ON SAIT QUE l'inflammation et les infections systémiques accélèrent l'athérogenèse chez l'animal ; on sait aussi que, chez l'homme, des marqueurs circulants de l'inflammation comme la protéine C-réactive prédisent le risque d'événements cardio-vasculaires. Si une inflammation chronique peut faire le lit de l'athérosclérose, qu'en est-il des infections aiguës ? Récemment, l'équipe de Grau (« Stroke », 2004) a suggéré qu'une hyperleucocytose peut, sur une courte période, accroître le risque d'AVC ; plusieurs petites études ont suggéré qu'il peut exister une augmentation transitoire du risque d'infarctus du myocarde après une infection.
Un très grand registre de médecine générale.
Pour en savoir plus, des Britanniques ont étudié l'incidence de l'infarctus du myocarde et de l'accident vasculaire cérébral d'une part, après vaccination contre la grippe, le tétanos et le pneumocoque, d'autre part, après des infections naturelles. Pour cette étude, les auteurs ont utilisé un registre de données de médecine générale britannique (United Kingdom General Practice Research Database : Ukgprd), registre qui contient sur ordinateur les renseignements médicaux de plus de cinq millions de personnes. Au sein de cette cohorte, on a identifié les patients ayant reçu un ou deux nouveaux diagnostics d'infarctus du myocarde ou d'AVC pendant une période commençant plus de six mois après leur inclusion dans Ukgprd. Ensuite, on a recherché les données concernant les vaccinations contre la grippe, le tétanos et le pneumocoque ; de même, on a colligé les données concernant les infections urinaires aiguës et les infections respiratoires aiguës comme les pneumonies, les bronchites, les « infections de la poitrine » et la grippe. Seules ont été retenues les personnes ayant soit été vaccinées, soit eu une infection aiguë.
Ainsi, on a constitué deux grands groupes de patients : environ 60 000 ayant eu un infarctus du myocarde et environ 55 000 ayant eu un AVC. Puis au sein de ces deux grands groupes, on a identifié ceux qui avaient eu une des trois vaccinations citées ci-dessus ou une infection aiguë respiratoire ou urinaire. Enfin, dans chacun de ces sous-groupe (cinq sous-groupes dans chaque grand groupe), on a identifié le délai de survenue de l'événement (1-3 jours, 4-7 j, 8-14 j, 15-28 j, 29-91 j, période totale d'inclusion).
Un pic dans les trois premiers jours d'une infection respiratoire.
Schématiquement, les résultats sont les suivants :
- on n'a pas observé d'augmentation du taux de premier infarctus ou de premier AVC dans les périodes suivants les vaccinations ;
- en revanche, qu'il s'agisse du premier infarctus du myocarde ou du premier AVC, les taux étaient, de façon significative, plus élevés : d'une part, après un diagnostic d'infection respiratoire, avec un pic dans les trois premiers jours (incidence de 4,95 pour l'infarctus et de 3,19 pour l'AVC) ; d'autre part, mais à un moindre degré, après une infection urinaire aiguë.
« Cette étude montre que les infections aiguës du tractus respiratoire et du tractus urinaire sont associées à une augmentation transitoire du risque d'événements vasculaire », indiquent les auteurs. Le fait que deux types d'infections très différentes (respiratoire et urinaire) dans deux organes différents sont associés à une grande, mais transitoire, augmentation des événements cardio-vasculaires, soulignent les auteurs, conforte fortement la notion selon laquelle une inflammation systémique modifie par elle-même la probabilité de survenue d'un événement vasculaire. « Nous ne savons pas si l'augmentation transitoire du risque est due à une altération à court terme de la fonction endothéliale ou à d'autres mécanismes, comme des modifications dans la composition de la plaque, une activation des globules blancs, la déshydratation ou le repos au lit », concluent les auteurs.
Liam Smeeth et coll. « New England Journal of Medicine » du 16 décembre 2004, pp. 2611-2618.
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