Plusieurs fois par jour
En CM2, son niveau scolaire est moyen, avec des résultats corrects, plutôt en baisse ces derniers temps. Il est le quatrième enfant d'une fratrie de sept. La famille est d'origine malienne et sans antécédent particulier. Les parents décrivent des épisodes brefs pendant lesquels Brahim arrête de parler ou de bouger, puis reprend son activité là où il s'était arrêté. Cela se répète plusieurs fois par jour. S'associent à ces épisodes des secousses de la tête pendant quelques secondes. Brahim ne se souvient de rien d'anormal quand on lui raconte ses « crises ». L'examen clinique est normal.
Diagnostic probable
Il s'agit probablement d'absence ou petit mal. Un électroencéphalogramme (EEG) est effectué et montre une absence électroclinique déclenchée par l'hyperpnée, avec un tracé de fond correct posant le diagnostic d'absence. Il est traité par valproate de sodium, et les absences disparaissent rapidement. Malheureusement, il mange beaucoup plus sous traitement, prend du poids et se plaint de tremblement des mains. Il arrête le traitement un an après son instauration et refait de nombreuses absences ; les résultats scolaires sont mauvais et une réorientation scolaire en classe spécialisée est discutée. Du fait de la tolérance médiocre du valproate, un traitement par éthosuximide est proposé. Seule la forme sirop existe, et Brahim doit en prendre 2 cuillerées deux fois par jour. Il s'améliore de nouveau sous traitement et les résultats scolaires le prouvent.
Il se brûle la face
Malheureusement encore, cette fois, Brahim n'aime pas le goût du sirop et suit de moins en moins le traitement. Le 14 février, au réveil, après avoir chauffé son lait au micro-onde, il fait une absence et se brûle la face au 2e degré. Il restera quinze jours dans un service de grands brûlés. Depuis sa sortie, il suit son traitement régulièrement, et pour, on l'espère, les deux ans à venir…
Absence « petit mal »
L'absence est un trouble transitoire de la conscience. L'absence typique ou absence pure ou petit mal-absence a des caractéristiques cliniques et électroencéphalographiques. Les enfants sont normaux et les absences se déclenchent spontanément. Il faut savoir penser à ce diagnostic. Cette épilepsie n'est pas très fréquente (moins de 10 % des causes d'épilepsie de l'enfance), mais la connaître permet de faire un diagnostic facilement et rapidement, avec un bénéfice majeur pour l'enfant et une réelle satisfaction thérapeutique pour le médecin.
Elle concerne la tranche d'âge 3-10 ans, avec un pic entre 4 et 6 ans. L'absence consiste en une brève et brutale suspension de la conscience. L'enfant est comme arraché, déconnecté du monde, immobile, figé, les yeux fixes dans le vague. L'épisode dure 5 à 10 secondes, parfois jusqu'à 25 secondes au maximum. L'amnésie est totale et l'enfant reprend ses activités après la crise sans confusion postcritique. L'absence est en général un phénomène isolé, mais elle peut s'accompagner de phénomènes moteurs plus ou moins importants : rejet tonique de la tête en arrière, perte de tonus provoquant une brève chute de la tête en avant ou une chute de l'objet tenu en main. A l'école, l'enfant sera qualifié d'étourdi et de maladroit. Parfois, l'enfant présente des secousses des membres ou des paupières, des mouvements des lèvres ou de mastication, des mouvements de déglutition. On peut constater aussi une pâleur ou une rougeur de la face. Ces phénomènes arrivent toujours brusquement et sans confusion postcritique, ce qui les différencient d'autres épilepsies.
EEG
Seul l'EEG est indispensable au diagnostic. Aucun autre examen n'est utile. L'EEG est caractéristique, avec constatation de bouffées bilatérales synchrones de pointes-ondes à trois cycles par seconde à début et fin brusques, avec, dans l'intervalle, un rythme de base normal. L'hyperventilation (hyperpnée pendant une à trois minutes) favorise de façon caractéristique l'apparition de ces absences. Cette hyperventilation est différente de celle déclenchée par l'effort physique, qui, d'ailleurs, ne provoque pas l'apparition des absences. C'est au contraire l'inactivité physique et intellectuelle qui est favorable à sa réapparition. La fréquence de ces absences est importante dans la journée. Leur rareté doit faire douter du diagnostic. Des crises généralisées tonico-cloniques peuvent s'ajouter aux absences, surtout après l'âge de 10 ans ou lorsque le petit mal a débuté tardivement.
L'évolution de l'absence typique est généralement favorable et les crises ont tendance à disparaître à l'adolescence. En attendant, l'enfant sera traité en première intention par valproate de sodium à la dose de 30 à 50 mg/kg/jour en deux prises, à continuer pendant deux ans. En cas d'échec, un traitement par éthosuximide est donné en deux prises à la dose de 20 à 30 mg/kg/jour. La lamotrigine peut également être utilisée.
L'arrêt du traitement peut en général être possible après deux années sans crise ; l'EEG ne doit pas être recontrôlé.
Faire mimer par les parents
Un enfant très rêveur avec difficultés scolaires peut en fait être atteint d'un petit mal : y penser.
Faire mimer les épisodes d'absence par les parents est souvent éloquent.
Le diagnostic est posé sur l'EEG, examen nécessaire et suffisant.
Le traitement est bien codifié et facile pendant deux ans en moyenne, l'observance plus compliquée ; en cas de problème, les absences reviennent vite. L'évoquer ne coûte qu'un EEG, mais passer à côté coûte cher.
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