Sur le mur près de la porte, une photo de Charles. Plus loin, dans les sanitaires, c'est une étiquette avec l'inscription « se laver les mains » sur le porte-savon. Les six adultes autistes, âgés de 18 à 28 ans, ont pris leurs marques dans ces nouveaux locaux. En janvier, ils ont laissé les 70 mètres carrés du centre Quintinie (dans le 15e arrondissement) pour intégrer cet espace ARIA, au sein de l'hôpital Broussais.
Aujourd'hui, c'est l'inauguration du centre « ARIA-Simone Veil ». Claire frappe des mains pour exprimer sa joie. La comédienne Sandrine Bonnaire, marraine des dernières journées de l'autisme, est venue apporter son soutien moral à ARIA en ce jour de fête.
Qui sont les autistes ? Ils sont nos frères, nos sœurs, nos cousins. Jusqu'à l'âge de la majorité, ils sont pris en charge dans des IME (Instituts médico-éducatifs). Ensuite... le grand vide. Les familles les « reprennent » en leur sein. Pendant combien de temps ? Jusqu'à quand ? Que se passe-t-il au moment du décès des parents de ces adultes handicapés ?
On peut l'avouer, c'est une lourde charge que de s'occuper jour et nuit de son enfant devenu « malgré tout » adulte. Alors il faut se féliciter de l'ouverture de ce nouveau centre. Seulement, cet établissement accueille huit personnes. Or, on compte aujourd'hui, sur les 6 316 adultes autistes en Ile-de-France, 2 500 à 3 800 personnes qui requièrent une prise en charge en MAS (maison d'accueil spécialisé) ou FDT (foyer à double tarification). Cent soixante-seize places ont été créées en Ile-de-France. Les trois unités d'accueil de l'ARIA comptent 21 places.
S'ouvrir au monde
« Il y a d'abord eu le gros dépoussiérage en 1993-1994 de l'image sur les autistes », rappelle Nicole Toureille, présidente de l'association ARIA. Les rapports ministériels de Simone Veil sur la situation des autistes, la circulaire d'avril 1995 puis le plan Veil ont permis la création de places et d'institutions. La loi du 11 décembre 1996 a enfin reconnu les autistes comme personnes handicapées à part entière, relevant ainsi de la loi protectrice de 1975.
La proximité des trois centres de jour permet des liens, des échanges entre patients et une bonne coordination de leurs activités. « Ils peuvent se retrouver et surtout bénéficier des équipements de chacune des unités pour un maximum d'activités », explique Sandrine, psychomotricienne.
« Guérir l'autisme, c'est aller vers l'extérieur. Il n'existe pas d'autre traitement que la sociabilisation », insiste Nicole Toureille. « C'est pour cette raison que nous avons choisi de nous installer dans ce quartier sympathique ». A « petites doses », les patients, accompagnés d'éducateurs, sortent faire des courses, vont parfois au cinéma ou boire un verre. Ils vont à la piscine, sont inscrits à un cours de gymnastique où ils côtoient d'autres adultes. « Il faut ouvrir l'autiste à la relation avec autrui et avec lui-même », explique Nicole Toureille.
« Il est difficile de trouver des gens qui acceptent de travailler avec nos gosses de façon durable et sans avoir l'air de trouver le temps long », admet-elle. Quatre personnes sont affectées à chacun des centres, afin qu'en moyenne un éducateur s'occupe de deux malades.
Urgent : internat
Le maire du 14e arrondissement et membre du CA de l'AP-HP, Pierre Castagnou, témoigne de l'intérêt qu'il porte à la cause des autistes en exprimant un double souci : conserver la vocation socio-sanitaire du site de Broussais et l'intégrer dans ce quartier : « Je suis très attaché à ce que vous restiez. »
ARIA souhaite non seulement rester dans le 14e, mais en plus s'y agrandir. En effet, le combat de Nicole Toureille est la création d'un internat. Afin de permettre un vrai soulagement pour les familles. « Il faudrait, pour commencer, huit places d'internat alternatif au sein de notre institution pour soulager ponctuellement les familles », souligne-t-elle. Cent vingt sont disponibles en Ile-de-France, mais aucune à Paris. ARIA travaille sur un projet qui créerait 36 places en Seine-et-Marne.
En attendant, Claire, Vincent, Charles, David, Huang-Lan et Yudah sont chez eux ici. Ils seront prêts à recevoir en avril deux autres compagnons.
ARIA, 24 bis rue des Plantes, 75014 Paris. Tél. 01.45.41.38.88.
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