« Les Français comprennent que lorsqu’ils sont face à un problème important, ils doivent appeler le 15 mais ils ne le font pas assez vite et parfois hésitent » observe le Pr Pierre Carli, directeur du Samu de Paris et président du Conseil national de l’urgence hospitalière. Pourtant le temps est souvent précieux. Les AVC (145 000 cas par an) font une victime toutes les 4 minutes, les premiers signes n’étant pas toujours détectés. La mortalité liée à un infarctus (130 000 cas par an) pourrait être diminuée de moitié si une prise en charge était amorcée en moins d’une heure.
En cas d’urgence médicale, seulement 56 % des Français composent le 15, révèle une étude Maaf-Ifop*, présentée ce mardi. Quelque 19 % appellent leur médecin traitant, 13 % prennent un taxi ou conduisent le malade à l’hôpital, 7 % téléphonent à une association de permanence de soins, 4 %, se tournent vers un autre numéro d’urgence, et 1 % cherche un spécialiste.
La mission de conseil peu évoquée
Les Français connaissent mal les missions du Samu. Certes, plus des trois quarts y ont recours lorsqu’une personne a brutalement des difficultés à parler ou à bouger une jambe (77 %), est prise de convulsions (75 %), perd connaissance ou ressent une violente douleur dans la poitrine depuis plus de vingt minutes (75 %), ou subit un traumatisme physique violent (71 %) ou une brûlure étendue (53 %). Et encore : ils ne sont que 55 % à appeler le Samu pour une urgence de nuit.
Surtout ils semblent ignorer la place du Samu dans la permanence des soins : seulement 23 % des Français composeraient le 15 pour un enfant ayant une fièvre supérieure à 39 degrés depuis 24 heures, et 15 % en cas de maux de ventre et de diarrhée.
Interrogés sur les missions du 15, les Français citent en premier l’intervention d’une équipe de réanimation (79 %), devant la gestion des urgences à l’extérieur de l’hôpital (57 %), la coordination des interventions de secours médical (51 %). Le conseil médical n’est évoqué que par 24 % d’entre eux, derrière l’envoi d’un généraliste à domicile (26 %).
« Grave pas grave » ?
« Il est important que les citoyens disposent d’une boussole pour mieux appeler le 15 et se mettre dans un bon parcours de soins ; pour savoir s’il s’agit d’une urgence ou si un conseil médical suffit » explique le Pr Carli.
Le Samu de Paris a apporté son expertise à l’élaboration d’une nouvelle application pour mobile (Apple iOS et Android), « Grave pas grave », lancée ce mardi par la Maaf.
En quelques clics, l’application permet d’analyser plus de 100 symptômes à partir d’une base de 1 800 questions. En cas d’urgence, elle propose à l’utilisateur d’appeler le 15. Sinon, elle suggère de contacter le médecin traitant, dont les coordonnées auront pu être rentrées dans le téléphone par son propriétaire, ou un autre médecin à proximité, grâce à la géolocalisation (55 000 sont recensés sur le territoire métropolitain et les départements d’Outre mer). Parallèlement, l’application peut guider la personne à administrer les premiers gestes d’urgence, par des instructions vocales doublées d’animations en 3D.
Limiter la panique
« Il ne s’agit pas de donner un diagnostic, ni de se substituer à un médecin, mais de mieux appréhender la gravité de la situation », explique le Pr Carli, qui y voit aussi un rôle pédagogique. « Tout le monde joue avec son portable aujourd’hui. L’application livre des définitions, décrit les symptômes, ce qui permet au patient de mieux se faire comprendre par le 15 », ajoute-t-il. « Elle gère aussi la dimension émotive et limite la panique » enchérit le Dr Pascal Cassan, urgentiste, directeur du Centre mondial de référence des premiers secours.
L’application est téléchargeable gratuitement jusqu’au 2 février, puis coûtera 3,59 euros (mais reste gratuite pour les assurés Maaf santé). « C’est un signe fort de notre engagement en faveur de la santé publique et un effort pour améliorer l’efficacité des prises en charge et éliminer les situations lourdes, coûteuses pour les assureurs et le système de soin » a expliqué Joaquim Pinheiro, directeur général de Maaf Assurance.
*L’étude a été réalisée auprès d’un échantillon de 1 003 personnes majeures, construit selon la méthode des quotas. Les interviews ont eu lieu du 8 au 10 octobre par questionnaire auto-administré en ligne.
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