« Nous ne trouvons même pas le temps de vivre, comment peut-on trouver celui de mourir », s'exclame une voix off, alors qu'à l'écran, des voitures passent en coup de vent devant le panneau de la maison médicale Jeanne-Garnier, le plus grand centre européen de soins palliatifs, situé à Paris, dans le 15e arrondissement.
A l'ombre des immeubles parisiens, le bâtiment ne se remarque pas. Aussi invisible que les pensionnaires qui y logent : des malades allant au bout de leur vie dans des unités de soins palliatifs. Seuls ceux qui se donnent la peine de pousser la porte se trouvent confrontés à la mort. L'ambiance n'est pas déprimante : les chambres donnent sur un jardin. On sent le vent qui agite les feuilles, la chaleur du soleil.
Les réalisatrices de ce documentaire, Caroline Tresca et Annie Morillon, ont voulu parler de cette confrontation, de ce moment précédant la mort, qui se compte en jours, en mois ou parfois en années. Elles l'ont fait « en respectant le rythme ralenti des gens en fin de vie », par le biais des bénévoles, ces personnes venues de nulle part qui trouvent leur place entre le corps médical et le cercle familial. Quelque quatre-vingts lits pour 115 bénévoles.
La recherche d'une présence
« Je cherche la présence », explique cet ancien médecin généraliste qui attend, se prépare depuis cinq ans à franchir la barrière inéluctable. « Je trouverais ridicule que l'histoire s'arrête comme ça », confie-t-il à une bénévole. Ce qu'il redoute, c'est l'agonie, la souffrance. La mort ne lui fait pas peur. Léon, dont le corps est meurtri par cinq cancers, préfère attendre chez lui une mort qu'il considère comme un passage, comme la poursuite de la vie. Stéphane, 28 ans, lui rend visite régulièrement. « Je veux amener la personne dans la sérénité jusqu'à son ultime départ, dit-il. Nous sommes 6 milliards d'individus sur Terre, on n'a pas le droit de laisser les gens mourir seuls. Et pourquoi faut-il cacher la mort à l'hôpital ? Pour que ça se passe le plus vite possible ? »
Attendre, c'est aussi ce que fait cette vieille dame, admise à Jeanne-Garnier il y a une quinzaine de jours. « Y a-t-il donc tant de monde, là-haut, pour qu'en bas l'attente soit si longue ? », demande t-elle. Attentive, sa fille, assise à côté d'elle, admire la présence et la disponibilité des bénévoles. Mais devant les mains jointes de cette vieille dame qui ne supporte pas la maladie, injonction à celui d'en haut, on s'interroge : qu'aurait-elle décidé si l'euthanasie était une pratique légale en France ?
Au fil du documentaire, on comprend peu à peu pourquoi ces bénévoles choisissent de passer leur journée à sourire, parler, écouter, toucher une main, comment ils peuvent s'attacher « tout en gardant (leurs) distances ». Les bénévoles s'approchent de la mort, l'un pour sentir une « dynamique d'amour », l'autre pour « apprendre à vivre ». « J'ai la foi, précise Marie-Sophie, 25 ans. C'est plus spirituel que religieux. C'est une quête de simplicité. »
Une simplicité recherchée par les réalisatrices qui ont « essayé de regarder la mort en face », en filmant ces personnes « droit dans les yeux et en toute humanité pour partager autant que faire se peut leurs dernières heures ». Mais leur démarche, qui se traduit par des plans serrés sur les visages défaits, est parfois trop insistante.
* Samedi 2 novembre, 13 h 50.
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