Un exemple pour les futures recherches
À son retour du Cambodge, Françoise Barré-Sinoussi a donné une conférence de presse à laquelle étaient associés Alice Dautry, directrice de l'Institut Pasteur, Jean-François Delfraissy, directeur de l'ANRS, André Syrota, directeur général de l'INSERM, et Patrick Netter, directeur du département des sciences du vivant au CNRS.
Pour Mme Alice Dautry, «le prix Nobel récompense des chercheurs exceptionnels, des grandes équipes et la direction de l'époque (notamment Raymond Dedonder) qui ont su répondre à l'urgence de santé publique que représente une maladie émergente». Pour les représentants de l'ANRS, de l'INSERM et du CNRS, ce prix récompense de façon plus globale à la recherche fondamentale et thérapeutique française. «Il faut souhaiter qu'il augmentera l'attractivité pour la recherche dans les sciences du vivant pour les jeunes chercheurs.» Le Pr Barré-Sinoussi a rappelé l'importance de la recherche française et souligné combien l'apparition de la maladie a mobilisé les chercheurs et l'ensemble du personnel pasteurien de l'époque. Elle a tenu à remercier les techniciens, les ingénieurs et le personnel des laboratoires qui ont tous participé à leur niveau à la découverte du virus. Elle a aussi tenu à associer ses collègues hospitaliers cliniciens : Willy Rozenbaum, Françoise Brun-Vézinet et Christine Rouzioux. «Je pense aussi à Jean-Claude Chermann, mon père spirituel, et je suis triste de ne pas l'avoir auprès de nous. Je souhaiterais que nos travaux sur le VIH servent à l'avenir d'exem-ple pour les futures recherches en maladies infectieuses puisque notre aventure illustre parfaitement l'esprit visionnaire de Pasteur qui souhaitait qu'il existe des interactions continues entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Aujourd'hui, il existe toujours au sein de l'Institut Pasteur et du réseau des instituts à travers le monde cette volonté de faire participer des chercheurs dans des disciplines complémentaires et avec un point de vue propre en fonction du pays où ils travaillent. Souhaitons que la mobilisation qui aujourd'hui existe autour du VIH puisse permettre aux pays du Sud de tirer vers le haut leur système de santé et que de jeunes chercheurs aient envie de s'impliquer dans le domaine du VIH où de nombreux progrès thérapeutiques et vaccinaux restent encore à faire. »
Augmenter les efforts dans les pays les plus touchés
L'UNESCO a rendu hommage aux deux lauréats du prix Nobel. L'émotion était forte dans cette institution qui, depuis quinze ans, accueille la fondation mondiale Recherche et Prévention sida présidée par Luc Montagnier. Le mot d'ordre général a été : ce prix est merveilleux mais surtout ne pas baisser les bras, continuer la lutte contre le sida.
Luc Montagnier indique qu'il aurait souhaité associer à ce prix Robert Gallo.
«Ce prix récompense la recherche et arrive au bon moment car on ambitionne pour 2010 l'accès universel à tous les traitements, précise Françoise Barré-Sinoussi. Car il faut augmenter nos efforts dans les pays les plus touchés, c'est notre responsabilité à tous.»«L'Afrique est le pays le plus touché actuellement, renchérit Luc Montagnier. Il faut d'abord prévenir l'infection et ces actions doivent intégrer de nombreux freins culturels, d'où l'aide de l'UNESCO. Les travaux de recherche doivent se poursuivre. Mais cela nécessite des efforts internationaux de financement sans négliger de renforcer les ressources humaines locales pour prendre en charge la maladie. La trithérapie coûte cher, l'objectif d'un vaccin thérapeutique pourrait en diminuer la durée et donc le coût. Malheureusement il est probable que le tsunami financier que nous vivons aura des répercussions négatives dans les pays en développement», déplore Luc Montagnier.
Ne pas couper les crédits à la recherche sera probablement le message délivré à Nicolas Sarkozi. «Il faut revoir notre copie, explique Françoise Barré-Sinoussi. Etredévelopper la recherche fondamentale en immunologie et génétique pour mieux comprendre les mécanismes qu'il faut induire pour les candidats vaccins.» Cela va coûter très cher. Et à la question «qu'allez-vous faire de votre prix?», Françoise Barré-Sinoussi répond : «Je n'y ai pas réfléchi», mais, pour Luc Montagnier, la réponse est nette : «Je vais payer mes dettes.»
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