Jean-Christophe Rufin élu à l'Académie française

Un médecin nomade sous la Coupole

Publié le 22/06/2008
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LE NOMADISME comme mode d'exercice médical. Le sous-titre de son dernier livre, « Chroniques d'un médecin nomade », résume un parcours qui sera tout sauf sédentaire : après l'internat de Paris et Sciences-Po, Jean-Christophe Rufin a multiplié les missions en Afrique et en Asie, pour MSF (Médecins sans frontières, dont il a été vice-président), Première urgence, ou ACF (Action contre la faim), qu'il a présidée. Entre-temps, il a participé à des cabinets ministériels, auprès du secrétaire d'État Claude Malhuret (1986), puis du ministre de la Défense François Léotard (1993-1995). Il intervient alors dans des opérations dites de maintien de la paix, contribuant à Sarajevo à la libération d'otages et négociant au Rwanda avec des insurgés. «C'était un peu les Trois mousquetaires au XXesiècle», commentera-t-il après coup, mélange de d'Artagnan et de James Bond. En 1995, il fait ses débuts de diplomate comme attaché culturel au Brésil. Douze ans plus tard, il renoue avec la carrière, décrochant le poste d'ambassadeur à Dakar.

Seul médecin à avoir obtenu le Goncourt.

«Je suis incapable de jouer durablement un rôle social, confiait-il au “Quotidien” (17 février 2004) et je n'ai pas envie de passer toute ma vie dans la même peau.» Les diverses peaux qu'il endosse successivement vont donc lui fournir autant d'expériences singulières pour ces productions littéraires.

Quinze livres à ce jour composent une biographie à succès. « L'Abyssin » décroche en 1997 le Goncourt du premier roman et le prix Méditerranée. Il est suivi, deux ans plus tard des « Causes perdues », récit des turbulences humanitaires, récompensé par le prix Interallié. Avec « Rouge Brésil » (Gallimard, 2001), il devient le premier médecin à remporter le prix Goncourt (en 1932, le Dr Louis-Ferdinand Destouches, alias Céline, avait dû se contenter du prix Renaudot pour son « Voyage au bout de la nuit »).

À chaque parution, le public est au rendez-vous, qui le plébiscite. Ce qui n'empêche pas cet auteur comblé de se revendiquer avant tout comme médecin, comme dans son dernier livre, « Un léopard sur le garrot » (Gallimard, 2008). «Au-delà de toutes les mises en danger, de mon parcours, au fond de moi, je suis resté fidèle à ma vocation médicale, même si, c'est vrai, je me sens parfois orphelin de mon métier», expliquait-il au « Quotidien », tout en ajoutant : «Pour les gens de lettres, je suis un médecin. Et pour les médecins, je suis un romancier.» Le Pr Yves Pouliquen, l'un des deux autres médecins qu'il va rejoindre sous la coupole, avec le Pr François Jacob, tient quand même à rectifier : «Lui, il est un écrivain qui est aussi médecin, alors que je suis quant à moi un médecin qui est aussi écrivain.»

> CHRISTIAN DELAHAYE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8397