DRÔLE DE PARADOXE. À l’heure où la France réfléchit aux moyens d’endiguer un déficit abyssal (30 milliards d’euros attendus l’an prochain) avec une plus grande contribution des assurés, les États-Unis et la Chine s’engagent dans une réforme de leur système de protection sociale solidaire. L’Union des caisses nationales de sécurité sociale (UCANNS) s’est plongée au cur des systèmes de santé des deux premières puissances mondiales à l’occasion des premières rencontres du régime général qu’elle organisait à l’Institut du monde arabe. « Ce sujet est violemment polémique aux États-Unis, affirme Julien Darmon, professeur associé à Science-Po. L’opinion républicaine a du mal à accepter la réforme. Le projet de réforme Obama est passé avec seulement 5 voix de majorité lors de son examen au Sénat ».
Le chantier est immense mais considéré comme indispensable dans un pays où les dépenses de santé annuelles représentent 2 400 milliards de dollars soit 18 % du PIB et où 46,3 millions de personnes ne disposent d’aucune assurance. Aujourd’hui, plusieurs axes de réformes sont annoncés, commente Julien Darmon : rendre obligatoire le principe d’assurance-maladie ; étendre Medicaid, le système d’assurance de santé géré par le gouvernement américain et destiné aux personnes pauvres ; faire passer le financement du système des entreprises aux États ; mettre en place de chèques santé pour permettre aux Américains de s’assurer auprès de compagnies privées. Les débats seront longs et compliqués. « Seulement 60 % des Américains pensent que les pouvoirs publics sont responsables de la couverture des besoins basiques de santé de la population », indique Julien Darmon. D’autant que cette réforme aura un coût difficile à assumer, estimé à 1 000 milliards de dollars supplémentaires sur dix ans. « Les Américains devront faire 400 milliards de dollars d’économie dans Medicare et trouver de nouvelles recettes fiscales », conclut le professeur de Sciences-Po.
Le modèle français des Chinois.
Autre grande puissance à vouloir réformer son système de protection sociale : la Chine. Avec 1,3 milliard d’habitants et d’innombrables structures administratives – 22 régions, des régions spéciales et autonomes, 330 préfectures et 2 807 districts – le pays du milieu pourtant en plein boom économique, est confronté à de violentes grèves. « La volonté du gouvernement chinois est de trouver les moyens de rétablir la stabilité sociale, commente Claude Bigot, directeur de l’École nationale supérieure de sécurité sociale (ENSSS). Les dirigeants ont fait du benchmark dans tous les pays du monde et ils ont sélectionné des pays, dont la France, avec lesquels ils ont continué de collaborer pour réformer leur protection sociale ». L’État encourage le système mutualiste pour permettre à la population de se prendre en charge elle-même. L’objectif du gouvernement chinois est de couvrir toute la population d’ici à 2020, de réformer le système hospitalier et de revoir la législation. Avec 300 000 institutions de santé, 20 000 hôpitaux et 40 000 centres de santé, la distribution des soins demeure un problème, explique Claude Bigot. « La réforme en cours devrait aboutir à une offre décentralisée des soins », assure-t-il.
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