APRÈS S'ÊTRE intéressée à la gestion de la recherche universitaire, la Cour des comptes a cherché à apprécier la façon dont ont été utilisés, en faveur d'une grande priorité de la recherche, les sciences du vivant, les différents leviers de l'action publique. Le rapport qu'elle rend public cette semaine estime que l'on peut beaucoup mieux faire.
C'est en juin 1999 que le comité interministériel de la recherche scientifique et technique a placé les sciences du vivant en tête des priorités de la recherche publique française. Certes, les crédits ont augmenté, mais surtout entre 1999 et 2002, et depuis 2005, ils ne progressent pas davantage que les autres. Ce n'était pas le cas en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis et en Allemagne et la France n'a pas comblé son retard en terme de niveau des ressources publiques affectées à ce secteur.
L'un des problèmes est le pilotage de l'Etat, avec six ministres qui, depuis 2000, se sont succédé à la tête d'un ministère dont le périmètre d'activités a varié et devrait encore évoluer sous l'effet de la mise en oeuvre de la loi de programmation de la recherche d'avril 2006. Le rapport constate aussi «une certaine distance» entre le ministère et les opérateurs de la recherche. Il recommande un pilotage transversal, et non plus seulement par organisme, ainsi que la généralisation des contrats d'action pluriannuelle, assortis d'exigence de résultats mesurables. Ces contrats devraient notamment servir à éclaircir les périmètres de l'Inserm et du Cnrs.
La Cour des comptes regrette de même que la coordination d'ensemble ne soit pas à la hauteur des ambitions, avec des structures multiples (instituts fédératifs, réseaux de recherche et d'innovation technologique, pôles de compétitivité, pôles de recherche et d'enseignement supérieur...). Il faut selon elle «rechercher, au minimum, un éclaircissement des rôles des divers intervenants, et une meilleure coordination de ceux-ci».
Financements fluctuants.
Autre critique, qui va dans le même sens : «des financements divers et fluctuants sans horizon pluriannuel». La multiplication des sources de financement, et la relative faiblesse de leur montant, est «pénalisante tant pour les chercheurs que pour la gestion des laboratoires». Aussi la cour recommande-t-elle d'accroître le montant, la durée et la liberté d'utilisation des financements sur projets. Il faut aussi, dit-elle, achever le partage des rôles entre l'Agence nationale de la recherche, les agences de moyens spécialisées et les organismes de recherche.
La cour n'a pas plus d'indulgence quant à la politique de l'emploi. L'offre de formation, qui s'articule autour des écoles doctorales, n'est pas construite en fonction des besoins des secteurs public et privé et «il n'est pas à exclure que les docteurs en sciences de la vie soient formés en trop grand nombre». Heureusement, grâce aux programmes mis en place par les organismes, en particulier l'Inserm, pour les chercheurs de 30-40 ans, la France peut participer à la compétition que se livrent les pays développés pour attirer les meilleurs. Mais on peut encore rendre plus attractive l'offre française au niveau du postdoctorat en allongeant la durée des contrats et en améliorant le niveau de rémunération, estime la cour.
Enfin, dernier domaine où la France pèche, la valorisation de la recherche. Les brevets, dont le nombre augmente, ne sont pas exploités comme ils le devraient ; le nombre de contrats passés avec des industriels n'augmente plus ; le soutien aux jeunes pousses rencontre des obstacles.
La politique dans ce domaine devrait reposer, selon la Cour des comptes, sur deux piliers : la détection des projets porteurs et la diffusion de la culture de valorisation effectuées au plus près des laboratoires ; la promotion des projets retenus par les grands établissements, qui seuls disposent de la taille critique face à un marché international très compétitif. Ces grands organismes (Inserm, Cnrs...) sont même invités à réfléchir sur l'intérêt de mutualiser certaines de leurs fonctions de valorisation.
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