UN FACTEUR génétique de susceptibilité à la sclérodermie systémique, ou sclérose généralisée, vient d'être identifié par l'équipe du Pr David Abraham (département de rhumatologie, University College London).
Pour l'équipe, le gène codant pour le facteur de croissance du tissu conjonctif (CTGF, CCN2) faisait un parfait candidat. Pour plusieurs raisons.
La protéine CTGF, qui est présente durant la cicatrisation des plaies, est surexprimée lors d'une fibrose ainsi que chez les patients atteints de sclérodermie.
Cette protéine jouerait un rôle dans la prolifération des fibroblastes, la production de matrice extracellulaire et la formation du tissu d'adhésion des processus concernés dans la sclérodermie.
Enfin, une étude génomique d'association menée au sein d'une population Choctaw américano-indienne à haute prévalence de la maladie a permis d'identifier un lien avec une région du chromosome 6q23-27, contenant de nombreux gènes, notamment le gène CTGF.
«En prenant en compte toutes ces observations, nous avons émis l'hypothèse que des variations dans le promoteur du gène CTGF confèrent une susceptibilité à la sclérodermie», notent Fonseca et coll.
Un excès du génotype GG.
Les chercheurs se sont penchés sur une variation communément trouvée dans le promoteur du gène, le polymorphisme G-945C. Ils l'ont génotypé dans un premier groupe cas-témoins (200 patients et 188 té- moins) et ont trouvé un excès du génotype GG dans le groupe malade (27 % contre 18 % des témoins). Cette association a ensuite été confirmée dans un second groupe cas-témoins (300 patients, 312 témoins). Une analyse du groupe combiné montre que l'homozygotie pour l'allèle G est significativement associée à la sclérodermie (OR = 2,2), à la présence d'anticorps antitopo-isomérase I (OR = 3,3) et à la fibrose pulmonaire (OR = 3,1). «Nous avons montré que les individus porteurs de ce variant génique sont à risque accru de développer la sclérodermie systémique. Ce variant est encore plus fréquent chez certains patients qui ont une fibrose pulmonaire, au cours de laquelle le tissu cicatriciel est déposé au sein des poumons. Il est aussi plus fréquent chez des patients porteurs d'autoanticorps spécifiques», explique au « Quotidien » le Pr David Abraham.
«Cette découverte signifie que les individus porteurs de ce variant génétique sont à risque accru de développer une sclérodermie systémique, en particulier celle qui affecte les poumons.»
Des taux beaucoup plus élevés de ce facteur.
«Nous avons aussi montré que le variant génétique associé à la sclérodermie systémique a perdu la capacité de réguler correctement la production de CTGF. Cela aboutit à des taux beaucoup plus élevés de ce facteur induisant la cicatrisation. Ces taux plus élevés pourraient, dans certaines circonstances, contribuer au développement de la fibrose dans le tissu conjonctif des patients atteints de sclérodermie.»
Les chercheurs montrent que l'allèle C en position 945 est crucial pour la suppression de la transcription du gène CTGF (une suppression médiée par la fixation du Sp3). L'allèle C offrirait ainsi une protection contre la surexpression du gène CTGF dans les troubles comme la sclérodermie. L'allèle G est lié à une activation transcriptionnelle du gène CTGF.
«Nos résultats concordent avec des observations rapportant des concentrations élevées de CTGF dans plusieurs maladies humaines très fréquentes qui sont caractérisées par une cicatrisation excessive et une fibrose, notamment la cirrhose du foie, la néphropathie diabétique, les maladies cardiaques et cardio-vasculaires, ainsi que l'athérosclérose», observe le Pr Abraham.
«Cette étude représente une avancée importante pour comprendre les mécanismes qui sous-tendent la sclérodermie systémique et elle pourrait également avoir des implications pour d'autres maladies fibreuses communes», souligne-t-il.
« New England Journal of Medicine », 20 septembre 2007, p. 1210, Fonseca et coll..
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