plus d'ARN messager Sir2 que les mouches sauvages augmente de 20 à 57 %. Cette série d'expériences a clairement confirmé le rôle de Sir2 dans la détermination de la durée de vie.
La question suivante était de savoir si Sir2 intervenait dans l'allongement de la vie provoqué par la restriction calorique. Pour y répondre, Rogina et coll. ont testé l'effet d'un régime hypocalorique sur des mouches n'exprimant pas Sir2. Contrairement aux drosophiles sauvages, la vie de ces mouches mutantes n'a pas été prolongée par une restriction calorique. Ce résultat suggère que Sir2 est indispensable à l'effet bénéfique de la restriction calorique.
Une absence d'effet cumulatif.
Par ailleurs, les chercheurs ont pu observer que, chez les mouches qui surexpriment Sir2 (et qui vivent donc plus longtemps que des mouches sauvages), la restriction calorique ne modifie pas l'espérance de vie. Cette absence d'effet cumulatif indique que les deux phénomènes passent probablement par une voie identique.
En conclusion de leur travail, Rogina et coll. proposent un modèle dans lequel la restriction calorique va conduire à une surexpression du gène Sir2. La protéine surproduite agira sur l'expression d'autres gènes qui interviendront eux-mêmes dans la détermination de l'espérance de vie.
La nature des signaux de transduction qui activent l'expression de Sir2 et celle des gènes contrôlés par l'histone désacétylase surproduite restent encore à préciser.
B. Rogina et coll., « Proc Natl Acad Sci USA », édition en ligne avancée.
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