Depuis un mois, Gilles Johanet, conseiller maître à la Cour des comptes, ancien et par deux fois directeur de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM), très fin connaisseur du système de soins français, est en charge aux AGF des activités de santé et d'assurances collectives.
Gilles Johanet aux AGF, c'est un peu, et pour faire court, comme si José Bové se mettait à travailler pour l'OMC. Un grand commis de l'Etat attaché au service public, ardent défenseur d'une assurance-maladie solidaire, rallie un assureur privé. Quelles que soient les raisons personnelles qui ont conduit Gilles Johanet à faire ce choix - on s'ennuie ferme, parfois, sous les lambris de la Cour des comptes -, il est difficile de ne pas voir dans cette volte-face le signe d'un changement des temps et des esprits.
Quand certains sourient sous cape et regardent volontiers le grand commis, dont le cœur porte à gauche, comme un traître de comédie, l'intéressé, lui, trouve son parcours logique. A la presse économique, Gilles Johanet, sans complexe, a expliqué que, en s'immergeant dans le monde des complémentaires, il allait là où se trouvait « le dynamisme » et « la réactivité » en matière d'assurance-maladie. Manifestement déçu par les pesanteurs du régime de base - on se souvient que son grand projet de réforme, le « plan stratégique », a fait long feu à la CNAM -, l'homme semble aussi aujourd'hui persuadé qu'un virage a été pris. « La concurrence ? Elle est en marche. Il n'y a nul besoin de loi pour que l'assurance-maladie complémentaire se réveille pendant que l'assurance-maladie obligatoire se rétracte », indiquait-il récemment à l'occasion de rencontres parlementaires. Apôtre de « la sélectivité de l'offreur de soins », persuadé que « l'usine soviétique » qu'est devenu le système « est un truc fou », qu' « il faut en sortir » et que « le plus tard sera le pire », le nouveau Monsieur Santé des AGF ne veut pas faire le délicat : « Si, pour en sortir, il faut en passer par la concurrence entre offreurs de soins, eh bien, passons-en par là. »
Que l'ouverture se fasse, et les AGF, troisième assureur français, mais premier intervenant dans le domaine de la santé (cela pour des raisons historiques : avant de pouvoir, au milieu des années 1960, être affiliés au régime général de la Sécurité sociale, les non-salariés étaient traditionnellement couverts en santé par les AGF, et beaucoup le sont encore aujourd'hui), auraient bien sûr une carte à jouer.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature