PRATIQUE
Le scrotum
Un petit garçon de 16 mois était adressé pour avis diagnostique et prise en charge thérapeutique d'une éruption papuleuse et purpurique fébrile avec atteinte ecchymotique diffuse de la région scrotale d'installation brutale.
Les antécédents familiaux sont marqués par un eczéma chez la grand-mère du côté paternel, une conjonctivite allergique chez la maman et un psoriasis chez un oncle du côté maternel.
Durant la semaine précédant l'éruption purpurique, quelques éléments maculeux ou maculo-papuleux avaient été notés sur les membres inférieurs ou sur les avant-bras, rapidement résolutive en quelques heures. Trois jours auparavant, on notait à l'interrogatoire la notion d'une rhino-pharyngite traitée simplement par paracétamol. Quarante-huit heures plus tard, les lésions érythémato-papuleuses prurigineuses étaient apparues à la face postérieure des cuisses et sur les fesses (figure 1), s'étaient étendues et multipliées, prenant parfois un aspect de plaques à contour polycyclique, parfois un aspect en cocarde, polymorphe avec un centre ecchymotique. D'autres lésions papuleuses étaient donc survenues secondairement sur le tronc et les quatre membres sans respect des extrémités. Le tableau était également marqué par un dème douloureux des chevilles et surtout par un dème ecchymotique du scrotum qui s'était développé en moins de vingt quatre heures.
L'enfant était fébrile (38,9°), mais gardait un parfait état général. Il n'existait pas de trouble hémodynamique, pas de symptomatologie neurologique, pas de signes respiratoires ou digestifs ni d'adénopathie. Une échographie testiculaire réalisée aux urgences pédiatriques indiquait l'existence d'un dème scrotal avec hydrocèle bilatérale échogène. Les investigations biologiques indiquaient une hyperleucocytose (17 900 globules blancs/mm3) avec polynucléose (9 500 neutrophiles/mm3), l'absence d'anomalie de la numération plaquettaire ou d'anomalie rénale et un dosage de la CRP dans les valeurs normales.
QCM 1 : Quel(s) diagnostic(s) devez-vous d'emblée envisager devant ces signes dermatologiques dans un contexte fébrile ?
a) purpura fulminans débutant ;
b) purpura rhumatoïde ;
c) urticaire aiguë ;
d) oedème aigu hémorragique du nourrisson ;
e) érythème polymorphe.
QCM 2 : Une surveillance en hospitalisation est réalisée. Les lésions papulo-oedémateuses disparaissent en moins de douze heures. Plusieurs poussées se produisent sur 3-4 jours. Les nappes purpuriques s'estompent en une semaine.
Quel diagnostic vous paraît le plus probable ?
a) purpura fulminans débutant ;
b) purpura rhumatoïde ;
C) urticaire aiguë ;
D) oedème aigu hémorragique du nourrisson ;
E) vascularite urticarienne.
QCM 3 : L'enquête étiologique va devoir rechercher :
a) une éventuelle allergie alimentaire par un journal alimentaire et une enquête allergologique ;
b) une étiologie virale avec sérodiagnostics viraux, prélèvement des selles...
c) des arguments pour une toxidermie ;
d) une cause bactérienne ;
e) une maladie de système.
Réponse QCM 1 : a), b), c), d).
Tous ces syndromes peuvent se manifester par un purpura fébrile avec lésions urticariennes ou pseudo-urticariennes, à l'exception de l'érythème polymorphe caractérisé par des cocardes typiques dont le centre n'est pas purpurique mais oedémateux ou bulleux.
Dans le purpura fulminans, une éruption morbilliforme ou des nappes maculo-papuleuses peuvent précéder les pétéchies et/ou les grandes tâches violacées à évolution rapidement nécrotique. L'examen dermatologique doit également rechercher la traduction des troubles hémodynamiques : allongement du temps de recoloration cutané, extrémités froides et marbrures débutantes.
Dans le purpura rhumatoïde, les signes cutanés précèdent dans 50 % des cas les autres manifestations. Classiquement, il s'agit d'un purpura vasculaire palpable siégeant préférentiellement aux membres inférieurs et aux fesses. Des plaques ecchymotiques, bullo-hémorragiques ou nécrotiques, des lésions en cocardes ou polymorphes et même plus rarement des éruptions urticariennes ou un érythème noueux. Des oedèmes sont quant à eux fréquents (dos des mains, des pieds, paupières). Dans l'oedème aigu hémorragique du nourrisson, des dèmes et des placards purpuriques bien limités classiquement en rosettes ou cocardes apparaissent sur le visage, les oreilles, les mains ou les pieds et les organes génitaux, mais les vraies papules urticariennes, fugaces ne sont pas classiques. L'atteinte du tronc est possible.
Les urticaires aiguës de l'enfant, surtout avant 3 ans, sont très souvent ecchymotiques et/ou bulleuses. Elles miment parfois un érythème polymorphe.
Réponse QCM 2 : c)
L'absence de dégradation de l'état général de l'enfant, l'absence d'autre manifestation et le caractère fugace des lésions éliminent le diagnostic de purpura fulminans. Contre le purpura rhumatoïde, l'atteinte n'est pas de type purpura palpable des membres inférieurs, il n'y a pas de signe digestif, articulaire ou rénal et l'enfant est plus jeune que l'âge de survenue habituel (4 à 7 ans). Le caractère fugace des lésions non ecchymotiques va à l'encontre de l'oedème aigu hémorragique du nourrisson.
Réponse QCM 3 : a), c), d), e)
L'allergie alimentaire est à évoquer systématiquement, mais son importance varie selon les différentes études. L'association virus/médicament est probablement la cause la plus fréquente, mais une enquête virale systématique serait inutile, difficile à limiter et coûteuse. Un foyer infectieux bactérien est parfois retrouvé. Purpura vasculaire et urticaire peuvent se rencontrer au cours du lupus qui est cependant très rare avant 2 ans.
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