Comment comprendre qu'un animal, un rongeur en l'occurrence, dépourvu d'yeux, perde son rythme circadien, alors qu'en l'absence unique des cellules à cône et à bâtonnet, il conserve ce biorythme. C'est une réponse à cette étonnante interrogation qu'apportent trois chercheurs américains (Bethesda) dans le dernier « Nature ».
Ignacio Provencio, Mark D. Rollag et Ana Maria Castrucci ont mis en évidence un maillage photorécepteur étendu dans les couches profondes de la rétine de la souris. Ce réseau a été visualisé grâce à l'utilisation d'un antisérum contre la mélanopsine, substance équivalente à un photopigment. Une réaction immunitaire a été mise en évidence dans un sous-groupe de cellules ganglionnaires de la rétine qui ressemblent morphologiquement à celles qui se projettent dans le noyau suprachiasmatique, site du pacemaker circadien primaire. La mélanopsine, seule opsine connue existant dans ces cellules ganglionnaires, est effectivement exprimée dans leurs dendrites. Ces derniers forment un filet riche en opsine, soit un appareil photorécepteur déjà repéré dans la rétine de mammifères.
Structure de « capture large »
De fait, les yeux de mammifères sont soumis à deux fonctions distinctes : la vision et la détection lumineuse. La vision requiert une analyse fine d'éléments saisis par des photorécepteurs à « capture étroite », les récepteurs à cônes et bâtonnet ainsi que des neurones intrarétiniens. A l'opposé, la régulation photonique des rythmes circadiens ne nécessite que la détection de changements de l'ambiance lumineuse, pour laquelle une résolution spatiale fine n'est pas justifiée, voire source d'erreurs. La structure de « capture large » de la photoréception, encore inconnue n'avait jusqu'à présent jamais été décrite. La découverte américaine semble bien répondre à ce cahier des charges.
Deux systèmes peuvent être envisagés, au niveau rétinien, pour apprécier la luminosité ambiante. Le premier est d'additionner ou de faire la moyenne des données enregistrées par les récepteurs étroits. L'autre serait l'existence d'un appareil anatomique possédant un système photorécepteur intégrant une capture large. Le maillage décrit par les chercheurs américains pourrait remplir cette fonction. Il expliquerait les différences entre rongeurs privés de leurs yeux et ceux dépourvus de cellules à cônes et à bâtonnets.
« Nature » vol. 415, 31 janvier 2001, p. 493.
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