Toulouse, 12-15 avril 2006
LE SIGNE cardinal et inaugural de la narcolepsie est une somnolence diurne excessive. Il s’agit classiquement d’accès de sommeil diurnes, durant de 10 à 15 minutes en moyenne, survenant n’importe où et n’importe quand. Ces épisodes se produisent plusieurs fois par jour et sont restaurateurs d’un éveil normal. Peut s’y associer, souvent dans les années suivant le début de la somnolence diurne, une cataplexie, pathognomonique de la maladie. Ce sont des épisodes de brusque relâchement du tonus musculaire typiquement déclenchés par le rire (ou une autre émotion positive : plaisanterie, colère, excitation, surprise, etc.). Ces crises peuvent être rarement généralisées, entraînant la chute. Le plus souvent les épisodes sont limités à quelques muscles (tête, genoux…) rendant le diagnostic difficile rétrospectivement. Il n’y a jamais de perte de conscience. Leur fréquence est très variable (plusieurs fois par mois ou par an le plus souvent).
D’autres signes sont aussi possibles comme les hallucinations hypnagogiques (au début du sommeil) ou hypnopompiques (après le réveil), volontiers effrayantes et à tonalité auditive. Celles-ci sont fréquemment associées à une paralysie du sommeil au moment de l’endormissement.
Le diagnostic nécessite dans tous les cas un interrogatoire minutieux et non dirigé. Le diagnostic doit aussi pouvoir être évoqué devant un syndrome de résistance des voies aériennes supérieures atypiques. Il existe également des formes symptomatiques (tumeur du troisième ventricule, traumatisme crânien, encéphalite…), d’où l’intérêt de l’imagerie cérébrale. Certaines formes peuvent aussi être associées, notamment à un syndrome d’apnées du sommeil.
L’échelle d’Epworth.
L’évaluation de la somnolence diurne par l’échelle d’Epworth est un outil essentiel au diagnostic. Un score supérieur à 10 permet en effet d’affirmer l’état de somnolence, qui sera confirmé par des examens plus approfondis dans un centre d’exploration du sommeil.
Depuis la parution, en 2005, de la nouvelle classification internationale des troubles du sommeil (Icsd-2), rédigée par l’American Association of Sleep Medicine, les deux formes de narcolepsie sont bien différenciées : les narcolepsies sans cataplexie et celles avec cataplexie. Les explorations complémentaires du trouble du sommeil sont nécessaires pour les premières et recommandées pour les secondes, dont le diagnostic peut théoriquement être porté cliniquement. Un dosage d’hypocrétine (recherche d’un taux < 110 pg/ml) dans le liquide céphalorachidien réalisé par quelques laboratoires est parfois effectué. Si le groupage HLA n’a pas actuellement d’indication diagnostique, il faut cependant savoir que 40 % des patients atteints de narcolepsie et 90 % de ceux ayant une narcolepsie-cataplexie sont porteurs de l’allèle DQB1*0602.
On ne peut cependant que déplorer le fait que, malgré recommandations et examens complémentaires, le diagnostic de narcolepsie demeure encore si tardif : on estime qu’il existe un décalage de dix ans entre le début des troubles et l’identification de la maladie.
L’évolution des troubles est très variable, la cataplexie ayant tendance à diminuer avec l’âge. Hormis les conseils d’hygiène essentiels (horaires de sommeil, éviction de l’alcool), le traitement repose sur le modafinil (Modiodal), un médicament d’exception dont la prescription initiale est réservée aux spécialistes.
D’autres produits peuvent être utiles, comme certains antidépresseurs en cas de cataplexie, voire la ritaline en deuxième intention. Les autres traitements restent du domaine du spécialiste ou de la recherche (IgG polyvalentes humaines, agonistes de l’hypocrétine 1…).
D’après la communication du Pr Jean-Philippe Neau, CHU Poitiers, lors d’un débat organisé par Cephalon.
De 15 000 à 25 000 patients en France
La prévalence de la narcolepsie est très variable selon les pays. Récemment, une vaste enquête épidémiologique transversale de la narcolepsie en France, baptisée Harmonie, a été menée par 70 spécialistes de maladie du sommeil ayant inclus 579 patients. Elle a permis d’estimer entre 15 000 et 25 000 le nombre de patients narcoleptiques en France, parmi lesquels seulement 3 000 suivent un traitement.
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