«NOUS AVONS IDENTIFIÉ un nouveau syndrome de délétion associé à un retard mental léger et à une épilepsie», explique au « Quotidien » le Dr Evan Eichler (University of Washington School of Medicine, Seattle), qui publie l'étude dans la revue « Nature Genetics ».
«Nous estimons qu'il pourrait expliquer jusqu'à 0,3% des retards mentaux et retards du développement chez l'enfant. Nos données suggèrent que L'on devrait rechercher cette microdélétion chez les enfants nés avec un retard mental. »
De nombreux troubles génomiques issus de réarrangements chromosomiques se manifestent cliniquement par un retard mental et un délai du développement. Plusieurs études récentes de sujets atteints d'un retard mental ont ainsi conduit à l'identification de nouveaux syndromes génomiques récurrents.
Une équipe internationale, dirigée par le Dr Evan Eichler (University of Washington School of Medicine, Seattle), a étudié le génome de 757 patients présentant un retard mental et/ou des malformations congénitales.
Ils ont utilisé pour cela la nouvelle technique de cytogénétique moléculaire appelée hybridation génomique comparative (CGH), qui permet de dépister des microremaniements chromosomiques.
Cette étude a permis d'identifier chez 2 patients non apparentés une même délétion denovo de 1,5 mégabase sur le chromosome 15q13.3.
Dans une étude de suivi, ils ont donc recherché cette microdélétion chez plus de 1 000 patients affectés d'un retard mental inexpliqué. Ces patients appartenaient à une cohorte américaine, pour moitié d'origine européenne, l'autre moitié étant d'origine afro-américaine.
Au total, ils ont identifié 9 patients affectés portant la microdélétion 15q13.3, dont 6 probants : 2 patients avec une délétion denovo, 2 patients ayant hérité la délétion d'un parent affecté et 2 patients pour lesquels la nature spontanée ou héréditaire de la délétion est inconnue.
Les principales manifestations cliniques chez ces 9 patients consistent en un retard mental modéré (9/9), une épilepsie avec ou sans anomalies EEG (7/9) et des dysmorphies légères du visage et des doigts.
Le segment délété est connu pour contenir six gènes, dont un gène candidat pour l'épilepsie.
«Parmi les six gènes localisés dans la région délétée, le gène CHRNA7 (un canal à ions synaptique) offre un excellent candidat pour le phénotype d'épilepsie, précise le Dr Eichler. Le dépistage des mutations devrait débuter pour le gène CHRNA7 et l'épilepsie. »
Mutation de novo ou héritée.
«Deux choses sont intéressantes, souligne-t-il. Cette mutation peut apparaître de novo (les parents sont normaux, mais les enfants portent la délétion en raison vraisemblablement d'un événement précoce survenu dans la lignée germinale) et elle peut également être héritée, comme l'illustre une famille avec une mère et ses deux filles affectées. Nous avons trouvé d'autres exemples de mutation héritée, ce qui suggère que le retard mental est relativement léger. Les taux de QI dont nous disposons pour plusieurs patients le confirment. D'autre part, cette même région qui est prédisposée à la microdélétion est également inversée chez des individus normaux. Ce polymorphisme d'inversion pourrait être un facteur de risque prédisposant à la microdélétion ou à la duplication. Il nous faudra de nombreux échantillons parentaux supplémentaires pour confirmer ou rejeter cette hypothèse.»
D'après l'étude, ces microdélétions 15q13.3 apparaissent responsables de 0,3 % des cas de retard mental (6/2 082 sujets testés), une prévalence qui est comparable à celle des syndromes de Williams, d'Angelman et de Prader-Willi.
En supposant que la prévalence du retard mental modéré dans la population générale est de 0,8 %, les chercheurs estiment que la fréquence de cette microdélétion 15q13.3 dans la population générale est de 1 sur 40 000 personnes.
Sharp et coll. « Nature Genetics », 17 février 2008, DOI : 10.1038/ng.93.
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