Trois jours avant la publication officielle de la quatrième version - baptisée « 1.40 » - du cahier des charges SESAM-Vitale, le Centre national des professions de santé (CNPS) avait refusé officiellement de le valider (« le Quotidien » du 20 mai). Le CNPS, qui regroupe 25 syndicats de professions de santé libérales, reproche essentiellement au nouveau cahier des charges de compliquer la tâche des praticiens en leur faisant faire sur leur poste de travail deux documents à la fois : une FSE pour la Sécu, doublée d'une demande de remboursement électronique (DRE) à l'intention des régimes d'assurance-maladie complémentaires.
De son côté, la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) souligne que « SESAM-Vitale 1.40 est parfaitement neutre vis-à-vis des choix de chaque professionnel de santé ». Autrement dit, les praticiens resteront libres d'utiliser ou non les nouvelles fonctionnalités qui seront offertes par les logiciels répondant au cahier des charges 1.40 pour le tiers-payant et la prise en charge du remboursement de la part complémentaire des soins.
L'aspect facultatif des nouvelles fonctions proposées ne semble pas sauter aux yeux des syndicats professionnels. En outre, ils ont d'autres griefs à l'encontre du GIE SESAM-Vitale et des caisses d'assurance-maladie.
Le président de la CSMF, première centrale syndicale de médecins libéraux, se dit « favorable à la modernisation du circuit de remboursement des soins », mais opposé à la « mise en relation des professionnels avec de multiples partenaires ». « Incontestablement, ce système est mis en place pour favoriser le tiers-payant », en déduit le Dr Michel Chassang. « Il est plus urgent de publier le décret, attendu depuis dix ans, qui permettra le partage des données de l'assurance-maladie avec les unions professionnelles », précise le président de la CSMF.
« Toute une profession conteste le cahier des charges et l'on continue comme si de rien n'était : c'est surprenant », relève, pour sa part, le Dr Jean-Claude Régi, président de la Fédération des médecins de France (FMF). Au syndicat Alliance, le Dr Jean-Gabriel Brun apprécie, au nom des chirurgiens, la désynchronisation des signatures électroniques des différents intervenants sur un même dossier, mais il craint « une double saisie pour les régimes obligatoires et complémentaires », ce qui serait, dit-il, « de la folie ».
Une vision « technico-administrative »
« Il n'y aura pas double saisie mais double facture », rectifie le pharmacien Pierre Leportier, secrétaire général du CNPS chargé de la commission informatique. Néanmoins, ce représentant de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) considère que « les avancées du cahier des charges 1.40, telles qu'elles sont annoncées, sont du marketing, des mesurettes pour attirer le chaland ».
En donnant la possibilité de dupliquer la feuille de soins sur le poste de travail, pour le compte des complémentaires santé, « le cahier des charges 1.40 va à l'encontre du "on-line" », fait remarquer Pierre Leportier. Récemment, le rapport Stern a plaidé en effet en faveur d'une libération du poste de travail par la mise en place d'un portail SESAM-Vitale, avec plusieurs serveurs offrant des services en ligne, comme la fabrication et la facturation des FSE (« le Quotidien » du 27 janvier).
Même le syndicat MG-France, qui a pourtant contribué à la généralisation de la télétransmission, est mécontent. « Depuis des années, le GIE SESAM-Vitale a pris l'habitude de modifier les dispositions techniques selon ses propres besoins », note son président, le Dr Pierre Costes. Il estime que les praticiens ne doivent pas être soumis à « une vision technico-administrative déconnectée de la réalité ». Le Dr Costes « attend une position publique du directeur de la CNAM et des autres caisses ». « S'il n'y a pas de changement de politique, il y aura affrontement et MG-France y participera », prévient-il.
La FSPF et MG-France ont fondé respectivement Resopharma et Medsyn, deux organismes concentrateurs techniques (OCT) qui pourraient se sentir menacés par la version 1.40 de SESAM-Vitale, puisque celle-ci propose aux praticiens de se passer éventuellement de leurs services pour « l'éclatement » des FSE. Pierre Leportier (FSPF) reconnaît que les OCT peuvent être « bien sûr, perdants ». A MG-France, le Dr Costes minimise l'enjeu du cahier des charges 1.40 pour les OCT professionnels, dont Medsyn. « Seulement 5 % environ des professionnels de santé libéraux ont recours aujourd'hui à des OCT professionnels », fait valoir le Dr Costes.
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