L'association entre une fréquence cardiaque de repos élevée et la morbi-mortalité cardio-vasculaire a été démontrée dans un grand nombre d'études épidémiologiques dont certaines tendent à prouver qu'il s'agit d'un marqueur de risque indépendant.
LA PREMIÈRE étude démontrant une association entre des valeurs de fréquence cardiaque élevées et la maladie cardio-vasculaire date de plus de soixante ans. Depuis, plus de quarante études épidémiologiques, y compris l'étude de Framingham, ont fourni la preuve que la fréquence cardiaque (FC) est associée à la morbi-mortalité cardio-vasculaire. Cette étude a également démontré que le rôle de la fréquence cardiaque dans les complications cardio-vasculaires, notamment coronaires, est encore plus important chez l'hypertendu. Il a également été mis en évidence que l'association entre augmentation de la FC et morbi-mortalité cardio-vasculaire existe, quel que soit l'âge, chez les individus âgés de plus de 70 ans et chez des patients qui ont ou non des complications cardio-vasculaires.
Dans plusieurs études, il existe une relation positive entre les valeurs de la FC et celles de la pression artérielle, du poids, des triglycérides et du métabolisme du glucose ; ces constatations tendant à imposer ce paramètre hémodynamique comme valeur prédictive de survenue d'événements cardio-vasculaires. Néanmoins, dans d'autres travaux, quand on pondère les résultats en ajustant aux autres facteurs de risque, la fréquence cardiaque devient un facteur négligeable.
Une valeur pronostique supérieure à celle de l'HTA ?
Il faut cependant souligner que deux études mettent en évidence l'association entre la fréquence cardiaque et les événements coronaires aigus après correction pour l'âge, l'indice de masse corporelle, un éventuel tabagisme, la pression artérielle, une dyslipidémie, un diabète ou encore des antécédents cardio-vasculaires (1, 2). Dans ces études, en ce qui concerne la survenue d'événements cardio-vasculaires et non cardio-vasculaires mortels, la valeur prédictive de l'élévation de la fréquence cardiaque était souvent plus importante que celle d'une hypertension ou d'une hypercholestérolémie.
Ces observations épidémiologiques peuvent être expliquées par au moins deux mécanismes : l'augmentation du nombre de battements cardiaques accroît les besoins myocardiques, accélère la fatigue artérielle et peut provoquer la rupture des plaques d'athérome constituées ; l'augmentation de la fréquence cardiaque est le témoin d'une hyperactivité sympathique qui peut avoir des effets négatifs sur le système cardio-vasculaire, notamment sur la circulation coronaire (3).
Mais si la FC doit avoir une signification pronostique, il faut s'interroger sur sa définition et sur celle de la tachycardie. L'extrapolation de données obtenues dans différentes études permet de parler de FC normale entre 60 et 80 pulsations/minute et de tachycardie pour des valeurs de FC supérieures à 100 pulsations minute (4).
Une des questions que de nombreux auteurs se sont également posées est la définition de la valeur seuil à partir de laquelle le risque cardio-vasculaire commence à augmenter. Il semble ici que l'extrapolation des données d'études – très peu nombreuses – qui abordent ce problème indiquent la valeur de 64 pulsations minute (4).
La mesure de la fréquence cardiaque doit être effectuée sur un patient assis depuis au moins 5 minutes dans une pièce calme et confortable à température ambiante. Elle doit être mesurée pendant une période de 30 secondes par la palpation du pouls à au moins deux reprises (4).
A signaler que, lors de l'étude SYSTEUR, l'évaluation au long cours du rythme cardiaque et des chiffres de PA a permis de mettre en évidence que la fréquence cardiaque de base donne les mêmes renseignements pronostiques que la fréquence cardiaque des 24 heures, ce qui a été confirmé plus récemment (5).
Les implications thérapeutiques.
Ce que l'on sait aujourd'hui sur le rôle supposé de l'élévation de la fréquence cardiaque dans la survenue d'événements cardio-vasculaires pourrait avoir des implications thérapeutiques. Cependant, toutes les informations sur l'impact clinique d'une réduction de fréquence cardiaque pharmacologique sont rétrospectives. Par ailleurs, la réduction médicamenteuse de la FC a des implications pronostiques sur la survenue de l'infarctus du myocarde et d'une défaillance cardiaque, deux événements dont la mortalité est réduite par l'administration de bêtabloquants.
En ce qui concerne l'hypertension artérielle, aucune étude n'a encore apporté la preuve de l'intérêt de la diminution du rythme cardiaque. Cependant, le consensus publié par la Société européenne d'hypertension suggère que, malgré le manque de données, «la réduction de fréquence cardiaque par des agents antihypertenseurs peut avoir des effets bénéfiques» (4). Cela devient particulièrement indiqué en postinfarctus.
D'après la communication de Gianfranco Parati (Milan).
(1) Greenland P et coll. Am J Epidemiol 1991;149:853-862.
(2) Jouven X et coll. 1999 20;99:1978-83.
(3) Benetos A. Arch Mal Coeur Vaiss 2000;93:1371-1376 (4) Palatini P et coll. J Hypertens 2006;24:603-610.
(5) Palatini P et coll. Arch Intern Med 2002;162:2313-2321.
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