DE NOTRE CORRESPONDANTE
ON SAIT QUE des mutations inactivantes dans l’un des trois gènes BRCA1, BRCA2 et TP53, majorent considérablement le risque de cancer du sein, et multiplie par dix à vingt le risque de cancer du sein avant l’âge de 60 ans. Par exemple, les femmes porteuses d’une mutation de BRCA ont un risque de 50 à 80 % d’avoir un cancer du sein au cours de leur vie.
Des mutations inactivantes de deux autres gènes, CHEK2 et ATM, confèrent un risque beaucoup moins élevé, qui est multiplié environ par deux. On estime que l’ensemble de ces gènes de susceptibilité au cancer du sein, tous impliqués dans la réparation de l’ADN, expliquent jusqu’à 25 % du risque familial de cancer du sein. Par conséquent, une grande part du risque familial reste inexpliquée.
Afin d’identifier d’autres gènes de susceptibilité, l’équipe du Pr Nazneen Rahman (Institute of Cancer Research, Sutton, Royaume-Uni) s’est intéressée à plusieurs gènes dont les protéines interagissent avec les protéines codées par les gènes connus de prédisposition au cancer du sein. L’un de ces gènes, BRIP1 (aussi appelé BACH1) code pour une hélicase qui interagit avec le gène BRCA1 et joue un rôle dans la réparation d’ADN. Puisque l’inactivation de BRIP1 abolit certaines fonctions de BRCA1, il était plausible que des mutations inactivantes de BRIP1 prédisposent aussi au cancer du sein. Cette hypothèse a donc été étudiée dans une étude cas-témoin.
Plus de mille femmes avec cancer du sein à tendance familiale.
Seal, Rahman et coll. ont analysé le gène BRIP1 chez 1 212 femmes atteintes de cancer du sein à tendance familiale (au moins un parent au premier degré affecté de cancer du sein ou de l’ovaire) et non porteuses de mutations des gènes BRCA1 et BRCA2.
Ils ont aussi analysé ce gène chez 2 081 femmes témoins.
Leur analyse a été fructueuse. Cinq mutations différentes du gène BRIP1 (entraînant une protéine tronquée) ont été identifiées chez 9 des 1 212 femmes atteintes de cancer du sein ; à titre comparatif, seulement deux mutations ont été retrouvées chez les 2 081 femmes témoins.
Les chercheurs estiment donc que ces mutations de BRIP1 confèrent un risque deux fois plus élevé de cancer du sein (RR de 2 ; IC 95 % : 1,2-3,2). Pour les femmes âgées de moins de 50 ans, ces mutations augmentent le risque de cancer du sein de trois fois et demie.
Un lien avec l’anémie de Fanconi.
Alors que l’équipe conduisait cette étude, on a découvert l’année dernière que des mutations des deux allèles BRIP1 causent une anémie de Fanconi (du groupe de complémentation J), maladie autosomique récessive associée à une instabilité chromosomique. Simultanément, il est apparu que des mutations bialléliques du gène BRCA2 peuvent également causer une anémie de Fanconi (du groupe de complémentation D1). «Ainsi, des mutations tronquantes inactivantes du gène BRIP1, à l’instar de celles du gène BRCA2, causent une anémie de Fanconi chez les individus porteurs bialléliques et entraînent une susceptibilité au cancer du sein chez les porteurs monoalléliques», notent les chercheurs.
Les six gènes de susceptibilité au cancer du sein maintenant connus (BRCA1, BRCA2, TP53, CHEK2, ATM et BRIP1) n’expliquent encore qu’une petite fraction de l’agrégation familiale du cancer du sein. «Toutefois, leurs interactions fonctionnelles étroites laissent supposer que d’autres gènes intervenant dans la réparation d’ADN pourraient aussi être impliqués dans la susceptibilité au cancer du sein», remarquent les chercheurs.
« Nature Genetics », 8 octobre 2006, Seal et coll., DOI : 10.1038/ng1902.
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