LES RECHERCHES sur la thérapie cellulaire de l'insuffisance cardiaque viennent de faire un grand bond en avant. Des scientifiques de l'université de Washington (Seattle) ont mis au point un cocktail de facteurs de survie favorisant l'établissement de cellules thérapeutiques dans un coeur ischémié. Associé à des cardiomyocytes obtenus à partir de cellules souches embryonnaires humaines, ce cocktail conduit à une amélioration significative de la fonction du muscle cardiaque de rat lésé.
Participer à l'activité électrique contractile.
Laflamme et coll. devraient rapidement tester leur protocole chez des mammifères de taille plus importante, comme le cochon ou le mouton. Ils espèrent pouvoir démarrer les premiers essais chez l'humain d'ici environ deux ans. L'utilisation de cardiomyocytes dérivant de cellules souches embryonnaires en traitement de l'insuffisance cardiaque a dernièrement été évaluée par plusieurs équipes de recherche. Ces cellules présentent l'avantage de pouvoir s'intégrer au muscle cardiaque de manière à participer à l'activité électrique contractile du tissu (contrairement aux myoblastes dérivant de muscles squelettiques). Malheureusement, les protocoles jusqu'ici disponibles manquaient d'efficacité et les greffons obtenus dans les modèles expérimentaux étaient généralement de taille trop modeste pour conduire à un bénéfice clinique significatif.
Ces résultats décevants étaient principalement liés à deux problèmes. D'une part, les cellules thérapeutiques injectées n'étaient pas pures ; les préparations obtenues à partir de cellules souches embryonnaires ne contenaient généralement qu'une toute petite fraction de cellules susceptibles de se différencier en cardiomyocytes. D'autre part, la majorité de ces cellules mouraient rapidement une fois transférées.
Laflamme et coll. se sont attelés à la mise au point de parades permettant de s'affranchir de ces deux soucis techniques.
Pour régler le premier problème, les chercheurs ont utilisé un protocole de prédifférenciation in vitro se fondant sur l'utilisation de deux facteurs de différenciation cellulaire, l'activine A et le BMP4. Le premier facteur conduit les cellules embryonnaires à s'engager dans une voie de spécialisation mésodermique, le second précise encore la différenciation en l'orientant vers une fonction cardiaque. Ce protocole de culture, suivi d'une étape de centrifugation sur gradient de Percoll, permet d'obtenir des préparations contenant généralement plus de 82 % de cardiomyocytes.
La conjonction de plusieurs phénomènes.
Laflamme et coll. se sont ensuite intéressés aux causes de la mort massive des cellules thérapeutiques transférées. Leurs observations les ont conduits à conclure que ce phénomène était lié à la conjonction de plusieurs phénomènes : les cellules injectées sont non seulement exposées à un environnement ischémique et chargé en facteurs inflammatoires, mais elles sont aussi soumises à l'anoikis, un processus d'apoptose déclenché par la perte de contact des cellules avec la matrice extracellulaire. Les chercheurs ont donc mis au point un cocktail permettant de limiter l'impact de l'ensemble de ces problèmes. La préparation contient notamment un gel qui sert de matrice cellulaire et prévient ainsi l'anoikis.
L 'utilisation de ce cocktail conduit à l'établissement d'un greffon fonctionnel dont la taille est augmentée d'un facteur quatre.
La trop faible survie des cellules thérapeutiques transférées est un problème qui concerne pratiquement tous les essais de thérapie cellulaire des tissus solides. Le cocktail de Laflamme et coll. ou, tout du moins, leur démarche scientifique pourrait donc non seulement bénéficier à la mise au point d'un traitement de l'insuffisance cardiaque, mais aussi à celle de solutions contre le diabète, la maladie de Parkinson ou certaines myopathies.
M. A. Laflamme et coll., « Nature Biotechnology », édition en ligne avancée du 26 août 2007.
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