FRUIT DE QUATRE MOIS de travaux, la synthèse des états généraux de l'organisation de la santé (EGOS I et II) suggère une batterie de mesures plus ou moins audacieuses susceptibles de nourrir le chapitre «accès aux soins» du futur projet de loi de modernisation de la santé (texte que Roselyne Bachelot présentera à l'automne au Parlement). Certaines conclusions des EGOS doivent également «cadrer» les prochaines négociations conventionnelles.
Plongée dans la « boîte à outils » des EGOS désormais à disposition du gouvernement et de la Caisse nationale d'assurance-maladie.
Missions
– Dans le code de la Santé publique, définir clairement les soins de premier recours et expliciter les missions du médecin généraliste de premier recours (MGPR). Ce dernier devra contribuer à l'offre de soins ambulatoire sur un territoire donné – y compris dans les hôpitaux locaux et dans les structures d'hospitalisation à domicile –, orienter le patient, assurer ou organiser le dépistage et la prévention, veiller à l'application individualisée des protocoles de soins de longue durée, contribuer au suivi des maladies chroniques, assurer la synthèse des informations, mais aussi participer à la permanence des soins du territoire de santé.
– Promouvoir un nouveau pacte social de santé ; dans ce cadre notamment, tous les patients relevant d'une maladie chronique pourraient bénéficier d'un plan annuel personnalisé de prévention et de soins coordonnés(incluant des conseils de prévention adaptés, les actes à effectuer durant l'année, les coordonnées des autres professionnels de santé intervenant dans la prise en charge…).
– Instaurer un schéma régional d'organisation des soins de premier recours concerté(maisons de santé, réseaux, centres de santé, hôpitaux locaux…).
– Confier à une instance indépendante l'évaluation de la qualité de la réponse aux besoins de prise en charge sanitaire sur le territoire.
Cursus
– Mettre l'accent sur la formation initiale du médecin généraliste de premier recours : à court terme, mobiliser davantage les capacités formatrices – enseignants, maîtres et terrains de stage ; permettre à tous les étudiants de connaître mieux et plus tôt l'exercice de la médecine générale (stages) ; à moyen terme, ouvrir la réflexion sur la transformation des ECN en épreuves classantes interrégionales ; muscler la nouvelle spécialité de médecine générale de premier recours (formation spécifique qui durerait quatre ans au lieu de trois) dans le cadre d'une filière universitaire plus attractive ; organiser un post-internat à cette filière de médecine générale (inciter dans ce cadre les étudiants à un exercice regroupé notamment au profit des zones sous-dotées via un contrat de trois ans salarié).
– Adapter la formation des autres professions de santé (assurer un lien systématique entre les missions, les compétences et les maquettes de formation dans le cadre d'une double tutelle entre les ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur).
– Promouvoir les actions de formation continue dans un cadre interprofessionnel.
Coopération, coordination
Ce nouveau chapitre concrétise l'apport de la deuxième phase des EGOS (« le Quotidien » du 7 avril). Parmi les principales mesures suggérées :
– Assouplir le cadre juridique qui régit l'exercice des auxiliaires médicaux : le décret qui établit la liste des actes autorisés serait remplacé par une description des missions et de leurs limites (et un référentiel d'actes plus facilement actualisé).
– Valoriser la fonction de coordination des soins assurée principalement par le médecin généraliste (deux cas de coordination sont identifiés : patient atteint de pathologie chronique, ou personne âgée souffrant de polypathologies ; sortie de l'hôpital).
– Mettre en place à l'échelle d'un bassin de vie ou dans les zones urbaines d'un quartier des protocoles sur les modes de collaboration entre les différentes professions de santé.
Installation
Plusieurs mesures visent à augmenter ou à conforter l'offre de soins dans les zones sous-dotées ou fragiles.
– Créer dans chaque région un guichet unique d'aide à l'installation des professionnels, aisément identifiable. Ce guichet centraliserait toutes les informations sur les aides existantes, l'environnement local, le bassin de vie ; il conseillerait les professionnels sur l'installation, puis les accompagnerait dans les premiers mois d'exercice (guide, contacts).
– Organiser un accueil personnalisé dans les zones sous-dotées (mise à disposition de locaux à tarifs préférentiels, sécurisation des cabinets, dispositif de recherche d'emploi pour le conjoint, de lieux de scolarisation).
– Appliquer et diffuser les mesures financières d'aides à l'installation en médecine générale. Certaines mesures s'adresseraient spécifiquement aux jeunes diplômés comme la mise en place d'un complément de ressources sur trois à cinq ans.D'autres aides seraient ciblées sur les zones sous-dotées : contrats d'engagement entre les étudiants et les collectivités ;contrats territoriaux d'installation (récapitulant les aides, le soutien matériel, l'accompagnement…) ; salariat de trois ans pour les jeunes généralistes en maison de santé.
Modes d'exercice
– Promouvoir dans le cadre conventionnel les modes d'exercice regroupé et pluridisciplinaire sans modèle unique (cabinets de groupe, maisons de santé, pôles de santé libéraux…).
– Soutenir en particulier la création de maisons de santé pluridisciplinaires prioritairement dans les zones sous-dotées (cahier des charges obligatoire, projet de soins, participation à la PDS, collaboration interprofessionnelle). Roselyne Bachelot a déjà annoncé le financement de 100 projets pour 2008. Le financement de ces maisons de santé devrait être pérennisé en mobilisant tous les « payeurs » potentiels (collectivités, Etat, assurance-maladie).
– Développer et mutualiser le financement de fonctions supports d'exercice des professions de premier recours (secrétariat, gestion du dossier patient, formulaires, informatisation…).
Zones surdotées
– Identifier dans chaque région les zones de surdensité (cantons, bassins de vie) ; dans ces zones excédentaires, négocier un contrat «santé-solidarité» avec chaque médecin généraliste concerné l'engageantà « répondre à des besoins de santé non couverts» à proximité :participation à la PDS, activité à temps partiel dans un secteur sous-doté, participation à des réseaux de santé.
– Envisager dans ces secteurs surdotés des mesures de régulation conventionnelle (prise en charge modulée des charges sociales, par exemple) applicables à tous les médecins généralistes de premier recours.
PDS
– Unifier à l'échelon régional le pilotage de la PDS sous l'égide des agences régionales de santé (ARS).
– Sortir le financement du dispositif conventionnel (et substituer d'autres modalités comme le paiement forfaitaire à l'échelle du territoire).
– Recentrer l'activité de la PDS libérale sur la tranche horaire 20 h-24 h.
Rémunération
– Expérimenter (comme le prévoit la loi) de nouveaux modes de rémunération des professionnels de santé ayant vocation à «compléter le paiement à l'acte, voire à s'y substituer» (capitation, forfait par pathologie, paiement horaire, incitations à la réalisation d'objectifs de santé publique, collaboration salariée). Ces expérimentations visent les médecins généralistes, les sages-femmes et autres professionnels paramédicaux.
– Valoriser sur le plan conventionnel les nouveaux statuts de collaborateur libéral et de collaborateur salarié.
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