UNE ÉQUIPE NORVEGIENNE montre que, dans la leucoplasie orale, l'aneuploïdie est un signe de mauvais pronostic : même en cas de résection complète, on observe un risque élevé de carcinome et de décès. Ce qui souligne la nécessité de chercher des traitements complémentaires.
Le lien entre le tabac et leucoplasie
Le premier à avoir fait le lien entre la leucoplasie orale et le cancer est Paget. Lequel a également fait la connexion entre tabac et leucoplasie.
La leucoplasie désigne une plaque blanchâtre qui ne part pas au grattage et qui n'est pas attribuable à une autre maladie. Le taux de transformation maligne est variable selon les études et les localisations. La leucoplasie doit être distinguée de la leucoplasie chevelue, lésion associée au virus d'Epstein-Barr et observée chez les personnes immunodéprimées, notamment les personnes infectées par le VIH. Des plaques blanches buccales peuvent aussi avoir d'autres causes, par exemple les traumatismes répétés (frictions) et les maladies cutanéo-muqueuses comme le lichen plan ou encore le lupus.
Revenons à la leucoplasie. Le traitement standard va de la surveillance à la résection complète. L'équipe du Norvégien Albrecht Reith a déjà observé, dans un précédent travail, qu'un carcinome se développe dans 24 % des leucoplasies en général mais dans 70 % des leucoplasies comportant une aneuploïdie. La même équipe a voulu connaître l'effet de la résection sur la survenue d'un cancer et sur la mortalité. Pour cela, elle a étudié les relations entre résection, ploïdie et mortalité par cancer chez 150 patients ayant une leucoplasie orale dysplasique : 103 avec diploïdie, 20 avec tétraploïdie et 27 avec aneuploïdie.
Au cours d'un suivi de quatre-vingts mois, un carcinome s'est développé chez 47 des 150 patients : 5 avec diploïdie, 16 avec tétraploïdie et 26 avec aneuploïdie. La survenue d'un cancer était sans rapport avec le statut de la marge de résection. Des récurrences de cancer sont survenues chez quatre des patients avec tétraploïdie et vingt-deux de ceux avec aneuploïdie ; récurrences multiples et à distance dans l'aneuploïdie. Les 47 patients avec cancer ont été traités par chirurgie et radiothérapie ; puis par chimiothérapie pour les 26 cas de récurrence. Dans le groupe aneuploïdie, le premier cancer était découvert à un stade plus avancé que dans les autres groupes. Toujours dans le groupe aneuploïdie, sur quatre années, le taux de décès par cancer oral a été de 72 % ; en revanche, aucun décès lié à ce cancer n'est survenu dans les autres groupes.
« La résection complète d'une leucoplasie avec aneuploïdie ne réduit pas le risque de carcinome agressif et de décès par cancer oral », concluent les auteurs. Des résultats qui soulignent que l'aneuploïdie est un facteur de très mauvais pronostic et qu'il faut chercher de nouveaux traitements d'urgence.
« Comme le démontrent Sudbo et coll., l'aneuploïdie apparaît comme un des indicateurs pronostiques les plus prometteurs pour l'étude des cancers de la bouche », estiment deux éditorialistes, Deborah Greenspan et Richard Jordan (université de Californie, San Francisco).
« New England Journal of Medicine » du 1er avril 2004, pp. 1405+1413 et 1382-1384.
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