C'EST UN SUCCÈS pour Jean-François Dehecq.
Mais pour gagner et convaincre le conseil de surveillance d'Aventis de répondre favorablement à ses nouvelles propositions de fusion, le patron de Sanofi-Synthélabo a dû mettre le prix : un enchérissement de son offre initiale de 6,7 milliards d'euros, à 55 milliards d'euros, et une répartition à parité entre Sanofi et Aventis des postes de direction dans la nouvelle société, Sanofi-Aventis. Jean-François Dehecq en assumera la présidence tandis que Igor Landau, le patron d'Aventis, qui a combattu sans relâche cette OPA, quittera sans doute la société.
Le nouveau groupe devrait réaliser en année pleine un chiffre d'affaires légèrement supérieur à 25 milliards d'euros, et deviendra la première société pharmaceutique européenne et la troisième mondiale, après l'américain Pfizer et anglais GlaxoSmithKline.
Cependant, la bataille acharnée qui s'est déroulée ces trois derniers mois laissera des traces qui pourraient compliquer la collaboration entre les responsables des deux groupes. Risques que l'on cherche à minimiser des deux côtés.
Inquiétudes allemandes.
Si le gouvernement français qui a tout fait, et même plus, pour que cette fusion réussisse se félicite de la fin heureuse de l'histoire, on est plus circonspect de l'autre côté du Rhin où l'on craint des conséquences sur l'emploi. Le gouvernement de Gerhard Schröder a indiqué, dès lundi, qu'il allait « observer de près la suite de la procédure ». Son porte-parole a même tenu à préciser que Berlin serait attentif au maintien des 9 000 emplois d'Aventis en Allemagne. Et les syndicats, tant du coté français que du côté allemand, s'inquiètent des restructurations qu'entraînerait la fusion. Jean-François Dehecq a tenu à préciser, lors de la conférence de presse qui a suivi l'annonce de la fusion, que « les problèmes de restructuration seraient limités ». Cela n'a guère rassuré les salariés d'Aventis, bien que le président de la nouvelle entité ait tenu à affirmer que cette opération « avait été aussi menée dans l'intérêt des salariés ». La maison Sanofi, a-t-il dit, a besoin des gens d'Aventis, parce que nous sommes une société qui a, en permanence, besoin d'embaucher ».
Le gouvernement allemand est également fort soucieux du maintien des activités de recherche d'Aventis sur son sol. « C'est une grande chance d'avoir un centre important de recherche, comme celui de Francfort », a déclaré Jean-François Dehecq, pour rassurer ses interlocuteurs allemands.
On se souvient que, lors de l'entretien publié il y a un peu plus de deux mois par « le Quotidien » (voir notre édition du 20 février), le président de Sanofi avait indiqué qu'il se réjouissait qu'un centre de recherche existe en Allemagne. « Nous le conserverons évidemment », avait même affirmé le patron de la firme française.
Du côté allemand, on reste circonspect : on craint à l'évidence que le centre de Francfort ne fasse les frais de l'OPA de Sanofi.
Pour le groupe nouvellement formé, la recherche restera une priorité. Jean-François Dehecq l'a souvent indiqué dans ses déclarations. Il est vrai que c'est aujourd'hui'hui le « nerf de la guerre » de l'industrie pharmaceutique. Avec un budget de R&D qui devrait approcher les 5 milliards d'euros (soit environ environ 20 % du chiffre d'affaires), la nouvelle firme pense avoir le potentiel pour trouver de nouveaux médicaments et surtout ces fameux « blockbusters » qui réalisent le milliard de dollars ou d'euros de chiffre d'affaires par an.
« Je persiste à dire, avait encore expliqué dans « le Quotidien », Jean-François Dehecq, que cette fusion sera une chance pour tout le monde. C'est un beau projet pour la France, un beau projet pour l'Europe, qui s'inscrit dans une perspective de croissance et de développement. »
Reste à le montrer réellement.
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