Le plan budgétaire du gouvernement

Un coup de bambou

Publié le 09/11/2011
Article réservé aux abonnés
1320804657296743_IMG_70968_HR.jpg

1320804657296743_IMG_70968_HR.jpg
Crédit photo : AFP

LE CHEF du gouvernement a évalué à 100 milliards l’effort total que le pays doit fournir entre 2011 et 2016 pour parvenir à un déficit budgétaire nul, soit encore 65 milliards entre 2012 et 2016. Il a annoncé à la fois des réductions de dépenses de l’assurance-maladie, un gel de la revalorisation des prestations sociales en 2012 (elles n’augmenteront que de 1 %, soit la hausse de la croissance), un effort supplémentaire de 500 millions de diminution des dépenses de l’État, l’avancement d’un an, à 2017 (au lieu de 2018), de l’application de l’âge de la retraite à 62 ans (une économie de 4,4 milliards en 4 ans) ; et, du côté des hausses d’impôt, le passage de la TVA à taux réduit de 5,5 à 7 % sauf dans certains cas ; la majoration de 5 % de l’impôt sur les sociétés mais uniquement pour les grands groupes ; les barêmes de l’impôt sur le revenu (IR) et de l’impôt sur la fortune (ISF) seront gelés tandis que les prélèvements libératoires sur les intérêts et les dividendes passent de 19 à 24 % (soit 37,5 % au total, prélèvements sociaux compris). Enfin, pour faire bonne mesure, le gouvernement a aussi gelé les salaires du président de la République et de ses ministres.

QUE DEVIENDRA LE PLAN SI LA DROITE PERD LES ÉLECTIONS ?

Perspective à long terme.

On n’aura aucune difficulté à critiquer ce paquet de mesures : les salaires du président et des ministres auraient pu être diminués, mais c’est anecdotique ; l’augmentation de la TVA risque de coûter des emplois ; la surtaxe déjà décidée pour les foyers disposant de 250 000 euros par part aurait pu être appliquée aux foyers dont les revenus sont de 100 000 euros ou même de 50 000 euros par part ; et, de manière plus générale, le gouvernement court le risque de diminue le pouvoir d’achat et donc d’aggraver le manque de croissance ou même de nous entraîner tous vers la récession. Cet argument s’applique néanmoins aux propositions de ceux qui, dans l’opposition, réclament des hausses d’impôt plus substantielles. M. Fillon a fait remarquer que l’effort de 100 milliards en 5 ans qui est requis implique le triplement de l’impôt sur le revenu ou le doublement de la TVA. On n’en est pas là. Mais il est ridicule de ne pas donner à un paquet de mesures aussi draconiennes le nom de la plus extrême rigueur.

Le pouvoir a offert aux Français une perspective qui s’étend bien au delà des élections de 2012, ce qui laisse penser que, soit la majorité actuelle ne serait pas battue l’année prochaine, soit le plan annoncé lundi serait tellement rationnel que la gauche, en dépit d’une victoire, serait contrainte de continuer à l’appliquer. Bien entendu, François Hollande ou Eva Joly, et à plus forte raison Jean-Luc Mélenchon, se seront empressés de dire entre temps qu’ils ne s’estiment nullement liés par les décisions d’un gouvernement dont les mois, sinon les jours, sont comptés. Qu’ils ont des recettes plus efficaces et plus justes. Qu’ils peuvent revenir à l’équilibre budgétaire en se contentant de taxer les riches. Qu’ils déferont des dispositions inspirées par un mode de pensée et par un système dont les excès ont déjà causé des ravages.

Toutefois, M. Hollande, le plus crédible des candidats à la présidence, refuse de commencer prématurément sa campagne, ce qui le conduit à un relatif immobilisme tandis que la droite gouverne. Il ne s’aventurera guère dans un discours qui décrirait un paquet de mesures opposées différentes dont l’application nécessiterait à la fois vitesse et réformes instantanées. Le temps fiscal n’est pas le temps politique. Les décisions prises par MM. Sarkozy et Fillon vont acquérir une énergie cinétique qu’il sera bien difficile de freiner ou d’inverser. Entre temps, si la France retrouve, par ses sacrifices, la crédibilité que le laxisme passé a largement entamée, un gouvernement nouveau, fût-il de gauche, pourrait ne pas prendre le risque de perdre ce précieux atout.

Mais le message du pouvoir actuel sera-t-il entendu dans les marchés ? Il nous semble que oui, pour deux raisons : d’abord le plan Fillon n’épargne pas ceux qui ont un patrimoine ; ensuite, s’il est vrai qu’il n’abandonne pas la méthode du saupoudrage au détriment de mesures moins nombreuses mais plus vigoureuses, il s’attaque davantage à l’épargne non consommée qu’au pouvoir d’achat, moteur de la consommation.

Il est temps de comprendre, en tout cas, que l’objectif des déficits zéro représente un impératif catégorique. Ce n’est ni pour complaire à l’Allemagne, ni pour séduire les marchés, ni pour circonvenir les agences de notation que nous devons revenir à l’équilibre. C’est parce que, déjà, nous empruntons de l’argent à un point de pourcentage de plus que les Allemands, au moment où les remboursements de la dette deviennent notre premier poste budgétaire, devant l’éducation, devant la défense. Pour briser le cercle vicieux, un seul moyen : dépenser moins, payer plus d’impôts.

RICHARD LISCIA

Source : Le Quotidien du Médecin: 9038