ON EN SAIT aujourd'hui un peu plus sur la transmission entre personnes du virus de la grippe aviaire H5N1 survenue en Chine en fin d'année. Grâce à un intense travail de recherche collaboratif entre des équipes de chercheurs chinois et celles du CDC d'Atlanta, l'histoire de la transmission familiale du virus du jeune chinois de 24 ans décédé en décembre des suites d'une grippe aviaire a été retracée. L'analyse épidémiologique a aussi pris en compte 91 sujets contacts, dont 78 ont été traités de façon préventive. Elle a été doublée d'une caractérisation virologique qui confirme que, à l'exception d'une seule base modifiée, le génome du virus était identique chez les deux malades.
Lorsque le jeune M. Lu a été admis à l'hôpital de Jiangsu le 24 novembre 2007 en raison d'une forte fièvre associée à des myalgies, une toux et des céphalées, un traitement antibiotique à large spectre a été prescrit. Bien que le tableau ait été évocateur d'infection par le virus H5N1, aucun traitement antiviral n'avait été prescrit puisque aucune notification de cas animaux n'avait eu lieu dans cette région au cours des semaines précédentes. Néanmoins, une analyse virologique a été prescrite lorsqu'une diarrhée profuse associée à une pneumopathie, à une lymphopénie et à une thrombocytopénie ont complété le tableau clinique et paraclinique. Le patient est décédé en soins intensifs après avoir été intubé. Le 3 décembre 2007, le père, âgé de 52 ans, a lui aussi été admis à l'hôpital en raison d'une fièvre associée à des frissons et à une toux. Un traitement par oseltamivir a été mis en place et des antibiotiques (lévofloxacine) ont rapidement été associés en raison de l'existence d'une pneumopathie bilatérale et de thrombocytopénie modérée. En dépit d'une prescription de rimantadine, son état s'est rapidement détérioré et le patient a du être intubé et ventilé sous pression positive. Le 7 décembre, il a reçu en complément deux transfusions de 200 ml de plasma obtenu à partir d'une donneuse incluse dans une étude clinique de vaccination par le virus H5N1 clade 1. Grâce à ces différents traitements, l'homme de 52 ans a pu quitter l'hôpital 22 jours après son admission.
Une enquête dans différents domaines.
L'équipe des chercheurs chinois a mené une enquête dans différents domaines. Le jeune homme n'avait été en contact qu'une seule fois avec des volailles vivantes et potentiellement infectées 6 jours avant l'apparition des premiers symptômes. En dépit de prélèvement vétérinaires dans les marchés de la région, il a été impossible de confirmer l'hypothèse de l'existence d'un réservoir viral chez les volailles. Pour l'équipe du Dr Wang, le père pourrait avoir été infecté dans les premiers jours de la maladie de son fils avant l'admission à l'hôpital par un contact proche avec les sécrétions pulmonaires ou à l'occasion de manipulations de linge souillé. Dès la confirmation virologique du premier cas, les 91 personnes en contact avec le père et le fils – dont la mère, l'amie du fils et des professionnels de santé – ont accepté d'être suivi épidémiologiquement. Seuls 78 ont reçu un traitement prophylactique par oseltamivir. Deux d'entre eux ont présenté une fièvre modérée et la sérologique a écarté le diagnostic d'infection pour les 91 personnes suivies (anticorps anti-H5N1 négatifs). Enfin, l'analyse virologique a confirmé la très forte similitude entre les deux virus puisqu'ils ne différaient que par la composition d'une seule paire de bases. Les auteurs concluent que l'existence d'une transmission de personne à personne ne signifie pas que le virus a développé des capacités de transmission majorée et que la mise en place d'une surveillance stricte permet de limiter le risque de passage du virus aux membres de l'entourage.
« The Lancet », édition avancée en ligne.
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