LA DIARRHÉE du voyageur est due majoritairement à un Escherichia coli entérotoxinogène (ETEC) dans les régions endémiques. Le germe sévit également chez les jeunes enfants vivant dans les pays du tiers-monde. Environ 27 millions de voyageurs et 210 millions d'enfants souffrent de diarrhée aiguë. On compte 380 000 décès annuels chez les enfants.
La diarrhée des voyageurs dure généralement quatre ou cinq jours, avec des selles molles (dix-huit par épisode), habituellement associé à des vomissements, à des crampes abdominales, à une prostration et à une déshydratation.
Les micro-organismes ETEC sont transmis par la nourriture ou les boissons contaminées. Ils colonisent l'intestin grêle et sécrètent une entérotoxine thermosensible (HLT) ou une entérotoxine thermostable (HST). La HLT est trouvée dans environ deux tiers des cas des diarrhées à ETEC.
On travaille à la mise au point de vaccins ciblant HLT. Les études sur ces vaccins montrent une protection à court terme contre la diarrhée. Toutefois, du fait même que HLT est un bon choix d'antigène, le vaccin est trop toxique pour être administré par voie orale, nasale, ou par injections.
Les recherches se sont poursuivies pour trouver un bon moyen d'administration. Sarah Frech et coll. (IOMAI Corporation, Gaithersburg, États-Unis) ont mené une investigation sur un moyen de délivrance par patch transdermique d'un vaccin contenant l'entérotoxine HLT chez des voyageurs.
Deux patchs successifs.
L'étude randomisée de phase II s'est adressée à des adultes de 18 à 64 ans qui projetaient de voyager au Mexique ou au Guatemala, et qui avaient accès à un centre américain régional de vaccination.
Ils ont été randomisés pour recevoir soit un placebo, soit de la HLT à raison de 37 µg délivrée par deux patchs successifs, qui ont commencé à être mis en place deux ou trois semaines avant le voyage. Parmi les 201 patients recrutés, 178 ont reçu des patchs et ont effectué leur voyage.
Les patients devaient tenir un journal mentionnant les émissions de selles.
Lorsqu'une diarrhée survenait, une analyse de selles était réalisée pour l'identification des pathogènes. Un score de sévérité de la diarrhée a été établi en se fondant sur le nombre de selles molles émises. La diarrhée a été considérée comme légère pour trois émissions, modérée pour quatre ou cinq selles molles et sévère pour au moins six d'entre elles. La randomisation entre placebo et patchs HLT s'est faite dans une proportion de deux pour un, pour améliorer la capacité à estimer la maladie diarrhéique chez les patients non traités.
Les résultats montrent que 24 (22 %) des 111 participants recevant le placebo ont eu une diarrhée ; dans 11 cas (10 %), l'épisode était dû à l'ETEC.
Dans le groupe recevant les patchs HLT, on compte 9 (15 %) des 59 patients ayant eu une diarrhée, dont 3 (5 %) dues à un ETEC. Le taux de diarrhées classées de modérées à sévères, de toutes causes, est également plus élevé chez les patients du groupe placebo (11 %) que dans le groupe HLT (2 %).
On en déduit que les patchs confèrent une efficacité préventive de 84 %.
À ces avantages s'ajoute le fait que «les patients sous patchs au vaccin contre HLP et qui sont tombés malades ont eu des épisodes de diarrhée plus atténués, avec un nombre de selles moindre et une durée réduite comparativement au placebo».
Chaîne du froid non nécessaire.
L'étude démontre que le rationnel de délivrance d'un antigène par la voie transcutanée est réaliste. La voie d'administration est simple et permet de se passer d'aiguille. Autre avantage, il n'est pas nécessaire de respecter la chaîne du froid pour utiliser ce vaccin. Enfin, la formulation est utilisable aussi bien par les voyageurs que pour une délivrance aux enfants des pays du tiers-monde.
Une étude de phase III doit maintenant être réalisée pour confirmer l'efficacité du patch vaccinal contre E.coli entérotoxinogène.
« The Lancet », publié en ligne le 12 juin 2008.
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