«L’OBÉSITE est une maladie complexe, très difficile à prendre en charge et le fait de miser sur la multidisciplinarité est incontestablement un atout. En effet, la dimension psychosociale de la maladie, les problèmes de diététique, ainsi que l’activité physique et sportive, sont tout aussi importants que le volet médical», explique le Pr Maïthé Tauber, responsable du Repop Toulouse-Midi-Pyrénées.
Ce réseau de prise en charge de l’obésité infantile est le tout premier (en même temps que le Repop Ile-de-France), à avoir vu le jour en France. Il a été mis en place en 2003 dans le cadre du premier Programme national nutrition santé (Pnns) lancé deux ans plus tôt par le ministère de la santé. Après ce lancement, d’autres Repop ont été créés en Franche-Comté, Grand-Lyon et Aquitaine.
L’objectif de ces réseaux est de stabiliser la progression de l’obésité infantile par le biais de la prévention, du dépistage et d’une prise en charge multidisciplinaire, de proximité concertée et décloisonnée. « Le Repop n’est pas uniquement un réseau de soins, c’est un véritable réseau de santé . La prévention et le dépistage précoce de la maladie sont d’une extrême importance», précise le Pr Tauber.
Dans tous les Repop, l’enfant et sa famille sont au centre de la prise en charge. « Chaque réseau est organisé autour de trois grands pôles. Le premier est constitué par les soignants de ville: les médecins (généralistes, pédiatres, endocrinologues, médecins du sport, psychiatres…) et les non-médecins (diététiciens, psychologues, kinésithérapeutes, infirmières, pharmaciens…). Le deuxième pôle est fondé sur le lieu de vie de l’enfant, principalement l’école, mais aussi les centres de loisir, les crèches. Cela signifie que nous travaillons en étroit partenariat avec l’Education nationale. A Toulouse, par exemple, nous avons mis en place un programme d’activités physiques adapté en impliquant et en formant tous les professeurs d’EPS de la région. Enfin, le troisième pôle repose sur le milieu hospitalier: les CHU, les hôpitaux généraux et d’autres établissements de soins (les maisons d’enfants a caractère sanitaire)», explique le Pr Tauber.
Parallèlement à cette architecture de base, chaque Repop fonctionne avec ses propres spécificités. Ainsi, à Toulouse, la prise en charge de l’enfant et de la famille se développe autour d’un trio de partenaires : le médecin traitant référent, l’acteur de proximité et l’accompagnateur. «Dans environ 70% des cas, le médecin référent est un généraliste. Sinon, cela peut être un pédiatre, un endocrinologue ou un médecin du sport. L’acteur de proximité est toujours un soignant. Il peut s’agir d’un médecin du sport, si on estime par exemple que l’activité physique et sportive doit être privilégiée, mais aussi un psychiatre, un psychologue ou une diététicienne. Enfin, l’accompagnateur est une personne proche de l’enfant et de son lieu de vie: une infirmier libéral ou scolaire, la PMI, une assistante sociale, un professeur d’EPS, un éducateur sportif… », explique le Pr Tauber.
Le Repop Toulouse s’adresse aux enfants et aux adolescents (jusqu’à 16 ans) de la région, qui présentent une obésité définie par un IMC supérieur au 97e percentile des courbes françaises de référence. «La prise en charge s’étale sur une durée de deux ans. Le contrat de départ avec l’enfant et la famille est que celui-ci doit, sur cette période de deux ans, venir voir au moins une fois par mois un des partenaires du trio (médecin référent, acteur de proximité, accompagnateur). Ensuite, la clé de la réussite dépend bien sûr du niveau d’engagement de l’enfant et de la famille, mais aussi de la capacité des différents partenaires à travailler de manière concertée et à communiquer entre eux», souligne le Pr Tauber.
Au début, pour assurer cette communication, les différents partenaires du réseau disposaient d’un petit carnet navette. Mais, très prochainement, ils vont pouvoir utiliser le dossier médical informatisé et partagé. Autre particularité du Repop Toulouse : quatre consultations par an de psychologue ou de diététicienne sont remboursées ce qui, selon le Pr Tauber, constitue une avancée incontestable pour les patients issus de famille en situation de précarité. Quant au médecin référent, il perçoit un forfait pour la tenue du dossier médical informatisé.
Après seulement trois ans d’existence, il est difficile de faire véritablement un bilan de l’action du Repop Toulouse. «Mais les premiers résultats montrent clairement que cette prise en charge en réseau est meilleure que celle développée en ambulatoire, souligne le Pr Tauber . D’ores et déjà, il y a environ 150 enfants qui ont achevé la période des deux ans et pour lesquels nous avons un peu de recul. Au total, nous avons un taux d’échec d’environ 20%. Cela signifie que, chez ces enfants, il y a eu une augmentation de l’IMC. Mais, dans la très grande majorité des cas, ce sont des échecs partiels car, même s’ils ont vu augmenter leur IMC, ces enfants ont généralement amélioré leur comportement: soit en mettant en place une activité physique régulière, soit en modifiant au moins en partie leurs habitudes alimentaires. Le taux de 80% de réussite se divise en deux groupes d’enfants: environ 50% pour lesquels la diminution de l’IMC a vraiment atteint l’objectif fixé au départ et 30% pour lesquels la baisse a été moins forte qu’espérée, mais pour lesquels la prise en charge est quand même considérée comme un succès.»
D’après un entretien avec le Pr Maïté Tauber, responsable de l’unité d’endocrinologie de l’hôpital des enfants de Toulouse et du Repop Toulouse (réseau de prévention et de prise en charge de l’obésité pédiatrique en Midi-Pyrénées).
Le nouveau Programme nutrition santé mise sur des réseaux uniques, pédiatriques et adultes
Rendu public le 6 septembre par le ministère de la Santé, le deuxième Programme nutrition santé (Pnss 2006-2010) prévoit de mettre en place dans un délai de deux ans, «autant que faire se peut» autour des 31 CHU et dans toute localité volontaire, des réseaux de prise en charge de l’obésité (Repcob) à la fois infantile et adulte. Ce qui signifie que les Repop devraient être remplacés par ces Repcob centrés à la fois sur les enfants et les adultes. «Je pense que ce sera difficile. Mettre en place un réseau unique risque de poser des problèmes car les partenaires et les objectifs ne sont pas les mêmes. Un réseau pédiatrique accorde une très grande importance à la prévention et le dépistage précoce tandis qu’un réseau adulte vise surtout à éviter les complications», souligne le Pr Tauber.
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