PLFSS

Un Ondam minceur

Publié le 15/10/2012
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Budget de rigueur en temps de crise, l’Ondam hospitalier progressera de 2,6% en 2013. Entre investissements en hausse et mesures d’économies, l’hôpital devrait naviguer à vue. Après les belles promesses pour l’hôpital du printemps dernier, l’hiver sera-t-il plus difficile pour les acteurs de l’hôpital en dépit du lancement du pacte de confiance? Analyse.

Et si le trou de l’assurance maladie n’était pas une fatalité ? Entre 2011 et 2012 le déficit de la branche maladie devrait se contracter de 3,1 milliards d’euros pour s’établir à - 5,5 milliards d’euros. Certes, il s’élève encore à des niveaux élevés. Mais la tendance observée depuis les derniers mois révèle une désaccélération des dépenses. En témoigne pour 2012 le niveau de remboursements qui devraient être inférieur à l’objectif de l’Ondam comme en 2011. Les soins de ville donnent l’exemple avec un écart négatif de -600 millions d’euros en 2011 par rapport à l’objectif fixé en 2011 et - 350 millions d’euros en 2012. Résultat, et c’est l’une des seules initiatives nouvelles annoncées lors de cette présentation, 200 postes de praticiens locaux dans les zones démographiques fragiles seront créés dès 2013. Sur des territoires où exercent encore des généralistes en fin de carrière, des jeunes médecins bénéficieront d’une garantie de revenus assurés par l’assurance maladie. Avant de succéder à ces praticiens lors de leur départ à la retraite.

Le soignant a le vertige

L’hôpital pour sa part n’affiche pas les mêmes résultats. Si les établissements de santé ont consommé des crédits pour un montant inférieur à 200 millions d’euros à l’objectif de l’Ondam en 2011, les experts relèvent pour 2012 un risque de dépassement estimé à 400 millions d’euros. Selon la commission des comptes de la Sécurité sociale, « le risque est susceptible d’être compensé à 415 millions d’euros par l’annulation de crédits mis en réserve en début d’année ». Mais dans ce cas les pouvoirs publics ne disposeraient plus de marge de manœuvre en cas d’augmentation supplémentaire de l’activité. Dans cette perspective, le fil tendu entre pacte de confiance et Ondam hospitalier peut-il se rompre au premier coup de vent ? Entre les perspectives d’un avenir radieux pour l’hôpital public et le poids de la rigueur, le soignant a parfois le vertige. Les promesses de campagne du candidat François Hollande sont certes reprises dans le PFLSS (projet de loi de financement de la Sécurité sociale) avec la réintroduction du service public hospitalier ou la fin de la convergence tarifaire. Pour autant, la ministre de la Santé n’hésite pas à reprendre un air déjà entendu lors du précédent quinquennat : « Ce n’est pas parce qu’on dépense plus qu’on soigne mieux. » Cet équilibre instable se niche au sein même du PLFSS. À Bercy, le premier octobre dernier, Marisol Touraine annonce une progression de l’Ondam hospitalier en 2013 de 2,6%, soit 1,9 milliard d’euros de plus pour les hôpitaux sur un an. La politique d’investissement hospitalier est réaffirmée avec en sus des 204 millions d’euros fléchés, une enveloppe supplémentaire de 150 millions d’euros. Dans le même temps, l’hôpital se mettra à la diète. Des économies à hauteur de 657 millions d’euros devront être réalisées par les gestionnaires. Les recettes prévues n’ont pour le moins rien d’original : optimisation des achats, baisse des prix des listes en sus, développement de la chirurgie ambulatoire.

Cet affichage politique fort en faveur de l’hôpital public ne masque plus la persistance des vives tensions au sein des équipes médicales. En témoigne la démission récente d’un chef de service des urgences d’un hôpital parisien ou le nouveau cri de médecins hospitaliers en colère publié le 28 septembre dernier par Le Parisien.

Certes, cette fronde pour le moment est sous contrôle. Et dépendra pour une large part des conclusions des trois commissions mises en place par Édouard Couty (Coprésident du comité d’experts de Décision Santé) programmées pour la fin de l’année ou au début de 2013.

En attendant le Leem (Les Entreprises du médicament) ne partage pas depuis longtemps les mêmes espérances. L’enjeu se limite à éviter année après année une note de plus en plus salée. Dans le plan d’économies présenté par Jérôme Cahuzac pour 2013, sur 2,4 milliards, le médicament sera mis à contribution à hauteur d’environ 1 milliard d’euros. Sont visés par des baisses de tarifs à la fois les médicaments princeps, les génériques mais aussi les dispositifs médicaux.

La visite médicale aussi impactée

La visite médicale à l’hôpital n’a pas été oubliée. Elle fait même l’objet d’un traitement particulier au sein de ce PLFSS 2013. Le dispositif mis en place par la loi relative au renforcement de la sécurité sanitaire du 29 décembre 2011 sera pérennisé. Au lieu d’être circonscrit à un nombre réduit de produits de santé, il sera élargi à l’ensemble des médicaments. Sa mise en place sera simplifiée. Le règlement intérieur des établissements de santé précisera les modalités d’accueil de la visite collective. En réponse à ces annonces, quelques minutes après la fin de la conférence de presse de présentation, le Leem été le premier à manifester son mécontentement (voir ci-contre l’encadré « Ils ont dit »).

Depuis, la liste de ceux qui protestent contre les nouveaux prélèvements s’est rapidement allongée. Comment expliquer cette levée de boucliers ? À l’option de réduire le niveau des prestations sociales, le gouvernement a préféré multiplier de nouvelles recettes. Avec le risque d’attiser la colère. Les hauts revenus ne sont plus seulement visés. En revanche, les malades ne verront pas augmenter le reste à charge. Le principe de solidarité entre bien-portants et patients est ici réaffirmé.

Il y a là un vrai choix politique. Au gouvernement d’assurer le service avant-vote.

Gilles Noussenbaum

Source : Décision Santé: 287