«L'espérance de vie des patients atteints de maladie mentale sévère est réduite de 15 à 20 ans du fait de l'augmentation de la mortalité cardiovasculaire, notamment par infarctus, qui vient au premier plan devant les suicides», entame le Dr Djèa Saravane6 (Hôpital psychiatrique, Ville-Evrard). Il existe chez ces patients une fréquence plus importante des facteurs de risque cardiovasculaire classiques tels que surpoids et obésité, diabète, hypertension artérielle et tabagisme. L'obésité est notamment présente chez 44 à 55% des patients schizophrènes et chez 21 à 49% des personnes souffrant de troubles bipolaires. D’autres facteurs de risque caractéristiques de cette population spécifique viennent s’y greffer : pauvreté, accès limité aux soins médicaux et consommation de psychotropes.
Ces derniers entraînent une prise de poids et la survenue d’effets secondaires métaboliques (dyslipidémie, diabète). Ils constituent à ce titre, un risque cardio-vasculaire supplémentaire à prendre en compte. « Nous sommes tout à fait démunis face à ce problème, témoigne Gérard Apfeldorfer, psychiatre à Paris. Les neuroleptiques de nouvelle génération entraînent une prise de poids très importante qui altère la qualité de vie de ces patients et confère un risque sur la santé. Beaucoup de psychiatres ferment les yeux là-dessus en se canalisant sur les problèmes mentaux du patient, faute d’alternative thérapeutique. Mais cela pose de sérieux problèmes, notamment en terme d’observance. Parfois, le fait de changer de molécule peut apporter une amélioration. L’Abilify (aripiprazole) par exemple, n’a pas trop d’effet sur le poids, illustre-t-il. En outre, il faut savoir que les anti-dépresseurs peuvent également entraîner une prise de poids. »
Un mécanisme mal compris
Cet effet indésirable est connu de longue date pour les neuroleptiques. Elle est majeure avec les antipsychotiques atypiques. En revanche le gain pondéral est moindre mais néanmoins existant avec les antidépresseurs tricycliques. "Le risque cardiovasculaire est important avec la clozapine et l'olanzapine qui majorent aussi diabète et dyslipidémie, clarifie le Dr Djèa Saravane. Ce risque existe également mais est plus faible pour la rispéridone et encore plus faible sous aripiprazole. Le lithium augmente le poids chez 30 à 70 % des patients et le valproate de sodium chez 70 % d'entre eux". Le mode d'action de ces molécules sur la prise alimentaire et la prise de poids reste encore à préciser. « On en connaît mal les mécanismes, mais il se pourrait que l’effet de satiété ne soit plus identifiable par le patient qui se met à manger davantage », explique Gérard Apfeldorfer.
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