Professionnels et parents sont impliqués

Un réseau contre l'obésité de l'enfant

Publié le 22/01/2004
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Dépistage

L'obésité est définie par un excès de masse grasse évalué surtout par le rapport poids sur taille. L'indice de masse corporelle (IMC) permet de constituer une courbe de référence.
Dans les obésités sévères, on peut pratiquer l'absorptiométrie biphotonique qui permet de déterminer à la fois la masse grasse, la masse maigre et la masse minérale osseuse.
La mesure du pli cutané est soumise à beaucoup d'erreurs chez l'enfant obèse.
Lors de l'examen clinique, il faut reconstituer la courbe de corpulence grâce à l'IMC, mais aussi les courbes pondérales et staturales ; en effet, on observe chez l'enfant obèse une accélération de la croissance staturale. Tout ralentissement de la croissance staturale chez un enfant obèse doit être considéré comme un signe d'alarme et faire rechercher une pathologie organique endocrinienne.
Les courbes de corpulence ont été élaborées avec le Pnns (Programme national de nutrition santé) et l'Apop (Association pour la prévention et la prise en charge de l'obésité pédiatrique), et validées par le comité de nutrition de la Société de pédiatrie ; l'obésité de l'enfant y est définie lorsque l'IMC est supérieur au 97e percentile. On parle d'obésité de degré 1 lorsque l'IMC se situe entre le 97e percentile et le percentile correspondant à un IMC de 30 à 18 ans. Au-delà, il s'agit d'une obésité de degré 2.
Cette courbe présente un pic vers 1 an, puis décroît jusqu'à 5-6 ans, avant de remonter progressivement et de s'accélérer au moment de la phase prépubertaire.
Ce « rebond » physiologique qui survient vers 5-6 ans est très important ; s'il survient précocement, vers 3 ans, par exemple, il permet de prévoir un risque d'obésité et, donc, de prendre des mesures simples qui, bien suivies, permettront de la prévenir. Le poids de naissance a son importance, car on sait que les enfants hypotrophiques à la naissance vont avoir une phase de rattrapage la première année et qu'ils sont souvent à haut risque d'obésité et de troubles métaboliques ultérieurs.
L'allaitement au sein exclusif jusqu'à 6 mois est la meilleure prévention de l'obésité ; cela est dû tant à la composition du lait maternel, qu'aucun lait artificiel n'a réussi à égaler, qu'au fait que, au sein, l'enfant s'arrête spontanément et découvre la notion de satiété.

Conséquences

Les conséquences immédiates de l'obésité de l'enfant sont, même à 5 ou 6 ans, des difficultés d'ordre social, ces enfants sont stigmatisés par leur excès de poids. Il est très important d'évaluer l'image que l'enfant a de son corps.
Les problèmes orthopédiques sont majorés par le poids : pied plat, genu valgum, entorses fréquentes, risque d'ostéochondrite de la hanche vers 10 ou 12 ans.
Sur le plan respiratoire, bien qu'il n'y ait pas d'élément formel d'augmentation de l'asthme chez l'enfant obèse, il faut rechercher les épisodes de dyspnée asthmatiforme à l'effort en particulier, mais aussi les ronflements et les sueurs nocturnes.
La tension artérielle doit être prise, à la recherche d'une hypertension qui peut déjà exister, qui sera plus nette vers 10 ans et s'amplifiera à 16 ans.
Le risque d'obésité à l'âge adulte augmente au fil du temps, en revanche, une prise en charge précoce (vers 5-6 ans) augmente les chances de contrôler la situation.
A long terme, chez l'enfant qui reste obèse à l'âge adulte, les conséquences sont, entre autres, les troubles cardio-vasculaires (HTA, athérome, dyslipidémie), l'hyperinsulinisme du préadolescent obèse, puis le diabète non insulinodépendant et, enfin, le diabète insulinodépendant.

L'examen

Il doit se faire en présence des parents.
On recherchera les antécédents personnels, tels que le diabète gestationnel, qui représente un facteur de risque, le poids de naissance (enfants hypotrophiques, notamment), l'alimentation (au sein ou non, et la durée de l'allaitement), la croissance staturo-pondérale, en vérifiant que l'augmentation de poids correspond à une accélération de la croissance (en cas de stagnation staturale, il faut penser à rechercher une pathologie endocrinienne), les pathologies associées et la prise de certains médicaments, facteurs de facilitation d'obésité (corticoïdes, certains anticomitiaux).
L'histoire familiale permettra de retrouver éventuellement une obésité parentale (quand il existe un parent obèse, le risque d'obésité de l'enfant est multiplié par 3 et par 6 lorsque les deux parents sont obèses ; il existe alors un risque majeur de difficulté de prise en charge), une obésité dans la fratrie, un diabète de type 2, des risques cardio-vasculaires et d'hypertension. L'origine géographique, le niveau socio-économique, le lieu de vie, les conditions familiales sont autant de facteurs qui entrent en compte dans la survenue de l'obésité.
L'examen clinique comprendra, bien sûr, les mesures anthropométriques, poids, taille, IMC et tour de taille (à 10-12 ans, un tour de taille supérieur à 1 mètre est un signe de gravité). De même, la prise de tension artérielle, la recherche d'un essoufflement, de vergetures, un Acanthosis nigricans retrouvé plus souvent chez les Africains et les Asiatiques, exceptionnellement chez les enfants d'ethnie blanche. La gynécomastie sera recherchée afin de faire la différence avec une puberté précoce chez la fille et d'évaluer le niveau pubertaire (un début d'apparition des seins et de pilosité fait craindre vers 6 ans un hypercorticisme ou une tumeur). L'examen orthopédique étudiera les hanches, les genoux, les chevilles et la statique rachidienne.

Evaluation

On étudiera les habitudes alimentaires, le rythme des repas, l'existence d'un petit déjeuner, d'un grignotage, la nature des boissons consommées, le lieu du repas. Il faut expliquer à l'enfant et à ses parents l'importance des quatre repas par jour, de leur rythme régulier, de l'absence de grignotage.
L'étude du mode de vie de l'enfant est essentielle : activités physiques scolaires et extrascolaires, temps passé devant un écran, activités de loisir. On insistera sur l'importance de l'activité physique et sur la responsabilité de la sédentarité dans l'existence d'une obésité. Il est nécessaire de préciser que l'obésité n'est pas une maladie (sauf exception) et qu'elle ne nécessite donc pas d'examen complémentaire, mais une modification des habitudes alimentaires et du mode de vie. L'implication de toute la famille est indispensable pour que la prise en charge soit efficace.
Qu'il s'agisse d'une obésité de degré 1 ou de degré 2, le Repop permet une prise en charge adaptée, pluridisciplinaire. Tous les acteurs (médecins, diététiciennes, kinésithérapeutes) sont formés afin d'avoir une stratégie et un langage communs dans le dessein d'une plus grande efficacité. Les acteurs de dépistage sont essentiellement les pédiatres, les médecins de PMI, les médecins scolaires qui peuvent orienter les enfants à prendre en charge vers des médecins libéraux du réseau lorsqu'il s'agit d'une obésité de grade 1 ou vers un centre expert (service hospitalier référent) pour les obésités de grade 2.

Conférence du Pr Ricour (service de nutrition de l'hôpital Necker - Enfants-Malades), dans le cadre des formations organisées par le service de santé scolaire de la Dases, Paris.
Services référents, coordinations du réseau : hôpital Necker - Enfants-Malades, tél. 01.44.49.58.97, hôpital Trousseau, tél. 01.44.73.63.61, hôpital Robert-Debré, tél. 01.40.03.53.01.

> Dr ARMELLE LOURY-GUILLOTIN

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7462