Douleurs neuropathiques‏

« Un puzzle aux pièces différentes à chaque patient »

Par
Publié le 10/03/2016
Article réservé aux abonnés
CARPIEN

CARPIEN
Crédit photo : PHANIE

La douleur neuropathique est une douleur qui se présente sous de nombreuses facettes : elle peut être spontanée ou provoquée, à type de brûlures, de décharges électriques, de fourmillements ou avec une sensation de compression…

« Le médecin se trouve face à un véritable puzzle et les pièces sont différentes en fonction de chaque patient », explique le Pr Alain Serrie, chef du service de médecine de la douleur à l’hôpital Lariboisière (Paris). On distingue les douleurs neuropathiques périphériques (douleur du canal carpien ou douleur survenant après la pose d’une prothèse du genou, névralgie post-zostérienne, névralgie du trijumeau, polyneuropathie douloureuse due au diabète, aux anticancéreux…) et des douleurs neuropathiques d’origine centrale (syndrome thalamique, hémiplégie…).

Un outil de dépistage le DN4

Heureusement, il existe désormais, un outil de diagnostic le questionnaire DN4, largement répandu, traduit en 23 langues (même en khmer !). Il s’agit d’un outil de dépistage et non d'évaluation de la douleur. Le patient doit répondre à quatre questions représentant 10 items à cocher (caractéristiques de la douleur, symptômes associés…) : quatre « oui » suffisent à établir un diagnostic en deux minutes. Depuis quelques années, ces douleurs sont ainsi mieux diagnostiquées. D’après les dernières études, dans les 252 centres douleur labellisés par les ARS, 25 % sont d'origine neuropathique, essentiellement des douleurs post opératoires et post-traumatiques. Ces symptômes ont des retentissements importants sur la qualité de vie : fatigue, anxiété, troubles du sommeil, dépression. « Les douleurs neuropathiques sont extrêmement invalidantes et vont même jusqu'à pousser, dans certains cas, les patients à mettre fin à leur jour », déclare le Pr Serrie.

Des avancées

En ce qui concerne la prise en charge des douleurs neuropathiques, elle repose essentiellement aujourd’hui, sur les nouveaux antidépresseurs tricycliques ou antiépileptiques, à faible dose, duloxetine (Cymbalta) ou prégabaline (Lyrica). Localement, on dispose de patchs à la xylocaïne, et surtout de patchs à la capsaïcine à haute concentration 8 % qui sont appliqués pendant 45 minutes à 1 heure. Le traitement nécessite une hospitalisation d’une journée et peut être répété tous les 90 jours. C'est une réelle avancée : les études ont mis en évidence une nette diminution de la douleur durant plusieurs mois (3 mois) et plus ou moins importantes selon les patients (parfois 40 %). « Les patchs à la capsaïcine sont particulièrement intéressants chez des patients âgés présentant des douleurs post-zostériennes et souvent polymédiqués. Ils permettent une diminution de la consommation d’antalgiques », souligne le Pr Alain Serrie.

Prévention des douleurs post-zostériennes

En ce qui concerne ce type bien particulier de douleurs neuropathiques, il existe maintenant une prévention possible grâce au vaccin. Il réduirait l’incidence du zona de 50 % et celles douleurs post-zostériennes de même. Dans certains cas, la douleur ne cède pas aux médicaments et une neurostimulation externe peut être nécessaire. « À l’avenir, il ne faudra plus raisonner en pathologies mais "trans-étiologies". Un nouveau paradigme est en train d’émerger. Nous avons réussi à identifier 5 "clusters de patients" différents dans les douleurs neuropathiques. Par exemple, celui qui a un fond douloureux à type de brûlures ou celui qui a des décharges électriques et nous testons un par un les médicaments pour savoir quel "cluster" est répondeur… Il faut tenir compte en premier de ce que le patient nous décrit et reprendre les fondamentaux de la médecine, c’est-à-dire l’interrogatoire et l’examen clinique », conclut le Pr Serrie.

Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin: 9478