POUR LES AUTEURS (équipe Ensaia du Pr Luc Mejean), le caractère hydrophobe des polluants explique leur accumulation dans le tissu adipeux et les aliments lipidiques. L'un des plus communs d'entre eux est le benzo(a)pyrène qui est produit notamment par certains modes de cuisson.
Chez le rongeur, les doses létales de benzo(a)pyrène varient entre 250 et 1 600 mg/kg selon la voie d'administration. Lorsque le benzo(a)pyrène est donné à la dose de 10 mg/kg à des souris âgées de trois semaines (qui pèsent 15 g), et soumises à un régime cafétéria, la prise de poids est plus importante chez les souris ayant absorbé le polluant (+ 6 g versus + 2 g pour les souris témoins).
Les animaux ayant une ingestion unique de benzo(a)pyrène grossissent donc trois fois plus en six jours que ceux non exposés à cet hydrocarbure. Les auteurs ont voulu comprendre le mécanisme d'action et les conséquences sur l'homme.
Pour cela, des cellules adipeuses isolées ont été mises en présence de différentes concentrations de benzo(a)pyrène. Une heure après, l'addition de 10 μmol d'adrénaline permet d'observer la libération des acides gras induite par l'adrénaline.
Le benzo(a)pyrène réduit de plus de 60 % la capacité des adipocytes murins et humains à libérer les lipides sous forme d'acides gras libres après stimulation.
La même étude a été répétée in vivo avec des doses variables de benzo(a)pyrène et confirme les observations ex vivo avec un effet maximal observé pour une dose minimale de 0,5 mg/kg de benzo(a)pyrène.
Le phénomène est extrêmement rapide puisqu'il survient environ cinq minutes après mise en contact de la cellule isolée avec le benzo(a)pyrène. Cette rapidité est en faveur de l'hypothèse d'une altération de la cascade moléculaire impliquée dans la lipolyse.
In vivo, l'intensité de l'inhibition est maximale chez l'animal vingt-quatre heures après injection et une restauration partielle de la capacité lipolytique est observée après quarante-huit heures seulement. La capacité lipolytique totale est restaurée soixante-deux heures après l'injection.
Chez l'animal, une injection intrapéritonéale de benzo(a)pyrène à la dose de 0,5 mg/kg répétée toutes les quarante-huit heures pendant quatorze jours induit une augmentation significative de la prise de poids (+ 43 %, p < 0,01) chez des souris soumises à un régime normal. Les animaux prennent du poids sans modifier leur consommation alimentaire. L'augmentation du poids induite par le benzo(a)pyrène est accompagnée d'une élévation de la glycémie sans élévation significative de l'insulinémie.
La prise chronique de benzo(a)pyrène induit une diminution importante de l'expression des gènes codant pour les récepteurs bêta et bêta 3 de la protéine kinase A, de la lipase hormonosensible, des périlipines, du Ppar gamma, de la lipoprotéine lipase et de l'acyle transférase.
Pour les auteurs, l'adipocyte soumis à l'intoxication par le benzo(a)pyrène perd une grande partie de sa capacité à mobiliser les lipides qui y sont stockés. L'adipocyte humain apparaît dix fois plus sensible que l'adipocyte murin aux effets toxiques du benzo(a)pyrène.
Les auteurs concluent : « Au vu de la présence grandissante de ce type de polluant dans l'alimentation, il contribue pour partie au déficit de la lipolyse observée chez certains obèses et au développement de l'épidémie de l'obésité. »
Communication de Philippe Irigaray, Virginie Ogier, Sandrine Jacquenet, Véronique Notet, France Yen, Bernard Bihain et Luc Mejean.
Congrès de la Société française de nutrition, Clermont-Ferrand.
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