Eczéma de l'enfant
LA PRISE EN CHARGE de la dermatite atopique (DA) était jusqu'à ce jour mal codifiée. Afin d'unifier les pratiques des divers professionnels de santé concernés par la dermatite atopique (DA), dermatologues, pédiatres, allergologues, médecins généralistes..., une conférence de consensus a eu pour objectif de valider ou non certaines pratiques, selon la procédure de l'Anaes. Une partie de ces recommandations a été rendue publique par les Prs Jean-Philippe Lacour (1) et Jean-François Stadler (2), début décembre 2004, lors des Journées dermatologiques de Paris
L'enquête nationale de pratique a, de fait, montré une grande diversité dans les modalités thérapeutiques en fonction des praticiens, en particulier pour le traitement local.
La corticothérapie locale en première intention.
La corticothérapie locale constitue le traitement de première intention en tenant compte de la classification internationale des dermocorticoïdes (DC) : activité très forte (classe IV), forte (III), modérée (II) et faible (I). Les dermocorticoïdes d'activité très forte (IV) sont en effet contre-indiqués chez le nourrisson et le jeune enfant sur le visage, les plis et le siège. Les DC forts (III) doivent être réservés, en cures courtes, aux formes très inflammatoires ou très lichénifées des extrémités. Les dermocorticoïdes modérés (II) sont utilisés sur le visage, les plis et les zones génitales et chez le nourrisson alors que les DC faibles ont peu de place en thérapeutique (sur les paupières et de courte durée).
Au stade aigu, les dermocorticoïdes de forte puissance apparaissent plus rapidement efficaces, mais ceux de classe inférieure sont aussi efficaces en quelques semaines. Les effets latéraux sont directement liés à la puissance de la molécule, à la durée du traitement, à l'occlusion, à la surface traitée, à l'intégrité cutanée et à l'âge de l'enfant, en sachant que les effets secondaires locaux sont rares et que la crainte théorique de ces risques ne doit pas limiter la prescription des DC.
En pratique, les crèmes sont préférées sur les lésions suintantes et les plis, les pommades sur les lésions sèches et lichénifiées ; une application par jour est suffisante et améliore l'observance. Aucune donnée de la littérature ne permet de donner la quantité de DC à ne pas dépasser selon le poids, et l'appréciation de l'efficacité clinique est plus importante que la définition d'une dose théorique. Le schéma thérapeutique préconisé est d'utiliser des DC puissants sur de courtes durées suivis par une période d'interruption avec usage d'émollients jusqu'à la récurrence suivante, mais des applications quotidiennes sont poursuivies si les lésions persistent et jusqu'à leur disparition. Dans les formes légères à modérées, les lésions sont améliorées en une semaine. Une consultation de suivi est nécessaire pour s'en assurer, évaluer la quantité de DC utilisée et, si besoin, réadapter le traitement.
En cas d'échec de cette stratégie, on peut faire appel aux immunomodulateurs locaux. En France, on dispose du tacrolimus dont la prescription nécessite une ordonnance pour médicaments d'exception et est réservée aux dermatologues et aux pédiatres. La prescription d'antihistaminiques oraux à la phase aiguë n'est pas systématique, mais elle peut s'envisager en cas de prurit important et sur des durées courtes. Les antibiotiques locaux ou généraux et les antiseptiques ne sont indiqués qu'en cas de surinfection patente. Quant aux corticoïdes par voie orale ou injectable, ils n'ont pas leur place dans le traitement de la poussée de dermatite atopique.
Les mesures adjuvantes.
L'éducation thérapeutique est une approche nouvelle dans la DA. Son objectif principal est d'améliorer l'alliance thérapeutique entre le soignant, le soigné et son entourage pour permettre une prise en charge optimale, notamment en améliorant la compréhension de la maladie et en luttant contre la corticophobie.
Une prise en charge psychologique spécifique peut parfois être proposée : on connaît en effet les interactions existant entre DA, émotions et psychisme. D'autres pratiques ont été validées, comme l'efficacité des émollients sur la xérose cutanée. A cet égard, le jury souhaite que plusieurs produits commerciaux remboursables ou à faible coût soient mis à la disposition des patients. Pour la toilette, on préconise de donner un bain court quotidien ou une douche, à température tiède, et d'utiliser des pains ou des gels sans savon. Les additifs à l'eau (huiles) ne sont pas recommandés. Sur le plan vestimentaire, il est préférable de porter du coton ou d'autres tissus bien tolérés. Aucune précaution n'est retenue pour l'usage des lessives ou des assouplissants. Concernant les vaccinations, le calendrier doit être le même chez l'enfant ayant une DA que chez les autres enfants. Il est cependant prudent de les retarder lors de fortes poussées et, en cas d'allergie à l'oeuf associée, les vaccinations contre la grippe et la fièvre jaune nécessitent un avis spécialisé.
(1) Hôpital Archet-2, Nice (2) CHU Nantes.
Le texte des recommandations (version texte court) est disponible sur le serveur de la Société française de dermatologie : www.sfdermato.org.
Un diagnostic clinique
Le diagnostic de la dermatite atopique est clinique. Il n'est donc pas nécessaire de prescrire des examens complémentaires pour prendre en charge ces patients. Le rôle possible d'allergènes comme facteurs pérennisants peut toutefois conduire, dans certaines situations, à des explorations allergologiques. Il n'y a pas de limite inférieure d'âge pour faire pratiquer des tests, mais la prudence est de mise dans leur interprétation car leur positivité ne témoigne pas d'une allergie,mais d'une sensibilisation. Les résultats doivent toujours être confrontés à la clinique, le seul test capable de prouver la responsabilité d'un allergène alimentaire étant le test de provocation orale. Concernant les enfants à tester, trois situations sont validées :
- la DA grave définie après échec à un traitement adapté et bien conduit,
- l'existence d'une stagnation ou d'une cassure de la courbe de staturo-pondérale,
- la présence de manifestations associées évocatrices d'une allergie alimentaire, respiratoire ou de contact.
D'autres situations restent discutées comme la présence de manifestations digestives banales (RGO, pleurs, coliques, etc.), les antécédents familiaux d'atopie sévère, la survenue des signes cutanés avant l'âge de 3<\!p>mois. En cas d'allergie confirmée, on recommande l'éviction du ou des allergènes tout en sachant que l'impact de cette éviction sur la DA n'est pas toujours évident. S'il est admis que l'éviction de l'allergène peut améliorer un eczéma de contact, le résultat est beaucoup plus discuté dans l'allergie alimentaire. C'est pourquoi les experts ont réclamé des études complémentaires. Quant à l'évaluation du bienfait de l'éviction des pneumallergènes, les résultats sont contradictoires et il n'est pas possible de conclure à l'intérêt de l'utilisation des housses anti-acariens.
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