C'EST EN 1869 qu'Edouard André, membre du Jockey Club et député du Gard, décide la construction d'un hôtel particulier, boulevard Haussmann. Lorsque l'inauguration a lieu sept ans plus tard dans la pompe et le faste, Edouard André a déjà décidé de consacrer sa vie aux beaux-arts et de redonner vie dans son hôtel à tout l'éclat du siècle des Lumières, tombé alors en désuétude. Avec Nélie Jacquemart, qu'il épouse en 1881, André entame une formidable aventure de collectionneur. Leurs premières acquisitions ? Des céramiques, des porcelaines anciennes de Chine, de Meissen ou de Sèvres, ainsi que des assiettes de la première période d'Emile Gallé.
L'art est partout présent dans la vie des époux. Nélie Jacquemart peint elle-même, des scènes historiques ou des portraits de la société parisienne. En 1872, elle avait fait le portrait d'Edouard André, symbole de leur rencontre. Elle achète fréquemment chez les antiquaires, tandis que son mari a l'habitude de parcourir les hôtels de ventes. Une merveilleuse complémentarité de goûts les réunit.
La jeune femme se passionne pour le Quattrocento et collectionne les œuvres de la Renaissance du Nord : manuscrits enluminés, émaux polychromes, tapisseries, plaques de miroirs en ivoire... On s'enchantera ici devant les subtils Memling, la « Vierge à l'Enfant » et l'étonnante « Allégorie de la chasteté ».
Pendant ce temps, Edouard André s'intéresse au XVIe siècle, à la Renaissance française et à ses arts décoratifs : objets rares, reliures, portraits de Corneille de Lyon ou marbre de l'amiral Gaspard de Coligny attribué à Jean Goujon.
La passion pour les œuvres royales, pour les créations du Grand Siècle, rassemble les deux collectionneurs. Nélie recherche les meubles Boulle ; Edouard, les œuvres de Nicolas de Largillière, François Boucher et autres Watteau (ravissantes sanguines de ce dernier, comme « le Meunier galant » et « Personnages de la Comédie »). On admirera le bureau Dubois qui a appartenu à Louis XV et le cabinet en marqueterie attribué à Golle (fin du XVIIe).
1894 : Edouard André meurt. Nélie Jacquemart se consacre davantage alors au « mythe oriental » qui la fascine déjà depuis des années. De ses voyages en Turquie, en Syrie, au Liban, en Egypte ou aux Indes, elle rapporte des sculptures antiques, des verreries, des manuscrits persans, des tissus, des pièces en jade ou en porcelaine de Chine, une étonnante lampe de mosquée d'Isnik (XVIe siècle) sur laquelle on peut lire les versets du Coran ou encore un sublime écran de miroir d'Afghanistan incrusté de pierres précieuses. Et, surtout, des tapis de Smyrne ou du Caucase, beaucoup de tapis qui font de sa collection l'une des plus importantes de Paris. Et sûrement l'une des plus éclatantes.
« Par amour de l'art », musée Jacquemart-André, 158, boulevard Haussmann, Paris 8e. Tél. 01.45.62.16.36. Jusqu'au 15 août.
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