Périndopril

Un médicament orphelin ?

Publié le 25/09/2008
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Le traitement des maladies génétiques passe aussi par des recherches sur des médicaments très connus et très utilisés, comme les IEC et, plus particulièrement, le périndopril. Telle est la conclusion d'un symposium présidé par les Prs S. Laurent (France) et L. Tavazzi (Italie) dans le cadre du programme EBAC (1).

LE Pr D. DUBOC (Cochin, Paris) a ainsi présenté des travaux sur la cardiomyopathie de Duchenne qui touche 1 garçon sur 3 000 à la naissance : tous ces enfants développeront une dysfonction ventriculaire gauche et plus de la moitié d'entre eux mourront d'insuffisance cardiaque. Après des observations expérimentales prometteuses (sur la cardiomyopathie du hamster), l'équipe du Pr Duboc a entrepris une étude portant sur 57 enfants (dont la fraction d'éjection ventriculaire gauche était supérieure à 55 %), 28 recevant du périndopril et 26 un placebo. On constate que, au terme de dix ans, la mortalité cumulée est significativement réduite (p = 0,0009), avec un gain encore plus précoce (dès la première année) quand le traitement est entrepris entre neuf ans et demi et treize ans quand il n'y a pas encore de signe de dysfonction du VG et d'insuffisance cardiaque. La même équipe a entrepris une nouvelle étude chez des enfants plus petits (5-8 ans) dont la marche n'est pas encore altérée : l'objectif étant d'évaluer si l'IEC peut aussi améliorer la distance de marche (résultats en 2012).

Le Dr B. Kingwell (Australie) a, pour sa part, fait état des promesses des IEC dans le syndrome de Marfan qui, on le sait, s'accompagne de rigidité et d'une dilatation de l'aorte. Dans cette pathologie, les bêtabloquants ont donné des résultats limites, ne s'appliquant qu'à certains malades (aortes peu ou pas dilatées) et ne prenant pas en compte la physiopathologie de la maladie. Le recours aux IEC se fonde sur le fait que le taux d'angiotensine II est, en moyenne, multiplié par quatre chez ces patients ; des travaux expérimentaux ont, en outre, montré que le ramipril et le périndopril diminuaient la rigidité aortique. Partant de là, l'équipe du Dr Kingwell a entrepris un essai de 24 semaines chez 17 patients âgés de 18 à 40 ans et déjà sous bêtabloquants : 10 d'entre eux ont reçu en plus du périndopril et les 7 autres un placebo. Dans le premier groupe, on observe une diminution des indices de rigidité artérielle et du diamètre aortique en diastole et un ralentissement de la progression de la dilatation aortique en systole. Les modifications biologiques observées parallèlement ne permettent pas de dire si l'action des IEC est plus d'ordre fonctionnel ou structurel, mais, en tout état de cause, ces médicaments apparaissent prometteurs.

Ainsi, conclut le Pr Stéphane Laurent (France), en attendant le développement des thérapies géniques et autres thérapies révolutionnaires, ces patients peuvent bénéficier de nouvelles indications de médicaments ayant acquis une grande notoriété dans des pathologies beaucoup plus fréquentes. La recherche de médicaments orphelins passe aussi par là, illustrant au passage l'importance de la collaboration entre recherche académique et industrie pharmaceutique.

(1) European Board for Accreditation in Cardiology avec le soutien institutionnel des Laboratoires Servier.

> Dr ALAIN MARIÉ

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8427