LE Pr VALLANCIEN et les Drs Cuq et Aubart dressent un constat désastreux de la situation de la chirurgie française. «L'organisation et les modes de rémunération actuel des chirurgiens, tant dans la pratique publique que dans la pratique libérale, ne correspondent plus aux impératifs d'une pratique chirurgicale de qualité accessible à tous sur le territoire.»
Selon les trois chirurgiens, la non-réévaluation du tarif des actes depuis quinze ans et la mise en place en 2005 d'une CCAM «rémunérant mal les actes chirurgicaux» ont aggravé la crise.
D'autant que le salariat et le paiement à l'acte montrent leurs limites. «La rémunération publique exclusive à l'ancienneté rémunère plutôt une activité moyenne pour un chirurgien moyen travaillant dans une institution moyenne.»
Tandis que le paiement à l'acte récompense une activité quantifiée, mais «expose à la multiplication des actes, voire à des pratiques de contournements». La persistance des deux modes de rémunération est coûteuse et entretient la fracture chirurgicale. L'exercice public est de plus en plus limité à la chirurgie d'urgence et la chirurgie privée, tournée vers l'activité programmée, constatent les rapporteurs. «Or la qualité globale du système ne peut se satisfaire de cette répartition.»«Le découplage des rémunérations chirurgicales avec leur niveau attendu a largement participé au développement d'effets pervers», notent les trois auteurs du rapport. Ainsi, jusqu'à 20 % des postes de chirurgien hospitalier ne seraient pas occupés dans certaines régions. Des établissements publics multiplieraient les contournements pour augmenter les revenus et ainsi maintenir leurs chirurgiens en place ou en attirer d'autres. «Gardes et astreintes payées non réalisées, primes diverses ne correspondant pas au travail fourni, aide au logement.» Les auteurs reconnaissent relever «parfois des abus d'utilisation du secteur privé hospitalier, notamment dans certains CHU», activité qui dépasse les 20 % réglementaires de leur temps de travail. De même, les auteurs du rapport observent «une tendance à la substitution des jeunes chirurgiens, chefs de clinique assistants, par des chirurgiens à diplôme étranger qui parfois sont de très bon niveau, mais qui, de par leur formation parfois incertaine, assument dans certains cas des responsabilités qui les dépassent». Dans le secteur libéral, la situation n'est pas meilleure. Les rapporteurs dressent un tableau noir de la situation. Dépassements d'honoraires non prévus par la convention pour les chirugiens de secteur I, «augmentation du niveau des honoraires sans lien qualitatif établi» pour certains praticiens de secteur II, «demandes de dessous de table», absence d'affichage de tarifs… Selon les rapporteurs, «ces dérives traduisent l'inadéquation entre la charge et la responsabilité de l'exercice chirurgical et le niveau des revenus». Selon les trois auteurs, les accords d'août 2004, censés résoudre les problèmes de la chirurgie, n'ont «pas été, pour l'essentiel, respectés».
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