Longtemps les touristes britanniques sont restés en maîtres sur l’île dont, selon la mythologie grecque, Aphrodite, née des flots, aborda le rivage debout sur une conque marine. Aujourd’hui Chypre aimerait conquérir le cœur de nouveaux visiteurs, en particulier les Français qui sont encore peu nombreux à s’y rendre. L’île ne manque pas d’atouts. Elle offre un véritable condensé de l’histoire et des saveurs de la Méditerranée. Hélas, sa capitale, Nicosie, est toujours coupée en deux, depuis 1974. La reprise des pourparlers de réunification de Chypre qui aurait dû débuter, la semaine dernière, a une fois de plus été reportée sine die. Néanmoins, Chypre poursuit son développement touristique au sud de la ligne verte qui la divise entre partie grecque et partie turque. Depuis l’Antiquité, elle est l’objet des convoitises. Disputée par les Perses et les Grecs, conquise par Alexandre le Grand puis par les Ptolémées d’Egypte, elle vit naître le philosophe Zénon, fondateur de l’école stoïcienne. Lazare, arraché à la mort, par le Christ s’y serait installé. L’île fut évangélisée par Saint Paul alors qu’elle était sous domination romaine. Au Moyen Age, nombre de croisés y firent escales. Richard Cœur de Lion sur la route de la Troisième Croisade la reprit aux Bizantins puis la revendit à Gui de Lusignan, le « roi de Jérusalem ». Ce dernier fonda la dynastie qui régna pendant trois siècles sur Chypre avant qu’elle soit prise par les Génois en 1372 puis les Vénitiens en 1489. En 1570, après la célèbre bataille navale de Lépante, les Turcs prirent à leur tour possession de l’île pour trois siècles. En 1878, elle passe sous administration britannique avant de ne conquérir son indépendance qu’en 1960. Depuis 2004, elle a rejoint l’Union européenne dont elle a adopté la monnaie. À 200 kilomètres des côtes de la Syrie et du Liban, Chypre est aujourd’hui le pays européen le plus proche du Proche-Orient. L’Agence France Presse a d’ailleurs basé sa direction régionale Moyen-Orient à Nicosie.
Mot de passe: «Mezze»
Cette proximité culturelle se retrouve dans les assiettes. Ainsi, on mange à Chypre de délicieux « mezze ». Dans les tavernes traditionnelles, plutôt que de tenter de déchiffrer les menus, mieux vaut passer immédiatement commande en ne prononçant que ce mot de « mezze », sésame pour un festin qui ne s’achève que quand les convives demandent grâce. Si l’on fermait les yeux en mangeant, on pourrait se croire tour à tour en Grèce, en Turquie, au Liban, en Egypte… Fromages de chèvre frits, feuilles de vignes farcies, crèmes de pois chiche, viandes marinées en brochettes, saucisses grillées racontent toute l’histoire de l’île. En dessert, on se régale de baklava et de loukoums chypriotes mais aussi de merveilleux glyka, ces noix ou fruits confits tellement gorgées de sucre dont on ne peut en venir à bout sans les accompagner de grandes gorgés d’eau. Sans conteste, les meilleurs « mezze » de Chypre se dégustent à la « Seven Saint George Taverne » de Paphos, une ville également connue pour les splendides mosaïques de la maison de Dionysos. Le patron, George, qui cuisine avec les produits de son jardin, considère la cuisine chypriote comme une philosophie à part entière. Selon lui l’histoire de son île combinée à son abondance naturelle a produit une « héritage culinaire vivant divers et sophistiqué ». Une cuisine à la fois savoureuse et saine. « La manière chypriote de manger, qui correspond au régime méditerranéen, a été reconnue dans le monde entier pour ses bénéfices pour la santé : amélioration des fonctions cardiaques et augmentation de la longévité » assure-t-il. Avant de quitter sa taverne, demandez-lui s’il veut bien vous offrir un plant de citronnelle pour votre balcon. Alors probablement son jeune fils Benedicto se proposera de vous guider dans le jardin familial et vous dira son inquiétude pour l’avenir écologique de l’île. L’an dernier, Chypre a été contrainte d’importer par bateaux-citernes de l’eau potable depuis la Grèce. En mars, alors que les monts Troodos sont encore couverts de neige, les pluies abondantes, qui font que Chypre au début du printemps ressemble presque à la verte Irlande, ne compensent pas les grandes sécheresses de l’été. Mais en toute saison, Chypre mérite qu’on aborde ses rivages.
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