DE NOTRE CORRESPONDANTE
LE GOUVERNEMENT s'est engagé l'an dernier dans la lutte contre les mutilations sexuelles féminines. Dans le monde, ces pratiques avilissantes concerneraient quelque 130 millions de femmes et seraient présentes en Afrique, en Asie, et au Moyen-Orient. Trois millions de petites filles sont mutilées ou menacées de l'être chaque année. Avec les flux migratoires, on retrouve des populations qui recourent à ces pratiques dans plusieurs pays européens.
En France, si le ministère de la Santé évoque 43 000 femmes excisées, le Gams (Groupe femmes pour l'abolition des mutilations sexuelles) estime à 60 000 le nombre de celles qui sont excisées ou en danger de l'être. Le dispositif de lutte prévu englobe éducation sanitaire et répression, dans le cadre du plan Violence et Santé que Xavier Bertrand devrait annoncer très prochainement. «Un collectif national s'est créé avec les associations qui luttent depuis vingt-cinq ans, explique le Pr Henri-Jean Philippe, président de Gynécologie sans frontières. Nous travaillons sur la sensibilisation des professionnels de santé et sur la coordination d'un ouvrage à plusieurs entrées sur les violences faites aux femmes dont l'une sur les mutilations sexuelles. On lance aussi une enquête épidémiologique avec l'Ined sur l'excision et le handicap.»
A l'horizon 2012.
En fait de sensibilisation, des séminaires dans les régions les plus concernées par ce problème ont été organisés*, à la demande de la Direction générale de la santé, en collaboration étroite avec Gynécologie sans frontières et le Gams (« le Quotidien » du 29 novembre 2006). La région Paca, considérée comme l'une des plus touchées, avec l'Ile-de-France, a donc réuni 450 personnes à Marseille pour le colloque « Femmes et mutilations sexuelles ». «Notre région est particulièrement concernée à cause d'un flux migratoire important, assure Jean Chappellet, directeur régional de l'Action sanitaire et sociale. Même si nous ne possédons pas de données épidémiologiques. Mais il s'agit de faire en sorte d'éradiquer ce type de pratiques à l'horizon 2012.»
La conférence régionale de santé doit donner son accord dans les prochaines semaines pour inscrire la lutte contre les mutilations sexuelles féminines comme axe prioritaire dans le plan régional de santé publique. «Cela permettra de financer, dès cette année, des actions d'éducation sanitaire et de formation des professionnels dans le cadre du Grsp (groupement régional de santé publique). Par exemple auprès des PMI, de l'Education nationale, des écoles paramédicales et des professionnels de santé à l'hôpital. Ce colloque doit permettre de définir les actions prioritaires, indique le Dr Hélène Lansade, chargée de mission à la Drass Paca . Car c'est un travail de fourmi qui démarre.»
Des actions pour informer et sensibiliser les jeunes femmes à l'aide que l'on peut leur apporter, mais aussi présenter les conséquences juridiques de l'excision, et la réparation chirurgicale souvent possible. «Deux équipes des CHU de Nice et de Marseille vont être formées pour cela, ajoute le Dr Lansade. Afin que, si demande il y a, les équipes soient en capacité de le faire.»
* Le dernier séminaire aura lieu à Lyon le mardi 27 février. Informations : www.gynsf.org.
Une permanence à Marseille
Le Groupe pour l'abolition des mutilations sexuelles (Gams), qui oeuvre depuis plus de vingt ans dans ce domaine, a ouvert l'été dernier une permanence à Marseille*. La directrice, Naky Sy Savané, multiplie les réunions d'information pour convaincre étudiantes, professeurs, associations de femmes, de s'associer à la lutte contre cette «forme de pouvoir intolérable de l'homme, atteinte au corps de la femme et destinée à contrôler sa sexualité». Cette militante convaincue utilise aussi son art, le théâtre, pour faire passer ses messages. «Les jeunes femmes ont peur de partir en Afrique à cause de ces pratiques. Aujourd'hui, avec les lois et la sensibilisation, ça commence à changer, mais il reste encore beaucoup à faire.»
* Tél. 06.73.43.96.33.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature