UNE HISTOIRE clinique rapportée dans le « Lancet » permet de faire un rappel du syndrome des antiphospholipides et incite à évoquer cette affection devant des troubles oculaires inexpliqués.
Evangelista Tsironi et coll. (Larissa, Grèce) relatent l’histoire d’une femme de 58 ans, hospitalisée à la suite d’une baisse brutale de la vision avec perception de corps flottants. Les médecins relèvent dans ses antécédents un cancer colique opéré deux ans auparavant.
A l’examen ophtalmologique, l’acuité visuelle est chiffrée à 2/10 à droite et 5/10 à gauche. Le fond d’oeil montre, de façon bilatérale, des infarctus choroïdaux disséminés dans le pôle postérieur, autour de la macula. Une angiographie rétinienne à la fluorescéine montre une hypofluorescence des zones infarcies, au temps précoce, puis une hyperfluorescence au temps tardif.
La patiente est examinée sur le plan général. Les médecins ne découvrent qu’un souffle systolique à 2/6. Une échographie transoesophagienne bidimensionnelle est alors réalisée. Elle montre des végétations mobiles sur la valve mitrale. Un bilan biologique est réalisé, orienté vers les marqueurs tumoraux et les affections auto-immunes. Il montre seulement un léger allongement du temps de céphaline (37 s). Les bilans infectieux et par imagerie (ultrasons, scanner, IRM) ou endoscopie ne montrent rien.
Un traitement anticoagulant.
Un bilan complémentaire est positif pour les IgG anticorps anticardiolipine (aCL). Il est également positif pour les IgM aCL et l’anticoagulant lupique. Les IgG demeurent positifs pendant douze semaines.
Comme le diagnostic de syndrome des antiphospholipides accompagné d’une endocardite thrombogène non bactérienne est évoqué, un traitement anticoagulant est instauré.
Au bout de quatre semaines, l’acuité visuelle de la patiente s’améliore ; deux semaines plus tard, les corps flottants ont disparu. Au bout de deux mois, l’échocardiographie et l’IRM cardiaques sont normalisées.
Lorsque la patiente est revue à cinq mois, la vision est rétablie à gauche et quasi normale à droite. À un an, son état est stabilisé.
Thromboses veineuses ou artérielles.
Le syndrome des antiphospholipides, rappellent les auteurs, se caractérise par des thromboses veineuses ou artérielles, des avortements à répétition et des anticorps antiphospholipides circulants. Il en existe deux formes, primaire ou secondaire. Les pathologies rétiniennes et choroïdiennes sont plutôt le fait des primaires, les thromboses rétiniennes plutôt dues aux formes associées au lupus.
Dans le cas présenté, le syndrome des antiphospholipides est responsable des infarctus choroïdiens. Alors que des élévations des aCL sont rapportées au cours des cancers et que des endocardites thrombogènes non bactériennes peuvent accompagner les affections malignes, aucune récidive n’a été mise en évidence.
Ce cas clinique rappelle aux médecins qu’il faut demeurer vigilants face au risque de thrombose en cas de cancer à aCL positifs. Et que des troubles oculaires inexpliqués doivent faire évoquer un syndrome des antiphospholipides, d’autant qu’un traitement anticoagulant doit être instauré dès que possible.
« The Lancet » vol. 368, 25 novembre 2006, p. 1936.
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