De notre envoyé spécial
B ASE aérienne militaire de Saint-Dizier, au début d'octobre. L'armée de l'air française participe à des manuvres de l'OTAN et des membres du Partenariat pour la paix, qui regroupe un certain nombre de pays nés de l'éclatement du bloc soviétique. Au total, 22 pays sont représentés, 1 600 hommes et plus de 60 avions et hélicoptères participent à ces manuvres baptisées Cooperative Key 2002.
Un hôpital de campagne en toile vert kaki de respectables dimensions repose sur un terrain militaire à proximité d'une piste d'atterrissage. Un hôpital cruciforme, dont les branches excèdent à peine trois mètres de large pour deux mètres et demi de hauteur et moins de huit mètres de longueur. Seule une des branches de cette croix affiche de plus respectables dimensions : d'une vingtaine de mètres de long, elle est destinée à accueillir les blessés quand ils ne nécessitent plus de soins spécifiques ou d'urgence.
Dans le fracas
Dehors règne une indescriptible agitation : des hélicoptères décollent et atterrissent dans un fracas inouï de pales et de rotors, embarquant ou débarquant des combattants blessés, allongés sur des civières et abondamment recouverts de bandages rougis de sang factice.
Des avions chasseurs et bombardiers survolent régulièrement la scène à très basse altitude, ajoutant au vacarme déjà insupportable. Un peu plus loin, un avion de transport de troupes débarque une trentaine de personnes approximativement vêtues ( « des civils qui fuient les combats », indique l'officier de liaison), qui courent chercher un improbable abri sous une tente de fortune.
Une ambiance de désolation, de fin du monde, qui tranche avec l'apparente décontraction du personnel militaire présent aux abords de l'hôpital : une cinquantaine d'hommes et de femmes en tenue de combat, de toute nationalité, qui assistent à la scène plus qu'ils n'y participent ; beaucoup ont des bouchons de mousse dans les oreilles. Singulier spectacle que ce « champ de bataille » où les blessés paraissent plus vrai que nature et où les combattants ont l'air de figurants !
200 blessés en 24 heures
Au cours de ces manuvres, l'armée de l'air a à cur de montrer qu'elle est capable de faire face aux conséquences médicales d'un conflit armé et que, pour ce faire, elle dispose de moyens. L'hôpital militaire en est un : capable de « traiter » jusqu'à 200 blessés en 24 heures, cet hôpital de toile, avec tout son équipement, peut être acheminé à proximité du « théâtre d'opérations » par un seul avion, par exemple du type Antonov. Son déploiement peut s'effectuer en huit heures avec l'aide de quinze personnes. « Cet hôpital est de conception hollandaise et, en cas de conflit impliquant des pays membres de l'OTAN, la Hollande pourrait en déployer un certain nombredu même type », précise le major Olaf De Vries, médecin militaire hollandais qui participe aux manuvres.
De fait, beaucoup de pays se sont spécialisés en prévision d'un conflit international impliquant les forces de l'OTAN, et la Hollande semble avoir notamment choisi la voie des secours aux blessés. Cet hôpital est une unité capable de distribuer les premiers soins et de stabiliser les blessés graves avant qu'ils ne soient aiguillés vers d'autres structures. Il est également modulable, ce qui lui permet de s'agrandir en fonction de la demande de soins. « Nos hôpitaux militaires de campagne sont comparables à un hôpital général. Ils disposent parfois d'un bloc opératoire, mais toujours de médecins et d'infirmiers, c'est un poste médical avancé », ajoute le major de Vries.
Au centre de la croix formée par les quatre branches de l'hôpital se situent le laboratoire d'analyses et la pharmacie : on peut y trouver les médicaments de première urgence et des appareils d'analyses, dont un Reflotron, pour les analyses de base (bilan hépatique ou lipidique, glycémie, dosage de l'hémoglobine, etc.) ; on y trouve aussi des armoires réfrigérées pour la conservation du sang.
Dans une des branches courtes est installée la salle d'urgences : un blessé y est allongé sur une civière, plus précisément un mannequin de plastique, sans doute déposé là pour simuler des actes de première urgence. Dans cette « Emergency room » se trouvent des défibrillateurs, des masques à oxygène, des systèmes d'aide à la respiration et des aspirateurs. Au sol, comme dans tout le reste de l'hôpital, un simple revêtement de plastique vert, si fin qu'on voit le relief du sol. Une autre branche de l'hôpital est occupée par un centre de télécommunications, permettant de rester en contact avec le commandement, les avions et les hélicoptères transportant les blessés, ainsi qu'avec les hôpitaux « en dur » vers lesquels seront ensuite acheminés les blessés. Enfin, la plus longue aile de l'hôpital dispose d'une cinquantaine de lits (ou de civières) où reposent les blessés déjà stabilisés, en attente d'évacuation.
Quant au personnel fixe de cet étrange mais bien réel hôpital, le major de Vries l'estime à trois médecins et à environ huit infirmiers. Dehors règne toujours la même ambiance de fin du monde ; mais, à proximité de l'hôpital, un blessé s'agite sur sa civière posée à même le sol ; il paraît bien mal en point, couvert de bandages rougis, mais, tout à coup, le voilà qui se redresse, se lève et se dirige en courant vers les toilettes de campagne... La vie reprend ses droits.
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