APRES LE « SOCLE », voici la « refondation » de la politique nutritionnelle française. Le socle, a rappelé Xavier Bertrand, c’est le premier Pnns, tel qu’il a été élaboré sous la conduite du Pr Serge Hercberg (directeur de l’U557 Inserm-Inra-Cnam Epidémiologie nutritionnelle et de l’unité de surveillance et d’épidémiologie nutritionnelle Usen-InVS-Cnam), avec le Pr Arnaud Basdevant (chef de service nutrition à l’Hôtel-Dieu, Paris) et Philippe Lamoureux (directeur de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé). Associant à l’objectif de santé publique les notions de goût, de plaisir et de convivialité, ce programme a permis d’accomplir un effort massif de communication, audio-visuelle et écrite (les guides ont été diffusés à plus de cinq millions d’exemplaires) ; il a renforcé l’ensemble des moyens budgétaires (+ 30 % par an au cours des dernières années) et instillé une culture de santé publique dans les habitudes de vie quotidienne des Français.
De nouvelles ambitions.
La France, rappelle le ministre, a pu ainsi devenir le premier pays européen à disposer d’une stratégie nutritionnelle d’ensemble.
Cette stratégie, Xavier Bertrand veut maintenant la «refonder», au cours d’un deuxième quinquennat, en travaillant autour de nouveaux axes de travail.
.D’abord la prévention
Les moyens de l’Inpes pour sensibiliser les Français à l’enjeu majeur de santé publique de la nutrition vont être accrus, à raison de 10 millions d’euros par an ; des chartes vont être signées avec les associations sportives et les collectivités locales pour insister sur l’intérêt de l’activité physique ; des campagnes de communication vont être multipliées autour de l’importance de la consommation des fruits et légumes, quelle que soit leur forme (frais, conserves, surgelés).
Les risques de dénutrition vont être combattus, avec, dès le mois prochain, un guide nutrition destiné aux plus de 55 ans, diffusé à un million d’exemplaires, ainsi qu’un guide qui s’adresse aux accompagnants, également tiré à un million d’exemplaires. En 2007, chaque établissement de santé devra avoir identifié son « référent nutrition », en attendant la mise en place, en 2010, des Clan (comités de liaison Alimentation Nutrition).
. Ensuite le dépistage
Le plan prévoit une meilleure organisation du repérage, de l’orientation et de la prise en charge des enfants, avec les PMI, la médecine scolaire et les médecins de ville. Dans les deux ans qui viennent, les villes sièges de CHU devront développer des réseaux de prise en charge multidisciplinaires qui associeront généralistes et pédiatres de ville, hospitaliers et collectivités et associations. Les hôpitaux auront à s’équiper avec du matériel adapté aux patients atteints d’obésité morbide, à raison d’un hôpital pôle de référence par région (soit 22 établissements) en 2007, en attendant que les 31 CHU français puissent être équipés en 2008.
S’agissant des médecins, le Pr Ambroise Martin (professeur de nutrition et de biochimie à Lyon-I) va remettre cet automne ses propositions pour la révision de la formation initiale, la nutrition devenant en FMC un thème obligatoire pour les offres de formation.
. Enfin, des actions ciblées
Parce que les populations défavorisées et précaires se révèlent de plus en plus vulnérables en matière de nutrition, les réseaux sociaux (services sociaux des caisses d’allocations familiales, centres d’examens des caisses primaires d’assurance-maladie, services sociaux des municipalités et des conseils généraux) vont être mobilisés, avec des outils de formation et d’information à l’attention de leurs équipes et des personnes aidées.
Le plan Alimentation et Insertion ayant mis en évidence une altération de l’état sanitaire des personnes qui recourent à l’aide alimentaire, un plan triennal (2006-2008) permettra aux bénévoles de bénéficier d’une offre renforcée de formation ; les bénéficiaires de l’aide recevront plus de fruits et légumes issus des stocks qui sont retirés du marché au titre de la régulation des prix.
Le Pnns voudrait impliquer aussi davantage les acteurs de terrain que sont les maires, les conseils généraux et régionaux, les associations ou les entreprises. Les budgets en la matière vont être doublés et portés l’an prochain à 8 millions d’euros, pour aider à la mise en place d’actions innovantes.
Le programme 2006-2010 comporte encore des actions sans précédent concernant l’image du corps véhiculée par la publicité : des bonnes pratiques devront être définies en liaison avec le BVP (bureau de vérification de la publicité), pour prohiber les excès de valorisation de l’idéal minceur et recourir à «des mannequins de corpulence ne promouvant pas la maigreur».
D’autres soucis concernent la stigmatisation financière dont sont victimes des personnes obèses désireuses de souscrire un prêt, immobilier, professionnel ou autre ; elles pourront se prévaloir de la nouvelle convention Aera (s’assurer et emprunter avec un risque de santé aggravé), signée le 6 juillet dernier.
La croisade nutrition santé est aussi un combat contre l’exclusion et la discrimination.
Un observatoire de la qualité alimentaire des produits
Destiné à effectuer le suivi de la qualité, notamment nutritionnelle, des produits, un observatoire de la qualité alimentaire des produits va voir le jour prochainement. Dès la fin de l’année, une étude de préfiguration, coordonnée par l’Inra, définira ses modes de financement et ses partenariats institutionnels au sein des administrations (consommation, santé, agriculture). Sur la base d’indicateurs spécifiques, l’observatoire publiera un rapport annuel de l’état nutritionnel de l’offre alimentaire.
L’Etat va appeler par ailleurs les dirigeants de l’industrie alimentaire à signer, sur un mode individuel ou collectif, des engagements concernant la composition de leurs produits, leur présentation et leur promotion. Un cahier des charges sera rédigé au printemps 2007 par un comité d’experts, qui servira de référentiels à ces engagements. La France devrait être ainsi le premier pays à mobiliser le monde agroalimentaire en faveur du progrès nutritionnel.
Les prochaines campagnes
Campagne 2007
– L’activité physique : « Au moins l’équivalent d’une demi-heure de marche rapide chaque jour » (campagne rediffusée au niveau national et promue auprès des villes pour une diffusion locale).
– Les fruits et légumes : « Au moins cinq fruits et légumes par jour ».
– Les aliments céréaliers complets : « Des féculents à chaque repas et selon l’appétit ».
Campagne 2008
– Promotion des repères « produits sucrés » et « féculents ». Elle invitera à limiter la consommation de matières grasses ajoutées (spécialement les lipides saturés).
Campagne 2009
– Sel : « Limiter la consommation ». La communication sensibilisera les personnes sur l’intérêt du sel iodé et déconseillera de resaler avant de goûter, d’ajouter du sel dans les eaux de cuisson.
– L’eau : « De l’eau à volonté ». La campagne valorisera l’eau comme la boisson de tous les moments, pour le plaisir et le bien-être, et elle invitera à limiter la consommation des boissons sucrées.
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