De notre correspondante
à New York
« Notre étude démontre tout d'abord qu'un récepteur des lipoprotéines, le LRP (LDL Receptor-Related Protein), est impliqué dans un processus de signalisation cellulaire, explique au "Quotidien" le Dr Philippe Boucher, chercheur français en postdoctorat au laboratoire de génétique moléculaire de Dallas (Texas) et premier signataire de l'étude . C'est une nouvelle fonction pour ce récepteur, complètement différente de la simple capture de lipoprotéine. Le LRP est important dans le maintien de l'intégrité de la paroi vasculaire. Il protège contre l'apparition des lésions d'athérosclérose, par le biais du contrôle de la voie du PDGF (Platelet-Derived Growth Factor), depuis longtemps suspectée dans la survenue des lésions d'athérosclérose. Ici, par l'utilisation d'un inhibiteur de la voie du PDGF, nous démontrons, chez l'animal, que, lorsque le LRP est absent, la voie du PDGF est fortement altérée, ce qui conduit à la prolifération cellulaire et à une susceptibilité à développer des lésions athéroscléreuses. »
Lorsque le cholestérol est élevé, il s'infiltre dans la paroi vasculaire et la fragilise. L'organisme tente alors une réparation en envoyant un facteur de croissance (PDGF) qui stimule la migration et la prolifération des cellules musculaires lisses. Mais celles-ci épaississent et durcissent les artères, captent davantage de cholestérol et contribuent ainsi à la formation des plaques d'athérome.
Récemment, il a été montré que la migration des cellules musculaires lisses, induite par le PDGF, peut être bloquée par la liaison de l'apolipoprotéine E (apoE) au récepteur LRP1. Boucher et coll. ont voulu savoir si le récepteur LRP1 limite l'activité du signal PDGF et aide ainsi à réguler la prolifération des cellules musculaires lisses.
Ils montrent que le récepteur LRP1 forme un complexe avec le récepteur pour le PDGF.
« Nous avons voulu découvrir si, en inactivant le LRP1, les cellules musculaires lisses se mettent à proliférer de façon anormale, commente le Pr Joachim Herz, qui a dirigé l'équipe de chercheurs. Effectivement, elles prolifèrent et la paroi vasculaire devient très sensible à l'hypercholestérolémie. »
Les chercheurs ont produit des souris dont le gène LRP1 est inactivé dans les cellules musculaires lisses vasculaires. Par cette absence, le récepteur pour le PDGF est surexprimé et le signal PDGF est anormalement activé, avec pour effets une prolifération des cellules musculaires lisses, une rupture de la couche élastique, la formation d'anévrismes et une nette susceptibilité à l'athérosclérose induite par le cholestérol.
Un inhibiteur du signal PDGF
L'apparition de ces anomalies est atténuée lorsque les souris mutantes sont traitées par un inhibiteur du signal PDGF. « Nous avons constaté que le Glivec peut réduire l'athérosclérose de moitié dans nos modèles de souris », précise le Pr Herz. Il est à noter que ce médicament utilisé avec succès dans certains cancers fut développé pour prévenir la resténose après angioplastie coronaire, par le biais de l'inhibition de l'activation anormale du récepteur pour le PDGF.
Si cette étude révèle un nouveau rôle pour le récepteur LRP1, les chercheurs n'envisagent pas d'implications cliniques. « En aucun cas, nous suggérons que cette molécule viendrait se substituer aux hypolipémiants en prévention de l'athérosclérose », souligne le Dr Boucher. « Il est préférable de garder le cholestérol bas et d'empêcher ces voies d'être activées », renchérit le Pr Herz.
« Science », 11 avril 2003, p. 329.
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