L'INOCULATION du virus de la vaccine Ankara modifié (MVA) semble constituer une solution d'avenir, sûre et efficace, pour la vaccination antivariolique. Deux études menées sur des modèles animaux, le singe et la souris, viennent en effet de démontrer que le MVA induit une réponse immunitaire similaire à celle obtenue avec les vaccins antivarioliques classiques, sans pour autant engendrer autant d'effets secondaires délétères. Ce vaccin serait particulièrement intéressant pour les personnes immunodéprimées, les enfants et les femmes enceintes, pour lesquels le rapport bénéfice/risque relatif à l'emploi d'un vaccin antivariolique classique est inférieur à un.
Il est en outre apparu qu'en prévaccinant par le MVA, avant de vacciner à l'aide du vaccin antivariolique classique, l'intensité des effets secondaires associés au vaccin classique est significativement diminuée.
En conséquence, les auteurs de cette découverte proposent de prévacciner l'ensemble de la population contre le virus de la variole à l'aide du MVA. Selon leur théorie, cette prévaccination faciliterait la mise en place dans l'urgence d'une campagne de vaccination antivariolique le jour où une menace bioterroriste l'exigerait.
Les deux études à l'origine de ces résultats ont été réalisées au NIH de Bethesda (Maryland), avec la collaboration de chercheurs de l'armée américaine.
Le singe comme modèle.
Dans l'étude utilisant le singe comme modèle, Earl et coll. ont réparti 24 animaux en quatre groupes : le premier groupe a reçu deux injections de MVA à deux mois d'intervalle. Le second a reçu une injection de MVA suivie, deux mois plus tard, d'une injection du vaccin antivariolique classique. Le troisième groupe a reçu une seule injection du vaccin classique et le dernier groupe n'a reçu aucune injection.
A la suite de ces différents protocoles d'immunisation, les chercheurs ont dosé dans l'organisme des quatre groupes d'animaux la quantité d'anticorps et de cellules T cytotoxiques dirigés contre le virus de la variole. Il leur est alors apparu que les singes immunisés à deux reprises par le MVA et ceux immunisés d'abord par le MVA, puis par le vaccin classique montrent une réponse immunitaire similaire à celle du groupe des animaux vaccinés à l'aide du vaccin classique. Par ailleurs, Earl et coll. ont observé que, contrairement aux singes qui ont reçu le vaccin classique, les animaux vaccinés ou prévaccinés par le MVA ne développent pas de lésion cutanée à la suite de leur immunisation.
De rares lésions cutanées.
Deux mois après la fin du protocole d'immunisation les chercheurs ont injecté le virus de la variole du singe aux 24 animaux de l'étude. Alors que les animaux du quatrième groupe (non immunisé) ont tous développé une forme sévère de la variole, les animaux des trois autres groupes ne sont pas tombés malades. De rares lésions cutanées ont cependant été observées chez les animaux n'ayant reçu que le vaccin MVA.
Dans l'étude menée chez la souris, Wyatt et coll. ont en outre testé le vaccin MVA sur des animaux immunodéficients, atteints soit dans leur immunité humorale, soit dans leur immunité cellulaire. Dans les deux cas, l'efficacité et la sécurité du vaccin ont pu être démontrées.
L'ensemble de ces résultats laissent envisager la généralisation de l'utilisation du MVA pour la vaccination antivariolique : ce vaccin paraît pratiquement aussi efficace que le vaccin classique et peut être utilisé sur des organismes immunodéprimés. Des études complémentaires permettront de déterminer la longévité de la protection conférée par le MVA et la dose de MVA idéale pour l'inoculation.
P. L. Earl et coll., « Nature » du 11 mars 2004, pp. 182-185 et L.S. Wyatt et coll. « Proc. Natl. Acad. Sci. USA », édition en ligne avancée.
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