C’EST EN VOYANT à la télévision un reportage intitulé « Le tourisme de la mort » que le documentariste Fernand Melgar découvre l’association Exit. L’article 105 du code pénal helvétique ne réprime l’aide au suicide que si elle a un motif égoïste, d’où la possibilité de le faire s’il s’agit de soulager des souffrances intolérables. Créée en Angleterre dans les années 1930, l’association Exit a essaimé un peu partout dans le monde. En Suisse, où elle existe depuis 1980, elle regroupe quelques dizaines de milliers de membres.
Quand Fernand Melgar décide de faire un film sur le sujet, il prend contact avec Exit. L’antenne de Zurich refuse, celle de Genève (Suisse romande) accepte par le biais de son président, le Dr Jérôme Sobel. «Nous n’avons rien à cacher, c’est carte blanche», dit-il. Le Dr Sobel, qui préside Exit Suisse romande depuis 2000, est le premier à avoir déclaré un suicide assisté en tant que membre d’Exit. Il a été interrogé par la police, puis, il y a eu non-lieu, puisqu’il n’avait aucun bénéfice à la mort de la personne qu’il avait aidé.
Comme on le voit dans le film, les demandes d’« autodélivrance » doivent répondre à des critères stricts : le malade a gardé son discernement, la demande est répétée dans le temps, il s’agit d’une maladie incurable (pas une maladie psychique) qui occasionne des souffrances répétées. Et la « potion » létale est toujours prise en présence de l’accompagnateur.
Ce qu’on voit surtout dans le film – Melgar a passé deux ans avec Exit –, c’est la compassion et la patience des bénévoles, leur écoute qui est déjà pour celui qui souffre un soulagement.
« Exit » s’ouvre et se termine avec Micheline, qui n’en peut plus. Dans la première scène, le Dr Sobel discute avec elle de ce qu’elle désire. Dans la dernière, il lui donne la potion, non sans s’être assuré, à plusieurs reprises, qu’elle n’a pas changé d’avis. Micheline a dit au réalisateur : «Vous pouvez être là durant mes derniers moments.» Melgar la filme de dos, la main du médecin la soutenant, le visage de son amie plein de larmes.
Alors que les demandes se multiplient, les bénévoles ne sont pas assez nombreux. Ce n’est pas un travail qu’on fait à la chaîne. Après une assistance au suicide, il faut le temps de se remettre. Et puis, comme disent deux des bénévoles, il faut avoir réglé son problème avec la mort, sa propre mort.
Dans le film, la souffrance, et il y en a, s’exprime sans colère. Un homme s’explique devant sa mère, qui acquiesce : «Je veux faire les choses en douceur, en toute sérénité. Je souffre tellement.» Il pourrait se suicider mais ne veut pas le faire seul. «Pourquoi est-ce que je me cacherais? Il faut que cela se fasse de façon ouverte, libre, et en accord avec tout le monde.»
Ceux qui se font aider sont chez eux, entourés de proches ou d’amis qui sont sur la même longueur d’onde. C’est presque trop doux pour être vrai. Dans le dossier sur l’euthanasie, le film est en tout cas une pièce supplémentaire, même si l’aide d’Exit ne peut résoudre tous les problèmes. Choisir sa mort est une liberté à conquérir par beaucoup, c’est pourquoi le film est au programme du Festival des droits de l’homme.
* Cinéma Action Christine Odéon, du 22 au 28 mars ; « Exit » sera présenté en avant-première le dimanche 26 mars, à 20 h 30. Une discussion avec le réalisateur s’en suivra.
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