UN GÈNE pourrait protéger les enfants du paludisme materno-foetal in utero, selon un travail publié dans les « Proceedings » de l'Académie des sciences américaine par l'équipe du Dr Atis Muehlenbachs (Tanzanie). Cette affection due à Plasmodium falciparum est l'une des principales causes de décès chez les enfants à naître en Afrique subsaharienne.
Lorsque le parasite infecte les érythrocytes maternels, il se produit une activation de certains facteurs d'adhérence tels que le chondroïtine sulfate A, ce qui induit une séquestration des globules rouges dans la partie maternelle du placenta. Ces phénomènes sont significativement plus fréquents chez les nullipares que chez les multipares. Pour l'équipe du Dr Muelhenbachs, ces dernières ont développé des anticorps antichondroïtine sulfate A, ce qui permet un passage normal des érythrocytes au sein de la barrière placentaire. Mais il est aussi possible que la résistance de l'enfant à l'infection soit liée à des modifications du génome foetal. Pendant la phase d'infection materno-foetale, les trophoblastes du placenta produisent de la kinase soluble (fms-like tyrosine kinase 1 ; sFlt1) qui agit comme un récepteur soluble au VEGF et un inhibiteur de l'angiogenèse associée aux phénomènes de prééclampsie. L'équipe tanzanienne a procédé à un génotypage de la cassette 3'UTR de la fms-related tyrosine kinase 1 dans des couples mère-enfant atteints de formes diverses de paludisme materno-foetal (239 enfants de 235 mères nullipares et 359 enfants de 330 mères multipares). Globalement, 19 % des nullipares ont été atteintes contre 6 % des multipares.
Allèle court et allèle long.
Au niveau de la région étudiée, les auteurs ont découvert qu'il existait deux sortes de polymorphisme, l'un contenant moins de 27 répétitions (allèle court) l'autre, plus long, allant jusqu'à 34 répétitions (allèle long). Chez le singe Rhésus comme chez la souris, le nombre des répétition est compris entre dix et vingt et l'allèle similaire du chimpanzé en contient vingt. Il semblerait donc que cette évolution ait eu lieu après la différenciation de l'espèce humaine. La répétition des nucléotides induit la formation de boucles qui peuvent altérer la structure secondaire de l'ARN et la stabilité de l'ARNm.
Dans l'ensemble de la population, l'incidence de l'existence de l'allèle court était similaire chez les mères et les enfants. Mais, pour les nullipares, le nombre des enfants homozygotes pour l'allèle court était plus faible que pour les mères multipares. Il semblerait aussi qu'il existe une variation saisonnière dans la distribution du type d'allèle puisque le nombre des enfants homozygotes pour l'allèle court nés entre mai et septembre (saison du paludisme) était plus faible qu'aux autres moments de l'année. Chez les enfants porteurs de l'allèle long nés durant la saison du paludisme, le poids de naissance était généralement plus faible et il existait une expression des gènes de l'inflammation au niveau du placenta. Pour les auteurs, «ces résultats indiquent que FLT1 subit une sélection naturelle dans les régions d'endémie palustre et que l'évolution humaine au parasite peut influer sur les relations génétiques materno-foetales».
« Proc Natl Acad Sci USA », édition avancée en ligne.
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