Cinéma
Le jury mené par Patrice Chéreau n'a pas aimé « Dogville », de Lars von Trier, le film pourtant le plus intéressant, par la forme et le fond, d'une sélection discutée et discutable. Alors le jury, assure son président, s'est retrouvé facilement sur une palme d'or américaine.
Mais pas n'importe quel film américain. « Elephant » est justement récompensé pour le regard qu'il porte sur la violence sans tenter une explication réductrice. « C'est le manque d'explication qui donne sa beauté et son énergie au cinéma », dit le réalisateur Gus van Sant. Avec des adolescents recrutés pour la circonstance, et qui ont apporté chacun de leur personnalité au film, il filme une journée ordinaire dans un lycée ordinaire ; sauf que deux garçons vont tirer sur leurs camarades et faire un carnage semblable à celui survenu au lycée de Columbine. Par dérogation au règlement du festival, « Elephant » a obtenu aussi le prix de la mise en scène : il le méritait sans aucun doute, avec sa construction en mosaïque, agrégeant plusieurs temps à la fois.
A côté de l'audace créatrice, le jury n'a pas négligé le film le plus applaudi et qui a le plus touché les festivaliers. « Les Invasions barbares», du Québécois Denys Arcand a reçu deux prix, pour le scénario (signé Arcand lui-même) et pour l'interprétation féminine (la jeune Marie-Josée Croze, vue dans « Ararat », notamment).
Et puis cap à l'Est, avec deux récompenses également pour « Lointain », de Nuri Bilge Ceylan, réflexion existentielle, aride il est vrai, et portrait en creux de la Turquie moderne : le Grand Prix du jury et le prix d'interprétation masculine pour les deux comédiens amateurs, Muzaffer Ozdemir et Mehmet Emin Toprak (mort à 28 ans dans un accident de la route juste après avoir appris la sélection à Cannes). Et plus à l'est encore pour le Prix du jury attribué à la jeune Iranienne Samira Makhmalbaf pour « A cinq heures de l'après-midi », qui évoque avec chaleur les espoirs des jeunes femmes dans l'Afghanistan de l'après-guerre.
Quatre films seulement, sur 20 en compétition, figurent au palmarès. Rien pour l'Europe, rien pour la France, pourtant venue en force. Hors « Tiresia », de Bertrand Bonello, aucun des sélectionnés, malgré leurs qualités (en particulier leur interprétation), ne sortait des lignes classiques. Beaucoup critiquent le festival en l'accusant de promouvoir une politique d'auteurs, voire de recherche, par opposition à un cinéma dit populaire. Mais à quoi serviraient les festivals sinon à découvrir et à promouvoir des uvres et des cinéastes vers lesquels le public ne va pas spontanément ?
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