LE PLAN de lutte contre les infections nosocomiales (IN) 2005-2008 veut donner une nouvelle impulsion à la prévention du risque infectieux dans les établissements de santé. «Plus de surveillance, plus de performance et plus de transparence», tels sont les objectifs annoncés. L’enquête nationale de prévalence entre dans ce cadre. Coordonnée par l’InVS (Institut national de veille sanitaire) et mise en oeuvre par les Cclin (centres de coordination de la lutte contre les infections nosocomiales) et le réseau d’alerte (Raisin) entre le 29 mai et le 30 juin 2006, elle a concerné 2 337 établissements de santé, publics ou privés, soit 95 % des lits d’hospitalisation. Tous les patients hospitalisés depuis au moins 24 heures dans les services lors du passage de l’enquêteur ont été inclus, soit plus 358 000 patients.
C’est l’enquête «la plus importante réalisée en France ou à l’étranger», souligne l’InVS en publiant les résultats préliminaires. Ils sont en faveur d’une baisse modérée des infections nosocomiales. Le jour de l’enquête, 17 820 patients étaient infectés, soit une prévalence de 4,97 %, en baisse de 4 % par rapport à la précédente enquête, en 2001. Cette prévalence se situe dans les limites basses mesurées par les enquêtes multicentriques réalisées dans différents pays européens comme l’Italie (4,9 % en 2000), la Suisse (7,2 % en 2004), l’Angleterre (7,6 % en 2006) ou la Finlande (8,5 % en 2005). Plus de la moitié des patients (55,7 %) ont plus de 65 ans, avec un âge médian de 69 ans. «La prévalence dépendant à la fois de l’incidence et de la durée de l’infection, on ne peut toutefois faire directement le parallèle entre cette évolution de la prévalence et celle de l’incidence, note l’InVS . L’interprétation de cette baisse doit être prudente quant à la dynamique réelle.» D’autant plus que, avec un patient concerné sur vingt, «les IN restent fréquentes».
L’une des originalités de l’enquête est de mesurer la prévalence des patients traités par un anti-infectieux. Le jour de l’enquête, 15,88 % d’entre eux l’étaient (un patient sur six). Les pénicillines, les céphalosporines de troisième génération et les fluoroquinolones sont les familles les plus prescrites (deux tiers des prescriptions). Les infections urinaire (30 %), les infections respiratoires hautes (15 %) et les infections du site opératoire (14 %) sont en tête des sites concernés. Les germes le plus souvent en cause sont Escherichia coli (25 %), Staphylococcus aureus (19 %) et Pseudomonas aeruginosa (10 %). Ces germes représentent à eux trois plus de la moitié des micro-organismes isolés.
La baisse observée de la résistance à la méticilline des S.aureus (Sarm) est l’un des résultats les plus positifs de l’enquête. La proportion passe de 64 % en 2001 à 52 % en 2006, une diminution de 38 % qui est probablement en rapport avec le renforcement de la lutte contre les bactéries multirésistantes.
Un tiers des hôpitaux bien classés.
Lors de cette enquête 2006, la mobilisation des cliniciens et des professionnels de l’hygiène a été forte. Malgré tout, «le maintien d’un haut niveau de prévention reste essentiel», rappelle l’InVS, car les IN surviennent dans une population à risque, majoritairement les sujets âgés et les personnes exposées à des actes invasifs. «Les infections nosocomiales ne sont pas une fatalité», a souligné le ministre de la Santé en rappelant les données de la Drees*, qui estime que, dans deux cas sur cinq, les événements indésirables graves liés à une IN auraient pu être évités. La mise en place d’un tableau de bord fait partie de la démarche de transparence et de qualité engagée depuis plusieurs années. Le classement des hôpitaux en fonction du score Icalin (indicateur composite des activités de lutte contre les infections nosocomiales), qui vient d’être publié pour la deuxième année consécutive, est, lui aussi, encourageant (« le Quotidien » du 18 janvier).
L’an dernier, «11% des hôpitaux avaient le meilleur classement possible, ils sont aujourd’hui plus d’un tiers, donc le progrès a été spectaculaire. Plus de la moitié des hôpitaux ont changé de classe, ont amélioré leurs résultats en matière de lutte contre les infections nosocomiales. Même si nous sommes parmi les meilleurs pays d’Europe, je ne peux me contenter de ce résultat», a commenté Xavier Bertrand.
Dans ce classement, qui porte sur 2 809 établissements, 32 % sont classés en catégorie A, 31 % en B, près d’un quart en C, les autres sont en D (6,6 %) ou E (2,8 %). Là encore les établissements ont joué le jeu, même si 74 d’entre eux n’ont pas répondu. «C’est trop. Soixante-quatorze, ce n’est pas admissible», a indiqué le ministre qui a diligenté une enquête médico-administrative dont les résultats devraient être connus à la fin du mois de février. «S’il y avait des problèmes liés à la sécurité des patients, je prendrai, mes responsabilités en prenant des mesures plus coercitives», a-t-il indiqué. «La transparence n’est pas facultative», a-t-il ajouté.
Deux autres indicateurs ont été ajoutés cette année : l’Icsha (indicateur de consommation des produits hydroalcooliques, pour l’hygiène des mains) et le Surviso (surveillance des infections des sites opératoires). Là aussi, des progrès restent à faire. Les résultats de l’Icsha ne sont pas bons : seulement 5,3 % des hôpitaux sont classés dans les deux meilleures catégories, 63 % se situent dans les classes C et D. «Nul ne devrait être exonéré» du lavage des mains (visiteurs, patients, soignants). Le ministre souhaite que des solutés hydroalcooliques soient disponibles à l’entrée de tous les services et, à terme, dans toutes les chambres.
Le dernier indicateur (Surviso) n’est que déclaratif : 668 sur 1 124 établissements semblent avoir une activité de surveillance spécifique de ce type d’infections.
* Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, ministères de l’Emploi et de la Santé).
Une plate-forme d’information
Les résultats par département sont désormais accessibles sur la plate-forme d’information : www.platines.sante.gouv.fr. Cette nouvelle plate-forme présente l’activité de 1 300 établissements publics et privés en France métropolitaine. En 2008, elle devrait être étendue à l’ensemble des établissements. Pour chacun, des fiches d’identité décrivent les activités pratiquées : présence ou non de service d’urgence, capacités d’accueil, équipements en imagerie médicale... Figurent également leurs caractéristiques (niveau d’activité, spécificité, par exemple consultation de la douleur ou soins palliatifs), les résultats de leur certification par la Haute Autorité de santé, les scores aux différents indicateurs de performance et de qualité (dont Icalin). Au total, 55 indicateurs sont déjà répertoriés, dont le nombre de patients traités pour certaines pathologies, le nombre de médecins présents pour 10 000 passages aux urgences. D’autres sont en cours d’étude tels que les délais d’attente pour le scanner et l’IRM.
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