O N savait, par des études françaises (CREDES) et internationales (ECRHS de 1991 et 1992, ISAAC de 1994-1995) que l'asthme est une maladie fréquente, dont la prévalence a doublé depuis vingt ans et qui peut être grave avec 2 000 morts par an. L'étude réalisée pour la FFSA se signale par sa grande ampleur et son ambition. Elle été menée en partenariat avec le SAR (Syndicat de l'appareil respiratoire), en collaboration avec les pneumologues d'Ile-de-France (APIF) et les chercheurs de l'INSERM (unité 408). La population concernée, à savoir les familles de salariés et retraités des sociétés d'assurances domiciliés en Ile-de-France, constitue un vaste échantillon de 53 604 foyers.
L'enquête a duré quatre ans et s'est déroulée en trois phases : une étude épidémiologique descriptive sur l'asthme et ses symptômes, un suivi des asthmatiques pendant vingt mois, un dépistage gratuit chez les non-asthmatiques.
Des chiffres inquiétants chez les enfants
Par rapport aux précédentes études, on constate une augmentation de la prévalence de l'asthme et surtout chez l'enfant : 6,6 % d'asthmatiques actuels, dont 9,8 % d'enfants touchés pour 5,9% d'adultes. Les garçons sont les plus atteints avec 12,2 %. Ces résultats sont d'autant plus préoccupants que le taux de prévalence cumulée (asthmatiques qui ne le sont plus et asthmatiques actuels) est déjà supérieur chez l'enfant (15,6 % chez les garçons) à celui des adultes (10 %). On peut donc craindre « une flambée de la pathologie asthmatique dans le futur », prévient le Dr Laurent Alexandre (président de Medcost).
Autre sujet de préoccupation : le suivi sur vingt mois montre une observance insuffisante du traitement (30 % d'oublis réguliers), avec 5 % des patients qui ont dû être hospitalisés en urgence et 28,1 % d'asthmes très handicapants (1). Du point de vue de la qualité de vie, mesurée selon le Nottingham Health Profile (NHP), « ce sont surtout la mobilité physique et l'énergie qui sont touchées », observe le Pr Gérard Duru (CNRS). Les patients ont tendance à sous-estimer la gravité de leur pathologie.
Sous-diagnostic
Mais surtout, lors de la phase de dépistage des patients non signalés comme asthmatiques, sur les 483 personnes qui ont consulté un pneumologue de l'enquête, 134 ont été diagnostiqués (27,7 %), près du double chez l'enfant (47,4 %). Une thérapeutique de fond a été instituée chez les trois quarts d'entre eux (78,4 %). Il existe bien un sous-diagnostic de la pathologie. Les sifflements dans la poitrine sont un bon signe prédictif, mais, avec la dyspnée et la quinte de toux, ils restent des signes banals qui n'alarment pas, d'où un diagnostic souvent retardé. Le Dr Frédéric Champel estime que de « 1 million à 1,5 million de Français se promènent en ne se sachant pas atteints d'asthme ». Il faut aussi noter que sur les 2 000 morts par an, la moitié ne se savait pas asthmatique. L'enquête révèle donc une insuffisante prise de conscience sociale de l'importance de la pathologie asthmatique. Et le Dr Alexandre de remarquer : « Les conditions d'une prise en charge optimale ne sont pas réunies et cela va prendre un certain nombre d'années encore. » Pourtant, l'étude réalisée ouvre des perspectives pour l'amélioration de la prise en charge des patients, du dépistage des asthmatiques qui s'ignorent, de l'information et de l'éducation des patients, tout comme la sensibilisation et la formation des professionnels. Il s'agit, conclut-il, de « faire reculer le nombre totalement inacceptable d'asthmes mortels chez des patients jeunes qui ne devraient plus mourir de cette pathologie en 2001 ».
D'après une conférence de presse organisée par la FFA, le SAR et Medcost , avec le Dr Laurent Alexandre(Medcost), le Dr Frédéric Champel (SAR), le Pr Gérard Duru (CNRS), et André Renaudin (FFA).
(1) L'étude du handicap cherchait à qualifier le retentissement de l'asthme sur la vie courante. Une classification a été élaborée sur des critères de recours aux soins, de fréquence des crises et des symptômes, des arrêts de travail ou des arrêts scolaires. Trois types d'asthme étaient déterminés : très handicapants, handicapants, non handicapants.
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