DIX POUR CENT de la population susceptible de souffrir d'une affection neurologique sérieuse, 5 millions d'Européens atteints de démence chaque année, sans parler des maladies d'Alzheimer, de Parkinson, de la sclérose en plaques, mais aussi des psychoses ou encore des accidentés de la route (1,7 million de victimes chaque année en Europe) dont la moelle épinière a été lésée : l'enjeu sanitaire est de taille.
Le Pr Olivier Lyon-Caen l'a rappelé lui-même, il s'agit en même temps d'un « enjeu économique majeur ».
Aussi, fallait-il, pour répondre à ce défi, élaborer un projet à la hauteur : un Institut du cerveau et de la moelle épinière (ICM). Les concepteurs du projet n'ont pas hésité à faire appel à des personnalités aussi diverses que (entre autres) le cinéaste Luc Besson, l'ancien ministre Jean Glavany ou le pilote Michael Schumacher. Cette équipe a fait le pari de monter une sorte de laboratoire du futur où seront regroupés des chercheurs, mais aussi des cliniciens et, surtout, des patients répondant à des critères d'inclusion « exclusivement scientifiques et médicaux », selon le Pr Lyon-Caen.
Favoriser une recherche dynamique.
Concrètement, sur un terrain de 7 000 m2 mis à disposition par l'AP-HP, un bâtiment comportant 19 000 m2 de laboratoires et de services techniques devrait être érigé à partir de 2006 sur le site de la Pitié-Salpêtrière. Près de 900 personnes devraient y travailler activement, avec un statut qui reste encore à définir (probablement employés de l'AP-HP). Au niveau de la recherche, environ 90 équipes de 3 à 10 personnes devraient être recrutées par un comité scientifique international. Il s'agirait, à partir des thématiques de recherche retenues, de sélectionner les meilleurs dans leur domaine, qu'ils soient issus d'organismes publics ou d'organismes privés. Des contrats de trois à cinq ans leur seraient proposés, avec des évaluations « extrêmement strictes », et dans le cadre d' « une dynamique d'entreprise », selon le Pr Yves Agid. Ce turn-over organisé serait destiné à stimuler les imaginations - quitte à reconduire les contrats pour les chercheurs les plus efficaces.
Les promoteurs du projet comptent sur la promiscuité entre chercheurs, médecins et patients pour développer des synergies nouvelles. Il s'agirait en outre de permettre le passage rapide de la recherche à l'application thérapeutique, en incluant les patients, sélectionnés sur la base du volontariat, dans des essais cliniques réalisés sur place « dans les mêmes conditions éthiques que les protocoles actuels », précise le Pr Lyon-Caen. Des volontaires sains pourraient être accueillis.
Enfin, la valorisation industrielle des résultats de la recherche n'est pas oubliée : le futur ICM prévoit des dépôts de brevet, mais aussi la possibilité de jouer le rôle d'incubateur d'entreprises innovantes dans le domaine des neurosciences.
Le coût estimé de cette « entreprise scientifique dynamique », selon l'expression du Pr Agid, est actuellement de 67 millions d'euros. Les fondateurs comptent sur trois moyens de financement : des fonds publics (région, ville de Paris, Europe, etc.), pour le moment à hauteur de 18 millions d'euros sous forme de promesses de subventions, des fonds privés (un appareil d'IRM de recherche offert par un industriel, des dons d'entreprises ou de particuliers) et, enfin, un emprunt pour boucler le financement.
Pour atteindre leur objectif d'une mise en service en 2008, les membres de l'ICM comptent sur la « volonté politique extrêmement forte pour favoriser la recherche dans ce domaine où la France a toujours été historiquement à la pointe », a expliqué le Pr Saillant. Un moyen peut-être de redorer le blason et de la recherche, et de la médecine française, quelque peu mises à mal ces derniers temps... l'essentiel étant que les patients puissent en bénéficier.
Collecte de dons
L'Association pour le développement de la recherche sur le cerveau et la moelle épinière (Adrec), présidée par le Pr Saillant, est chargée de la collecte des dons privés et de la médiatisation du projet.
Pour en savoir plus :
www.adrec.org,
www.icm-institute.org.
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