La rétrospective du musée du Louvre présente cent peintures et dessins de Girodet-Trioson, peintre au talent prodigieux qu'on redécouvrit seulement en 1967 lors d'une exposition organisée à Montargis pour le bicentenaire de sa naissance. Négligé au XIXe siècle, Girodet suscita souvent l'incompréhension de ses contemporains et sombra dans un certain oubli. Un mystère plane sur ses œuvres, une ambiguïté en tout cas. Le peintre, qui rejetait la rigidité des classifications artistiques, échappe difficilement par là même à toute stricte affiliation artistique. Il s'émancipa rapidement du néoclassicisme. De même, sur le plan politique, vécut-il en marge de son époque. Hostile à la République, il n'adhéra pas à l'Empire.
L'exposition du Louvre suit une progression chronologique et embrasse l'œuvre de Girodet-Trioson dans son contexte historique et social, de la Révolution au retour des Bourbons sur le trône. Formé par David, Girodet-Trioson se démarqua rapidement de son maître - dès l'obtention du prix de Rome en 1789 - pour affirmer sa singularité, développer ses partis pris audacieux et s'affranchir de l'enseignement reçu. Son style, raffiné, poétique et voluptueux, s'affirme au fil du temps. L'étrangeté, l'érotisme énigmatique, la sensualité des formes, sont les constantes du « langage » de Girodet-Trioson. Peintre du sentiment, lecteur des théories de Rousseau, il fait affleurer à la surface de ses portraits des expressions marquées par l'émotion, la gravité ou l'innocence, autant de traits psychologiques qu'il donne à voir dans le célèbre portrait de Chateaubriand, celui de Jean-Baptiste Belley (député noir de Saint-Domingue), ceux, subtils et inondés de tendresse, du frère Benoît Agnès Trioson, ou encore, dans un tout autre genre, le portrait ironique et impitoyable de Mademoiselle Lange en Danaë.
Les années d'apprentissage.
L'exposition est dominée par quelques chefs-d'œuvre : « la Révolte du Caire », scène sensuelle pleine de virtuosité, le mystérieux « Sommeil d'Endymion », le romanesque et lumineux « Atala au tombeau », ou encore « Ossian accueillant les héros français morts pour la Patrie dans le paradis d'Odin », au sujet duquel David parla de « personnages de cristal ».
Une exposition au musée Girodet de Montargis, la ville natale du peintre, s'intéresse quant à elle à ses années d'apprentissage, jusqu'à sa fortune. Elle nous présente les « camarades-rivaux » de Girodet-Trioson, qui furent tous des élèves de David : François-Xavier Fabre, François Gérard, Antoine-Jean Gros, Jean-Baptiste Wicar et Jean-Baptiste Isabey. Le parcours retrace les années de formation de ces artistes auprès du maître, évoque l'indispensable voyage en Italie et les années 1790 marquées par l'émancipation de ces jeunes talents, qui deviendront progressivement les artistes officiels de l'Empire, tandis que Girodet-Trioson, lui, gardera ce regard sensible porté sur les choses et les êtres, aux antipodes de la peinture d'histoire sévère et moralisatrice. Son art est précurseur. On y perçoit les prémices du symbolisme et de son « mystère de toute chose », on y pressent aussi le surréalisme et la toute-puissance du rêve.
« Girodet », musée du Louvre,Hall Napoléon, Tél. 01.40.20.50.50, Jusqu'au 2 janvier. « Gérard, Girodet, Gros. L'atelier de David », MMusée du Louvre, salles Mollien, jusqu'au 16 janvier.
« Au-delà du Maître - Girodet et l'atelier de David », musée Girodet, 45200 Montargis, tél. 02.38.98.07.81, jusqu'au 31 décembre.
« Girodet et les décors de Compiègne », musée national du château, 60200 Compiègne, tél. 03.44.38.47.00, jusqu'au 6 janvier.
« Péquignot et Girodet : une amitié artistique », musée Magnin, 21000 Dijon, tél. 03.80.67.11.10, jusqu'au 31 décembre.
• Publications : catalogue de l'exposition, coédition musée du Louvre éditions/Gallimard, 352 p., 49 euros. A paraître en novembre, une monographie sur Girodet par Anne Lafont, coéditions Biro/RMN, 144 p., 30 euros.
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